samedi 15 juin 2019

Autobiographie d'une courgette - Gilles Paris

En résumé.

Du haut de ses neuf ans, Icare, mieux connu sous le nom de Courgette, est un enfant gai et joyeux mais que la vie écorche : un papa parti faire le tour du monde avec "sa poule", une maman qui n'a d'intérêt que pour la bière et la télé, pas de frères, pas de sœurs. Alors un jour, pour crever le ciel qui lui apporte tant de malheurs, il tente de percer les nuages à coups de revolver, trouvé dans les affaires de sa mère. Seulement, ce n'est pas le ciel qui va succomber à ces attaques, mais sa mère. Suite à une décision de justice, Courgette est placé en maison d’accueil. Entre les farces avec son copain Simon, les grandes discussions avec les "zéducateurs" et son histoire d'amour avec Camille, Courgette va connaître les meilleurs moments de son enfance.

Mon avis.

Comme bien souvent - crédule consommatrice que je suis - c'est d'abord la couverture qui m'a poussée à m'intéresser à ce livre. Travaillant dans le domaine de l'enfance difficile (même si mon lieu de travail n'a qu'un rapport très lointain avec celui décrit dans le livre), le thème a piqué ma curiosité. J'ai donc reçu ce livre lors d'un swap il y a déjà deux ou trois ans. Finalement, ce n'est qu'il y a quelques semaines que j'ai tourné les premières pages.

Les débuts ont été un peu compliqués pour moi. Il faut dire que passer de Da Vinci Code de Dan BROWN à un livre narré à la première personne par un enfant de neuf ans, c'est rude ! J'ai donc eu des difficultés lors des premiers instants à me plonger dans cette histoire, déroutée par les choix stylistiques de Gilles PARIS. Le passé de Courgette et les événements qui le conduisent à être placé en maison d'accueil sont à mon sens un peu bâclés. Mais je pense que le projet de l'auteur était vraiment d'aborder la nouvelle vie de Courgette, et non de s'attarder sur ses conditions de vie difficiles. Ce livre est un livre résolument optimiste. La vie de Courgette, qui démarre plutôt mal - plus de parents et plus de famille, un meurtre sur la conscience - prend finalement un virage inattendu et, grâce aux rencontres qu'il fait, lui promet un avenir serein. Le fait que l'histoire soit racontée par un enfant ajoute à l'optimisme général et apporte de la légèreté, une certaine naïveté qui dédramatise complètement l'atrocité des événements. Cela évite que les faits soient abordés avec un apitoiement de rigueur et une pitié nécessaire. Là réside à mon sens la force du bouquin et c'est ce qui fait qu'il est apprécié par de nombreux lecteurs. D'ailleurs, le livre s'adresse aux enfants/adolescents comme aux adultes. Les enfants trouveront plutôt leur bonheur dans la deuxième partie du livre, en suivant les histoires d'amitié et d'amour du petit garçon. Les adultes porteront un autre regard sur l'histoire de Courgette, en retraçant son parcours et en se laissant emporter par un autre regard, plus optimiste, sur la situation.

De façon générale, j'ai plutôt été charmée par ma lecture de ce petit roman. J'ai apprécié toute la documentation qu'il y a autour de l'écriture de ce livre. Gilles PARIS a en effet rencontré et observé durant de longues périodes un instituteur, des psychologues, des éducateurs et autres professionnels de terrain travaillant auprès d'enfants placés en maison d'accueil. Même si l'histoire est purement fictive, elle part quand même d'un fond de vérité et de la réalité de terrain. Une réalité qui sert de cadre au déroulement de l'histoire mais l'auteur n'hésite pas non plus à s'en écarter. Certains faits m'ont paru particulièrement romancés. Je pense surtout à l'adoption de Courgette par le gendarme qui semble se faire en un claquement de doigts, alors que le chemin doit être bien long en réalité. L'histoire d'amour entre Camille et Courgette semble aussi trop facile. Je doute que dans les maisons d'accueil, on laisse deux jeunes s'aimer autant à la vue de tout le monde... Bon, quelques petits écarts qui ont vite fait de nous rappeler que nous sommes dans une fiction mais qui ne sont pas dérangeants, ils contribuent à la magie de l'histoire de Courgette !

