samedi 11 septembre 2021

Le gang des rêves - Luca Di Fulvio

En résumé.

Cetta Luminita, fille d'une famille pauvre de l'Italie rurale, n'a que quatorze ans et déjà un enfant à charge, fruit d'un viol aussi soudain que cruel. Maltraitée par sa mère qui l'a forcée à boiter pour paraître moins désirable aux yeux des hommes du village, Cetta rêve d'une autre vie pour son fils, une vie qui laisserait place à l'amour et la considération. C'est donc sur un coup de tête qu'elle embarque pour un voyage plein de promesses, une traversée de l'Atlantique pour rejoindre la ville de New York. En ce début des années 20, les Etats-Unis apparaissent comme le pays de tous les possibles et la preuve vivante du génie humain. L'arrivée de la jeune femme et de son enfant, rapidement baptisé Christmas par les autorités américaines, détone pourtant rapidement de l'image rêvée par Cetta. Seul moyen de subvenir à leurs besoins, la prostitution. Habiter dans une sorte de cachot sans fenêtre. Pas d'école pour Christmas, simplement l'errance dans les rues, au milieu de la poussière et de la violence. Il comprend vite que s'il veut s'en sortir, il faudra pour lui aussi faire partie d'un gang, ou encore mieux, créer le sien. Les Diamond Dogs seront donc son leitmotiv, plutôt tournés vers la protection des plus faibles. La première bonne action de ce gang nouvellement créé par Christmas sera de porter secours à Ruth Isaacson, toute jeune fille trouvée un soir, en panique après avoir été atrocement violentée. Cet événement est le point de départ d'une relation aussi passionnée qu'impossible entre Christmas, garçon des rues, fils d'une prostituée, et Ruth, petite fille d'un magnat de l'industrie textile et faisant partie des hommes les plus riches de la ville. Les deux enfants vont grandir, se tourner autour, être séparés, se retrouver, avec toujours en toile de fond un pays qui se développe à grande vitesse, emportant certains dans la prospérité mais au détriment d'autres, qui n'auront plus que leurs yeux pour pleurer et leurs poings pour se défendre.

Mon avis.

Voilà un roman que m'a prêté une amie il y a quelques années déjà, alors qu'il était en train de devenir un véritable best-seller. J'ai mis beaucoup de temps à le sortir de ma bibliothèque, un peu rebutée par le nombre de pages, je l'avoue. Pour savourer tout le talent de Luca DI FULVIO, j'attendais de pouvoir être en vacances et pleinement concentrée sur ma lecture. C'est désormais chose faite !

Une fresque comme je les aime, qui prend le temps de se déployer devant nos yeux impatients. Des petites histoires dans la grande Histoire, témoins du New York des années 20 et du fameux american dream. Je dirais que la force de ce roman tient surtout à cette exploration de la société américaine de cette époque, et plus particulière de l'organisation d'une ville qui est en train de se construire pour devenir ce qu'elle est aujourd'hui. C'est fascinant de voir comment les forces s'équilibrent entre la puissance des gangs, leur rivalité, le secret qui entoure les chefs de gang, et la police, largement corrompue. C'est fascinant de voir comment cette ville très cosmopolite parvient à composer avec des nationalités, des langues et des cultures différentes pour bâtir un équilibre commun. C'est également intéressant de voir à quel point les inégalités qui avaient cours à cette époque sont toujours d'actualité, un siècle plus tard. Cet examen sociologique est incarné par des personnages nombreux et marquants, tellement qu'il est impossible de les oublier ou de les confondre. Voilà la deuxième force de ce pavé. L'auteur prend le temps de les développer, de fouiller les racines de leur maux pour certains d'entre eux, comme c'est le cas pour Bill, personnage tellement abject qu'il est impossible de ne pas être hanté par sa personnalité si sordide. Si Cetta et Sal sont les deux personnages les plus notables de la première partie, Christmas et Ruth prennent le relais dans la seconde partie. J'ai plutôt bien adhéré à tous les personnages, sauf peut-être celui de Ruth que j'ai davantage eu de mal à cerner, en particulier dans le seconde partie où elle commence à prendre de l'ampleur.

