dimanche 8 octobre 2017

Le cri de la mouette - Emmanuelle Laborit

En résumé.

Peu de temps après sa naissance, les inquiétudes de Monsieur et Madame Laborit se confirment: leur fille, Emmanuelle est sourde. Commence alors une période de doutes et de questionnements au sujet de cette surdité à laquelle ils ne sont pas préparés. La petite fille souffre du manque de communication et a pris l'habitude de pousser des cris de mouette pour rappeler à ses proches qu'elle existe. Son destin prend une toute autre tournure lorsque son père prend contact avec l'International Visual Theatre, repère des sourds, et les inscrit tous les deux à des cours de langue des signes. Toute la famille va s'y mettre et Emmanuelle, maintenant dotée de sa langue maternelle va pouvoir s'épanouir. Son adolescence est tout de même chahutée, alors qu'elle est tiraillée entre le monde des entendants et le monde des sourds, parfois victime d'incompréhensions et d'un amour qui la pousse dans ses retranchements. A force de ténacité, elle passe finalement son bac et réalise son rêve, devenir comédienne. Elle est la première sourde à obtenir un Molière pour son jeu dans la pièce de théâtre Les enfants du silence. Elle est aujourd'hui la co-directrice de l'IVT et une personnalité connue pour défendre la langue des signes et promouvoir la place des sourds dans la société.

Mon avis.

Cette lecture est directement en lien avec mon métier. J'ai beaucoup entendu parler d'Emmanuelle Laborit sans jamais avoir lu cette autobiographie qui nous offre une plongée dans le monde des sourds. Il est toujours compliqué de chroniquer un témoignage car les mots couchés sur le papier appartiennent à l'auteur et ne sont que l'expiation de leurs ressentis et de leur évolution. Par ailleurs, il est très difficile pour moi d'être totalement objective et de ne faire que des louanges sur le parcours d'Emmanuelle Laborit car je connais trop bien cet univers pour y voir en creux toutes les querelles idéologiques et culturelles qui agitent la communauté sourde et les professionnels qui y touchent de près. La surdité est certes un handicap mais c'est aussi une affaire de culture, dont le fer de lance est la langue des signes. Au fil du temps, je me suis forgée une réflexion sur le sujet et je pense que ce n'est pas le lieu ici de rentrer en accord ou désaccord avec l'auteur. Je vais donc m'en tenir à mes premières impressions.

J'ai été frappée par cette soif de communication dont Emmanuelle Laborit fait preuve. Comme tous les êtres humains, me direz-vous. Certes, mais ce mot revient comme un leitmotiv tout au long du livre et est à l'origine de ses plus violentes crises. La langue des signes vient donc apaiser ce sentiment d'exclusion mais lui permet aussi de rencontrer des gens qui sont comme elle. Ce parcours est partagé par beaucoup de sourds qui sont souvent poussés vers la voie oraliste mais à qui ça ne convient pas et qui finissent par se charger en agressivité, tout simplement parce qu'ils se sentent différents et parce qu'ils ne peuvent pas communiquer. Après de longues heures d'observation et d'analyse, je me suis rendue compte que ces réactions sont bien sûr très prégnantes chez les sourds mais se retrouvent également chez d'autres minorités, elles entendantes mais qui diffèrent de la majorité pour d'autres raisons. Le fait de ne pas être reconnu, de se sentir en marge, de ne pas pouvoir communiquer avec son prochain (la communication n'est pas qu'affaire de langage) est source de frustration qui se transforme souvent en violence.

Pour parler un peu du style du livre, on a bien évidemment affaire à une narration en première personne. L'écriture est fluide et permet une lecture très rapide. Pour autant, l'enchaînement des événements se fait de façon décousue. Je me suis sentie à plusieurs reprises un peu perdue dans le temps. Elle convoque des souvenirs qui viennent perturber le temps du récit. Cela m'a un peu gênée mais rien de dramatique dans la mesure où il s'agit d'une autobiographe et si elles ne sont pas explicites, on parvient tout de même à deviner les étapes phares de l'évolution de l'auteur.

Une lecture que je vous conseille si vous souhaitez en savoir plus sur l'univers des sourds ou si vous avez tout simplement envie de partir à la rencontre d'Emmanuelle Laborit, personnage connu et reconnu.

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ Entrer dans l'enfance et l'adolescence d'une personnalité aussi connue est intéressant.
+ Connaissances sur le milieu sourd.

- Un enchaînement de faits parfois décousu.

Dernières infos.

Le cri de la mouette a été publié en 1994 et compte 237 pages. Si le théâtre bilingue LSF/Français vous intéresse, je vous renvoie sur le site de l'IVT.

Ma note.
Challenges.

Cette lecture me permet d'avancer dans ces challenges: 
Défi lecture 2017 - Consigne 40: un livre de ma Wish-List. (31/80)
ABC 2017 - Lettre L (16/26)

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