En résumé, je vous conseille ce livre qui, de part son thème et sa plume, rompt avec des lectures plus ordinaires. Cela fait du bien parfois de changer d'angle de vue et de se replonger dans l'univers enfantin, même s'il n'est pas toujours rose.
Mon avis.

Autobiographie d'une courgette date de 2002 et compte 265 pages. Un film d'animation, réalisé avec des personnages en pâte à modeler, Ma vie de courgette, est sorti en 2016.

Ma note.

jeudi 6 juin 2019

Throwback Thursday - Famille

Bonjour à tous !

Le Throwback Thursday est un rendez-vous créé par Betty Rose Books et repris par Carole de My-BoOks sur son blog. Les consignes sont très simples: chaque Jeudi, il s'agit de proposer un livre en accord avec le thème que Carole nous aura concocté. Le but est de revenir sur des lectures passées mais aussi d'enrichir notre Wish List en découvrant le choix des autres blogueuses !

Cette semaine, le thème est Famille.

Pour l'occasion, voici le livre que j'ai choisi :

Pierre et Jean
Guy de Maupassant

A cause d'un cruel manque de temps, cela fait huit mois que je n'ai pas participé au Throwback Thursday. Je suis donc heureuse d'être de retour et de pouvoir écrire cet article aujourd'hui. Le thème de la famille est un thème récurrent dans la littérature, parce qu'il est porteur d'enjeux et qu'il offre à l'écrivain la possibilité d'évoquer toute une palette d'émotions. J'avais donc plusieurs choix à disposition, mais j'ai décidé d'opter pour une lecture toute récente, un petit classique peu connu, Pierre et Jean de Guy de Maupassant.

En résumé : L'histoire se passe dans une famille bourgeoise du XIXème siècle, dans la ville portuaire du Havre. Pierre et Jean sont deux frères que tout oppose : l'un est blond quand l'autre est brun, l'un est avocat quand l'autre est médecin, l'un est calme et doux quand l'autre est colérique et impulsif. Le calme familial apparent est un jour ébranlé par l'annonce d'un héritage revenant exclusivement au cadet, Jean, suite au décès d'un vieil ami de la famille. La nouvelle divise, entre ceux qui profitent de cet argent tombé du ciel et ceux qui y voient l'occasion de déterrer de vieux secrets de famille. Ce qui est certain, c'est que l'amitié fraternelle de Pierre et Jean va voler en éclats.

Mon avis : Pierre et Jean est un court roman - ou une longue nouvelle - très accessible, et agréable à lire. J'ai particulièrement aimé la façon dont l'auteur s'intéresse aux sentiments de ses personnages, dont il dresse un portrait psychologique précis et juste. Tout au long du récit, le thème de la mer est très présent, celle-ci servant de métaphore aux tourments des personnages. En conclusion, je vous conseille ce petit livre qui explore toute la complexité des relations familiales. Si vous franchissez le pas, je vous conseille également de vous procurer le livre dans une édition augmentée, qui comprend une analyse de l'écrit, cela m'a aidée à y voir plus clair dans les problématiques abordées par l'auteur et à resituer le livre dans son temps.

dimanche 26 mai 2019

Da Vinci Code - Dan Brown

En résumé.

Dans la Grande Galerie du musée du Louvre, Jacques Saunière, qui en est le conservateur en chef, est pris au piège par un géant albinos qui souhaite, sous la menace, lui dérober son ultime secret. Après avoir envoyé son bourreau sur une fausse piste, il parvient, quelques minutes avant sa mort, à laisser un message à ceux qui le trouveront : un quatrain accompagné de "Appelez Langdon". Robert Langdon, célèbre historien spécialisé dans les sociétés secrètes et le décryptage de leurs méthodes est dépêché en vitesse. Par mauvaise interprétation du dernier message de Jacques Saunières, la police pense qu'il est le coupable du meurtre. Alors qu'il est prêt à être embarqué, Robert Langdon reçoit l'aide précieuse de Sophie Neveu, cryptologue pour le musée, et qui n'est autre que la petite-fille du conservateur. Ensemble, ils parviennent à prendre la fuite et se lancent à la recherche du fameux secret de Jacques Saunières.

Mon avis.

J'ai découvert l'univers de Dan BROWN il y a un an et demi avec Anges et Démons, dont je garde un très bon souvenir. Il y a maintenant deux semaines, sortant d'un désert livresque qui a duré quelques mois par cruel manque de temps pour lire, j'ai eu envie de me plonger dans un livre dont j'étais sûre qu'il me plairait. Da Vinci Code traînait dans ma PAL et c'est tout naturellement que j'ai décidé de l'en sortir.