Le point faible qui m'a empêché d'avoir un coup de cœur pour ce roman qui reste toutefois une lecture magistrale tant elle est riche est la trame narrative. Je l'ai trouvée un peu en-deçà de tout le reste, voire parfois incohérente avec l'ambiance installée par l'auteur. On est plongés dans un contexte très violent, sordide, avec des scènes qui paraissent sales et qui peuvent être dérangeantes à plusieurs égards. Des points de lumière sont apportés pour trancher avec cette obscurité qui nous occupe pendant la majorité du livre. Toutefois, je trouve qu'ils ne sont pas placés aux bons moments. Certes, l'histoire d'amour entre Ruth et Christmas fait plaisir à voir mais elle est finalement trop belle pour correspondre à toutes les horreurs qui se déploient à côté. Elle a quelque chose de cliché, le pauvre et la riche qui tombent amoureux et qui finiront par être réunis contre toutes attentes. Le parcours de Christmas est lui aussi un peu téléphoné, le gars des rues qui finit toujours par s'en sortir, juste grâce à son verbe et son charisme, alors que les gangs sont par ailleurs décrits comme incroyablement violents. Sa réussite finale contient aussi quelque chose de "trop beau pour être vrai". D'une manière générale, la première partie, bien que difficile à lire de part sa violence, m'a davantage convaincue que la seconde partie que j'ai trouvée un peu plus naïve malgré tout ce qui se passe dans l'industrie du cinéma et qui fait froid dans le dos. Je n'ai pas non plus compris pourquoi on arrêtait soudainement de s'intéresser aux personnages de Cetta et Sal qui sont quand même des personnages emblématiques du roman.

Voilà un avis qui viendra s'ajouter aux dizaines d'autres que l'on peut trouver sur la toile. Pour ma part, ce ne fut pas un coup de cœur, mais j'ai tout de même apprécié ma lecture, toujours friande de ces épopées qui s'étalent sur des pages et des pages. De fait, on ne peut être qu'immergés dans une ambiance et dans un décor. Ici, celle du New York des années 20 est tout à fait intéressante. Seul bémol pour les poncifs égrainés au fil du récit et qui cassent un peu tout le contexte réel de l'histoire de Cetta et Christmas. Sans transition, j'ai vu que Luca DI FULVIO avait publié plusieurs autres livres depuis Le gang des rêves, j'essaierai de m'y pencher dessus dès que j'aurai le temps de me plonger dans des pavés.
Dernières infos.

Le gang des rêves a été publié en 2008 pour la version originale et compte 944 pages.

Ma note.
Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 13 - Un livre se déroulant dans les années 1920 - 35/100
En 2021... Je voyage : Italie (+ 15 points)

2 commentaires:

  1. J'ai un peu le même ressenti concernant ce roman. C'est une magnifique fresque historique, formidablement bien écrite. Malheureusement, j'ai un peu trop fait confiance au phénomène littéraire (ce que je ne fais plus, maintenant...chat échaudé...) et je suis légèrement restée sur ma faim. Peut-être tout simplement que le sujet traité n'est pas celui qui me tentait le plus. :) En revanche, j'ai beaucoup aimé Le soleil des rebelles, qui m'a réconciliée avec Di Fulvio... Il faut être honnête cela dit et reconnaître que c'est un formidable conteur au style riche et à l'univers inimitable.

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    1. Le phénomène littéraire... Effectivement, c'est à double tranchant. D'un côté, cela peut permettre de découvrir de nouveaux romans qui valent la peine d'être lus, d'un autre côté cela peut entraîner de la déception. Je n'ai pas été déçue par Le gang des rêves car il est d'une incroyable richesse, c'est juste dommage que l'auteur ait choisi la facilité pour ses personnages. Mais je comprends aussi que ce sont les belles histoires d'amour et la réussite sociale qui font vendre...
      Je note Le soleil des rebelles ! Peut-être pour cet été...

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