Bien que l'on entre directement dans le vif du sujet, je me suis sentie perdue pendant la toute première partie du livre. L'auteur donne les informations au compte-goutte, donc pas facile de s'y repérer quand on ne connaît rien aux sociétés secrètes qu'il évoque. Comme pour Anges et Démons, il est en effet question dans ce livre de sociétés secrètes - le Prieuré de Sion et la un peu moins secrète Opus Dei qui se livrent une bataille féroce pour la découverte du fameux Graal, objet mystérieux qui fascine et nourrit souvent l'imagination des écrivains ou encore des réalisateurs. Dans la préface, Dan BROWN informe le lecteur sur la véracité des informations écrites dans le livre et que celui-ci fait suite à des recherches qu'il a menées sur ces questions. Au fur et à mesure de ma lecture, moi complètement novice en la matière, j'ai effectué quelques bribes de recherches sur cette véracité supposée. Il en ressort que rien de ce qu'il écrit ne semble fondé et que l'on a bel et bien affaire à un thriller inventé de toute pièce, même si l'auteur se nourrit des enseignements de l'Histoire. Cette ambiguïté autour d'un sujet très controversé depuis la nuit des temps, en particulier parce qu'il est question de religion et du pouvoir de l’Église, explique très certainement pourquoi ce livre a eu un vaste retentissement médiatique à sa sortie et pourquoi il a autant déchaîné les foules.

Si le contenu est plutôt attractif car il ménage une forme de suspense, j'ai été moins séduite par la forme. Je trouve que Da Vinci Code est moins bien ficelé qu'Anges et Démons, que certains passages sont un peu téléphonés et faciles (pour ceux qui l'ont lu, je pense notamment aux retrouvailles avec Sir Teabing). L'originalité est très limitée puisque l'on retrouve exactement le même déroulement que dans Anges et Démons et dans les autres bouquins qu'il a écrits j'imagine. Les personnages sont finalement les mêmes : Robert Langdon, bien sûr, et puis une femme à ses côtés, bien sûr. Je ne vous spoilerai pas mais j'ai été plutôt déçue par la fin qui n'est, à mon avis, pas à la hauteur de tous les enjeux qu'il pose au cours des différents chapitres. Je pense que cela était un peu inévitable, difficile d'être à la hauteur d'un tel sujet qui ne trouve pas de réponse depuis des millénaires. Malgré toutes ces petites déceptions, je tiens quand même à préciser que je me suis prise au jeu et que l'on a très envie d'aller jusqu'au dénouement. J'en ai appris plus sur tous les secrets de l'Histoire qu'il évoque, ce qui est plutôt intéressant et cela m'a donné envie de consulter les écrits qui sont sortis après la parution de Da Vinci Code pour l'analyser et prouver en quoi ce qu'écrit Dan BROWN est faux.

Si vous avez envie d'un thriller haletant, qui remue les passages sombres de l'Histoire et qui a un petit côté complotiste, je vous conseille ce livre. Toutefois, bien que ce soit un best seller, je vous conseille de ne pas trop en attendre, sinon vous serez déçus.

Dernières infos.

Da Vinci Code a été publié en 2004 et compte 741 pages. Il a été adapté au cinéma en 2006, avec Tom HANKS dans le rôle de Robert Langdon, Audrey Tautou dans le rôle de Sophie Neveu et Jean Réno dans le rôle du commissaire Bézu Fache.

Ma note.

dimanche 5 mai 2019

Pierre et Jean - Guy de Maupassant

En résumé.

La famille Roland, famille bourgeoise du XIXème siècle accueille en son sein deux frères que tout oppose : l'aîné, Pierre, médecin, brun, impulsif et colérique et le cadet, Jean, avocat, blond, calme et gentil. Ces deux hommes, qui semblent s'entendre malgré les différences marquées, voient leur fraternité ébranlée par une nouvelle à laquelle ils ne s'attendaient pas. La famille découvre qu'à sa mort, l'un de leurs vieux amis a décidé de léguer la totalité de son héritage à Jean. Cette générosité divise, entre ceux qui y voient l'occasion de se faire mousser dans la bonne société et de lancer Jean dans son activité d'homme de loi et ceux qui s'interrogent sur ce don qui ne touche qu'un seul membre de la famille. Pierre, mû par une jalousie qu'il peine à contenir, fait partie des sceptiques. Ses interrogations le mènent à déterrer de vilains secrets de famille...

Mon avis.

Ce court roman, ou cette longue nouvelle - la question du genre divise - trônait dans ma bibliothèque depuis quelques années déjà. Il y a quelques mois, alors que je n'avais plus le temps de lire pour des raisons professionnelles, j'ai quand même eu envie de me plonger dans un court récit, plutôt classique. Mon choix s'est porté sur celui-ci, n'ayant lu jusque là qu'un écrit de Guy de Maupassant, Bel ami.

Avec Pierre et Jean, l'auteur emmène le lecteur dans sa Normandie bien-aimée, dans la ville du Havre pour être précise, au sein d'une famille appartenant à la petite bourgeoisie des commerçants. Ce récit est publié à l'époque où les courants réaliste et naturaliste se déploient. De ce que j'en ai lu, ce récit semble s'inscrire dans les deux courants, sans pour autant réunir tous les traits caractéristiques de l'un ou de l'autre, qui le classerait dans une seule catégorie. Mes connaissances sur les courants littéraires étant à ce jour très restreintes, je laisse le soin à des plus experts de trancher la question. Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il s'agit bien dans cet écrit de décrire une réalité sociale, la vie de ces petits bourgeois qui commencent à intéresser les artistes (peintres, écrivains) de l'époque. Toutefois, l'auteur ne s'arrête pas seulement à une étude sociologique de ses personnages, il les dissèque, les analyse et se sert de sa plume pour décrire leur psychologie. Je n'ai pas trouvé l'intrigue particulièrement haletante. Non, la force du livre est plutôt dans cette fouille cérébrale de la famille Roland, et surtout des deux frères. J'ai aimé le style de Maupassant, à la fois concis, pertinent mais simple. Son écrit reste tout à fait accessible, et je me suis sentie happée par ses descriptions chirurgicales des sentiments de chaque personnage.

Il est question dans ce livre d'un fils illégitime, caché par la mère, à cette époque où les mœurs en font quelque chose de tabou, en particulier dans les hautes strates de la société. Plus généralement, c'est le thème de la famille qui est exploré, des liens que l'on croit légitimés par une filiation de sang et qui volent en éclats lorsqu'une tout autre vérité apparaît. Avec elle, les personnages redécouvrent des sentiments déjà éprouvés par le passé, mais dont l'intensité reste nouvelle : le sensation d'être trahi par la mère, la douleur de constater que les liens familiaux construits reposent sur un mensonge, la menace du qu'en-dira-t-on, la jalousie, la perte de confiance dans ses repères. Un dernier thème est abordé par l'auteur, un thème qui renforce l'ampleur des tourments des personnages, celui de la mer. Le récit s'ouvre par une partie de pêche et s'achève sur une scène dans le port du Havre. La mer est là pour symboliser tout à tour la sérénité des personnages comme la violence de leurs émotions. Pierre va souvent sur le port pour réfléchir. L'observation du ressac des vagues contre les rochers accompagne ses réflexions, qui s'achèveront par la découverte de la vérité. Pierre et Jean n'aurait pas pu mériter meilleur cadre qu'une ville côtière pour voir se développer cette intrigue qui est surtout affaire de sentiments.

En résumé, un petit classique qui se lit bien et vite, aux thèmes riches, pertinents et approfondis. Si vous êtes intéressés par cette histoire, je vous conseille de vous procurer un livre qui s'accompagne d'une partie analyse (édition des collèges ou lycées). Cette partie m'a bien aidée pour situer le récit dans son temps, et en saisir tous les enjeux.

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ La richesse des thèmes abordés : les liens familiaux, le fils illégitime, la mer.
+ L'analyse psychologique des personnages et la justesse des termes employés.
+ Un classique tout à fait accessible, à la plume agréable !

- Certains passages peuvent paraître longs mais ils ne gâchent en rien l'expérience de lecture.

Dernières infos.

Ce livre, publié en 1888, compte 159 pages.

Ma note.

samedi 23 février 2019

Joyeux suicide et bonne année - Sophie De Villenoisy

En résumé.

Sylvie Chabert est célibataire, sans enfant, entièrement dévouée à son travail, pas d'amis sauf la fidèle Véronique. Et maintenant, elle n'a plus de parents, son père vient de la quitter pour rejoindre les anges. Alors Sylvie Chabert décide d'en faire de même. Du moins, dans quelques mois. Avant, elle s'autorise à consulter un psy - un psy plutôt charmant qui lui conseille de réaliser toute une série d'actions, des choses qu'elle n'a jamais osé faire. Cela la conduit petit à petit à regarder la vie autrement, à faire sauter les derniers verrous qui l'enfermaient dans une vie monotone. Une renaissance qui la conduira, peut-être, à aimer la vie de nouveau.

Mon avis.

C'est mon amoureux qui m'a offert ce roman pour mon anniversaire, et donc pour la nouvelle année - les deux jours coïncidant - l'an dernier. Je vous l'accorde, c'est un cadeau au titre un peu étrange mais n'y voyez pas un message caché de sa part, juste l'envie de me proposer une histoire en accord avec mes ressentis, car je suis de moins en moins adepte des passages à la nouvelle année. C'est toujours pour moi un moment douloureux, non pas parce que je prends une nouvelle année de vieillesse, mais parce que cette soirée du nouvel an ne m'inspire plus que mélancolie, voire tristesse. Enfin bref, tout ça pour dire que je me suis enfin plongée dans ce tout petit livre.... au mois de Février ..... mais l'hiver n'est pas terminé, ouf !

Vous l'aurez peut-être deviné à sa couverture aux couleurs chatoyantes et aux illustrations girly, nous sommes dans le registre du feel-good, voire du chick-lit (la frontière entre les deux registres est, pour moi, souvent assez mince) avec ce roman. Tous les codes sont réunis : une héroïne malheureuse, voire même suicidaire, dont la vie est toute grise et sans espoir d'amélioration mais il suffit que quelques grains de sable (un homme, une femme SDF sur un quai de métro, une collègue un peu farouche et un psy audacieux) viennent enrayer les mécanismes de la routine et nous voilà repartis pour un tour ! Je ne peux pas le nier, c'est un livre qui est plaisant à lire, avec des passages qui nous arracheraient un début de sourire (je pense aux premiers chapitres), des personnages mignonnets et une morale gentillette, même si déjà vue, re-vue et rere-vue. Pour tout cela, le livre remplit le contrat : il nous fait passer un bon moment. Mais j'en suis malheureusement restée là : un bon moment, c'est tout, rien de plus, et ce pour plusieurs raisons.

La première raison est que l'histoire est un peu tirée par les cheveux. ! Attention spoiler ! Imaginez, la nana est au fond du sceau, elle éprouve le désir de mettre fin à ses jours, mais il suffit d'une partie de jambes en l'air et d'une rencontre avec une femme SDF (qui meurt dans ses bras) pour qu'elle retrouve, en quasiment deux jours, la pêche et l'envie de vivre. Loin de moi l'idée de sous-estimer le pouvoir de ces deux événements (la partie de jambes en l'air et la mort d'une personne sous ses yeux) mais je trouve que c'est un peu surfait et un peu léger pour guérir une personne enfermée dans une profonde dépression, pour qui il n'y pas d'autre issue que la mort. D'autre part et je le confesse, je suis un peu psychorigide, alors j'aime les histoires réalistes et crédibles (pour toute autre histoire qui n'appartient pas au fantastique ou à la science-fiction). Or, il me semble que la probabilité de voir une personne inconnue mourir dans ses bras est de l'ordre de l'infime. J'aime parfois rêver avec les histoires feel-good (lorsqu'elles sont bien écrites) mais j'estime qu'elles ne sont vraiment réussies que lorsqu'elles ont des réelles chances de se produire. ! Fin du spoil ! La deuxième raison est que nous sommes dans un style d'écriture superficiel. Parce que l'histoire reste superficielle et convenue, les mots employés ne risquent pas de défriser la moustache des Académiciens. Ou peut-être est-ce l'inverse : c'est parce que les mots employés ne risquent pas de défriser la moustache des Académiciens que l'histoire ne décolle pas. Je pense que les thèmes du suicide et de la solitude auraient mérité plus de profondeur et davantage de développement. C'est dommage, car l'idée de départ n'est pas mauvaise, il aurait juste fallu lui donner plus d'ampleur, plus d'enrobage. La dernière raison mais qui découle des autres est que l'ensemble reste niais et vraiment bienpensant.

En conclusion, mon amoureux, quand tu liras ces quelques lignes, merci du cadeau mais la prochaine fois, un peu plus de robustesse dans l'écriture, sans tomber dans du Proust (il comprendra le clin d’œil). Pour vous autres, de passage sur ce blog, un petit livre à lire si vous tombez dessus dans une boîte à livre ou à la bibliothèque, si vous avez quelques heures à tuer dans les transports en commun, ou si vous avez 44 de fièvre et que vous n'avez plus la pêche suffisante pour lire autre chose.

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ Un livre feel-good fidèle au genre, plaisant à lire avec des personnages mignonnets, quelques passages amusants et un ensemble bienveillant.

- Toutefois, l'histoire reste tirée par les cheveux, manquant de réalisme.
- Les thèmes (solitude, mort, ...) manquent de développement, on reste trop à la surface des choses.
- L'ensemble reste niais et bienpensant.
- Trop vite lu.... et vite oublié !

Dernières infos.

Joyeux suicide et bonne année a été publié en 2016 et compte 214 pages.

Ma note.

samedi 20 octobre 2018

Les souvenirs - David Foenkinos

En résumé.

Le narrateur est veilleur de nuit dans un hôtel parisien - un emploi qu'il a choisi car il lui laisse le temps de trouver l'inspiration pour ce livre qu'il rêve d'écrire. Si sa vie professionnelle rime avec routine, sa vie privée connaît quelques remous. Son grand-père vient de mourir, et il s'aperçoit qu'il n'a pas su être à ses côtés pour ses derniers jours. Lorsque sa grand-mère, désormais veuve, s'échappe de la maison de retraite dans laquelle elle a été placée, il n'hésite pas à se lancer à sa recherche. Il finit par la retrouver, à Etretat, et une fois ensemble, grand-mère et petit-fils vont partager de tendres moments, autour de leurs souvenirs. Lors de ce voyage, le narrateur rencontre Louise, dont il va tomber amoureux...

Mon avis.

Les souvenirs est mon deuxième roman de David Foenkinos, après La Délicatesse lu quelques années plus tôt. C'est dans le cadre du Pumpkin Autumn Challenge 2018 que j'ai décidé de me tourner vers ce livre, afin de compléter la catégorie "Pommes au four, tasse de thé et bougie" du menu "Automne - Douceur de Vivre". J'avais envie d'une lecture réconfortante, sans prise de tête, et bien écrite. Pari réussi avec ce livre plein de douceur !

J'ai pu lire à droite, à gauche, qu'il fallait avoir un moral d'acier avant d'entamer cette lecture, au vu des thèmes abordés. Certes, le deuil, la vieillesse, la séparation, suite à un décès où à une rupture amoureuse confèrent une certaine nostalgie à l'ensemble du récit. Toutefois, je ne l'ai pas trouvé déprimant pour autant. Ces choses-là font partie de la vie et l'auteur les abordent avec beaucoup de simplicité, de tendresse et de beauté. Ces événements, de part les émotions qu'ils provoquent chez le narrateur, vont lui donner l'entrain et l'inspiration nécessaires à l'écriture de son livre. Ce sont ces souvenirs qui alimentent son envie de créer et d'enfermer sa mélancolie dans une production artistique. Par ailleurs, d'autres thèmes à connotation plus positive contrastent avec la douleur du temps qui passe. Je pense, bien sûr, à l'amour et à l'histoire que la narrateur va vivre avec Louise. Cette partie de l'intrigue ne constitue en aucun cas la charpente de l'édifice, elle vient juste y apporter sa pierre, d'une jolie manière. C'est aussi l'occasion d'évoquer le poids de la transmission entre générations, nos amours naissants, notre avancée dans la vie font écho à ceux que nos aïeux ont pu vivre, c'est comme s'ils nous passaient le relais, à leur disparition. Rien de bien dramatique, c'est la vie qui continue... J'ai pu lire que ce roman était en fait une autobiographie. Après avoir cherché des éléments sur la vie de David Foenkinos, il semblerait que ce soit pure fiction car rien ne correspond avec la réalité. Mais c'est vrai que c'est piégeant, tellement on entre dans l'intimité du narrateur.

Dans la première partie du livre, j'ai été déboussolée par la narration (qui se fait à la première personne). Je ne savais pas vraiment où on voulait m'embarquer, cela me semblait un peu fouillis. On me parlait d'un grand-père, puis d'une grand-mère, puis d'un père et d'un fils qui ne sait pas quoi raconter dans son livre. J'ai compris, petit à petit, qu'il n'y aurait pas une intrigue franche et déterminée dans ce livre mais que ce serait plutôt une ode aux souvenirs, pêle-mêle, tels qu'ils viennent à l'esprit du narrateur. Le concept est poussé jusqu'au bout puisque entre chaque chapitre (au demeurant très courts), sont glissés des bribes de souvenirs (à peine quelques lignes) de personnages célèbres (Saint Lazare, Alois Alzheimer, Vincent Van Gogh) ou d'inconnus (Gérard, le policier en première ligne, le peintre du tableau de la vache) mais toujours en lien avec le chapitre qui précède. J'ai trouvé l'idée plus sympathique, elle apporte une plus-value à l'intrigue générale. Le style d'écriture est très fluide, on a l'impression qu'on assiste à un monologue d'une personne qui nous raconterait sa vie, au travers de ses souvenirs. Le récit du narrateur est émaillé par quelques réflexions pertinentes. Une m'a marquée plus que les autres : le père du narrateur a travaillé d'arrache-pied toute sa vie et lorsqu'il doit partir à la retraite, c'est tout son monde qui s'écroule. Il continue d'aller au bureau tous les jours mais se rend vite compte que ses collègues poursuivent leur vie, sans lui et ne l'incluent plus dans la gestion des dossiers. Il réalise alors que sa vie professionnelle avait pris le pas sur sa vie privée et qu'il ne lui reste plus rien maintenant qu'il est hors-circuit. Rien d'original dans cette anecdote mais ça m'a fait du bien de le lire et de me souvenir de faire attention aux limites à dresser entre vies professionnelle et privée. 

En conclusion, je vous conseille ce petit livre qui parle de la vie, sans prétention, celle du quotidien, celle qui nous concerne tous. Le récit est empreint de douceur, de tendresse et de bienveillance, il saura vous réconforter même si les thèmes abordés ne sont pas toujours des plus heureux.

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ Un style d'écriture agréable, fluide et tout en simplicité.
+ L'impression de douceur et de sérénité qui se dégage à la lecture.
+ Les petits souvenirs incrustés sont une bonne idée.

- Dans la première partie du livre, on ne voit pas vraiment où l'auteur souhaiter nous embarquer.

Dernières infos.

Les souvenirs a été publié en 2011 et il compte 290 pages. Il a été adapté au cinéma en 2015 par Jean-Paul Rouve et mettant en scène, entre autres Michel Blanc et Annie Cordy. David Foenkinos est également l'auteur de La délicatesse, Le Mystère Henri Pick, Charlotte ou encore Le potentiel érotique de ma femme.

Ma note.

samedi 6 octobre 2018

L'arrière-saison - Philippe Besson

En résumé.

Ben s'agite derrière son comptoir, dans ce café de Cap Cod (côte Est des Etats-Unis), éclairé ce soir-là par le coucher du soleil typique de la fin Septembre, cette lumière franche qui annonce le début de l'automne, froid et rugueux. Les gestes de Ben sont empreints d'une certaine nervosité, comme s'il s'imprégnait des états d'âme de sa cliente fidèle, Louise, accoudée au bar, dans sa robe rouge qui la sublime. Elle attend Norman, son amant, qui doit aujourd'hui quitter sa femme pour la rejoindre, elle, son amour illégitime. Lorsque la clochette retentit, ce n'est pas Norman qui pousse la porte du café mais Stephen, le vieil amour de Louise qui l'a quittée quelques années auparavant pour une amie du couple. Aujourd'hui célibataire, il espérait bien tomber sur cette ancienne conquête dont il est toujours amoureux. Voilà une soirée étrange pour Louise, qui se trouve désormais partagée entre deux hommes. Les souvenirs se bousculent, les sentiments s'agitent, comme Ben, derrière son comptoir.

Mon avis. 

L'arrière-saison fut l'objet d'une relecture. Alors que l'automne montre le bout de son nez, j'avais envie de ressortir ce livre des étagères de ma bibliothèque. Au commencement de l'histoire de Louise et de ses trois mâles, il y a ce tableau d'Edward Hopper, Nighthawks (1942), souvent traduit par Les Noctambules ou Rôdeurs de Nuit. Ce peintre américain, très célèbre pour ses tableaux qui pointent la solitude de l'homme moderne, est très certainement mon peintre préféré. Je suis à chaque fois bouleversée par les décors qu'il propose et les âmes humaines qui les habitent. Les sentiments qui se dégagent de ses toiles sont si justes, si profonds, si émouvants... Alors comment résister à cette proposition de Philippe Besson de raconter les tourments des protagonistes de ce tableau qui sert de couverture au livre ?

Si vous voulez de l'action, je vous arrête tout de suite, car ce livre est plutôt du genre contemplatif. L'auteur respecte d'une main de maître le rythme qui se dégage de ce tableau, à savoir cette lenteur de la pensée un Dimanche soir, dans un café désert, alors que la nuit fait doucement son apparition. L'action est minime, les dialogues rares et succincts, chaque intervention étant fouillée par le narrateur omniscient. Chaque personnage est ainsi passé sous le microscope des sentiments afin de détecter la maladie des regrets mais aussi les espoirs qui naissent dans chaque prise de décision. Malgré la simplicité du décor et de la scène, l'ambiance est pesante, chacun rumine et sait que cette soirée aura un impact déterminant sur leurs cœurs solitaires. Ce sont la mélancolie et la nostalgie qui dominent le tableau, mais aussi la lecture. Un accord divin, délicat et sensible, entre les pensées des protagonistes, ce café ancien qui appartient à la vieille Phillies, la fin de l'été, le coup de pinceau de Hopper et la plume de Besson. Cependant un risque demeure avec ce genre de narration, celui d'ennuyer le lecteur. Pour ma part, ce ne fut pas le cas car le projet de donner vie à un monument de la peinture me séduit beaucoup. Pour autant, j'ai trouvé certains passages assez longs et je me suis parfois sentie frustrée lorsque le narrateur prend le soin de décrire chaque intervention des personnages. Cela contrariait mon envie d'en savoir plus, de rendre cette intrigue un peu plus dynamique. La longueur du livre (un peu moins de 200 pages) est adaptée. Plus de longueur aurait vraiment lassé le lecteur. 

Voilà pour la forme. Pour ce qui est du fond, le message final proposé par Philippe Besson est intéressant. Si on récapitule, Louise souhaite avec ardeur que son amant quitte enfin la femme qu'il trompe depuis des mois pour qu'ils puissent enfin avoir une vraie relation de couple, stable et légitime. Quelques années auparavant, ce fut elle la femme que Stephen quittait pour aller convoyer en justes noces avec une autre femme. Les réflexions de Louise prennent alors une autre tournure, et pourraient être celles de ce quatrième personnage qu'est la femme que l'on abandonne parce qu'elle ne fait plus l'affaire et dont on parle peu dans ces quelques pages. Et comme les choses n'arrivent jamais par hasard, ces constations interviennent ce soir-là, alors que Stephen fait sa réapparition, rappelant à Louise des souvenirs douloureux. De même, Stephen est aujourd'hui Norman, l'homme pivot qui a le pouvoir de faire le malheur de l'une et le bonheur de l'autre, bien présent dans l'esprit de Louise mais peu décrit dans le récit. Au fur et à mesure des chapitres, se met donc en place un jeu de miroir entre les quatre protagonistes, entre Louise et la femme de Norman et entre Stephen et Norman. Le récit nous invite donc à fouiller les apparences, à dresser un portrait exhaustif des personnages mais aussi à mettre en relation les divers sentiments qui les animent. C'est en cela que l'intrigue est plus complexe que l'on pourrait le croire à première vue.

En somme, un petit livre que je vous conseille pour les soirées automnales à venir. Il se lit vite, s'emporte facilement et vous promet de passer un beau moment en compagnie de ces personnages travaillés avec finesse et délicatesse.

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ Le projet de l'auteur : donner vie au tableau Nighthawks d'Edward Hopper. 
+ L'intrigue, en complète adéquation avec le ton du tableau. 
+ Des personnages travaillés, dont les ressentis sont décrits avec une précision chirurgicale.
+ La complexité des relations entre les personnages, malgré l'apparente simplicité de la scène.

- Quelques longueurs, surtout en fin de livre, quand on se lasse un peu des interruptions de dialogue pour décortiquer les pensées des protagonistes. 

Dernières infos.

L'arrière-saison a été publié en 2002 et compte 191 pages.

Ma note.