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jeudi 1 juillet 2021

Jimfish - Christopher Hope

En résumé.
 
Par un beau jour de 1984, au large de l'Afrique du Sud, un jeune homme, complètement égaré, est repéré par un pêcheur. Ramené à port Pallid, il est présenté au chef de la police locale. A l'époque de l’apartheid, où la couleur de peau détermine la place de l'individu dans la société, le jeune homme fait figure d'exception car il n'est ni blanc ni noir. Le policier décide donc qu'il sera du côté des moins privilégiés, qu'il sera nommé Jimfish et qu'il travaillera pour lui en tant que jardinier. Jeune homme extrêmement naïf, Jimfish accepte toutes ces décisions sans broncher et se retrouve à entretenir la propriété de son "bienfaiteur", aux côtés de Malala le Soviet, un jardinier noir se revendiquant philosophe et communiste. Au fil des échanges, le maître jardinier tente de rallier son poulain apolitique à sa cause, notamment en l'amenant à ce poser cette question qui reviendra sans cesse : quel est le bon côté de l'histoire ? Loin de toutes ces préoccupations, l'ingénu Jimfish préfère plutôt tomber amoureux de la fille de son employeur. Lorsque ce dernier les surprend en train de se bécoter, Jimfish est contraint de fuir s'il veut échapper à la folie meurtrière du chef de la police. Commence alors un périple incroyable au travers de l'Europe et de l'Afrique entre 1984 et 1994, Jimsfish étant amené, toujours par le plus grand des hasards, à côtoyé les plus grands du monde d'alors avec cette interrogation qui ne le quitte pas : quelle est le bon côté de l’histoire ?

Mon avis. 

J'ai découvert ce roman à la faveur du challenge "En 2021.... Je voyage", le mois de Juin étant consacré à des lectures sud-africaines. Il m'a fallu un mois pour oser me lancer dans la rédaction de cette chronique, les impressions étant là, parfois un peu floues, mais je ne parvenais pas à les restituer à l'écrit. C'est un peu à l'image de ma lecture : des bonnes idées mais qui peinent à prendre de la consistance, une sensation de flou artistique, en partie due à la rapidité des chapitres mais aussi du fait du contenu très historique et politique, qui demande un minimum de connaissances pour saisir l'essentiel du message.

Jimfish n'est pas un roman comme les autres. En tout cas, ne comptez pas sur lui pour vous offrir une pause détente au bord de la piscine ou dans un hamac, à l'ombre des arbres. Véritable réinterprétation moderne du Candide de Voltaire, ce livre pourrait être classé au rayon des lectures donnant matière à réflexion. Christopher HOPE a choisi une période très dense du point de vue historique et politique. Les événements qui prennent place en cette fin de guerre froide nourrissent particulièrement bien les réflexions autour de cette problématique : quel est le bon côté de l'histoire ? A chaque fois qu'on découvre un nouvel événement avec les yeux de notre ingénu Jimfish, on ne cesse de le regarder avec ce nouvel éclairage : est-ce que c'est ça être du bon côté de l'histoire ? Tout y passe, Chernobyl, la chute du mur de Berlin, la fin des sociétés coloniales et l'avènement des nouveaux gouvernements africains. Jimsfish se retrouve toujours au plus près des dirigeants de l'époque ou au cœur des événements les plus tragiques, points de bascule qui ont participé à la formation de notre société contemporaine. Avec son regard naïf sur les situations, il pose les questions tabou, celles qui trahissent les véritables intentions des dirigeants de l'époque. J'ai vraiment apprécié ce fil conducteur, cette tentative de trouver le bon côté de l'histoire alors qu'en réalité il n'y en a pas. La décolonisation l'illustre à la perfection. D'un côté, les colons ne sont pas du bon côté de l'histoire pour toutes les raison qu'on connaît, mais d'un autre côté, se positionner du côté des nouveaux régimes africains mis en place n'est pas non plus le bon côté de l'histoire dans la mesure où ces régimes furent extrêmement violents et pas vraiment préoccupés par l'intérêt public.

Si j'ai donc été séduite par cette trame de fond, j'ai moins apprécié le reste de l'histoire. C'est vrai que je me suis quand même ennuyée pendant une bonne partie du livre. Je n'avais malheureusement pas toutes les connaissances historiques nécessaires à une compréhension pleine et entière de l'histoire. Je n'ai pas non plus tout compris dans le débat sur le communisme, il y a tellement de nuances à cette époque-là, car les pays et les dirigeants en adopte parfois des pistes différentes. Je ne me suis pas attachée au personnage de Jimfish, ni aux autres. Même si le procédé sert l'objectif de l'auteur de nous amener au plus près des événements pivot, j'ai été lassée par ces hasards successifs qui placent toujours Jimfish en première ligne. C'est un peu grossier au fur et à mesure qu'on avance dans le récit. Les transitions sont aussi un peu bancales, on passe très vite d'un pays à un autre sans forcément comprendre tous les tenants et aboutissants. Même si l'argumentation est intelligente et rigoureuse, j'ai quand même eu la sensation d'une lecture décousue, peut-être aussi parce que j'ai lu quelques pages par ci, quelques pages par là. Pour bien saisir tous les enjeux des aventures de Jimfish, je pense qu'il est nécessaire de vraiment se poser pour les lire et les laisser décanter.

Une déception partielle pour ce livre complexe sur le fond mais simple sur la forme. Voilà un récit intelligent, argumenté, documenté qui demande du temps pour se l'approprier et en comprendre tous les enjeux. Pas une lecture divertissante donc, plutôt une réflexion sur la façon dont s'est construit notre monde contemporain, avec ce désir sous-jacent de toujours trouver sa place et de se situer du bon côté de l'histoire. Malgré toute la frustration que je ressens, je ne suis pas sûre de si vite y revenir.

Dernières infos.

Jimfish a été publié en 2017 et compte 208 pages.

Ma note.

Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 77 - Un livre qui s'inspire d'un autre livre, réécriture, réinterprétation, remake - 24/100
En 2021... Je voyage : Afrique du Sud (+ 15 points)

dimanche 2 mai 2021

De l'eau pour les éléphants - Sara Gruen

En résumé.

Jacob Jankowski a quatre-vingt-dix ans, ou quatre-vingt-treize, ça fait longtemps qu'il a arrêté de compter. Pensionnaire dans une maison de retraite, son quotidien se trouve être chamboulé par l'arrivée d'un cirque itinérant qui s'installe juste en face du foyer. Cet événement qui apporte joie et effervescence à ses congénères plonge Jacob dans ses souvenirs, le ramenant des années en arrière, quand il a lui même intégré la troupe des frères Benzini. A l'époque, début des années 30, il terminait ses études vétérinaires. Il ne lui restait plus qu'un examen à passer pour ensuite rejoindre le cabinet de son père, lui-même vétérinaire. Seulement quelques jours avant la dernière ligne droite, ses parents sont tués dans un accident de voiture. Jacob devient sans le sou. Désemparé, paralysé par le chagrin et la peur devant sa copie à remplir, il décide de s'enfuir, montant sur un coup de tête dans le train qui passait près du campus. Un train par comme les autres puisqu'ils embarque artistes de cirque et ouvriers vers une nouvelle ville où installer le chapiteau et donner quelques représentations. Jacob se fait embaucher en tant que vétérinaire, mais déchante vite. La cruauté de la direction envers les animaux mais aussi les hommes, l'appât du gain, les conditions de vie le bouleversent. Heureusement que la jolie Marlène, la seule à pouvoir apprivoiser les chevaux sauvages, est là pour adoucir ses peines et l'aider à trouver une place.

Mon avis.

Voici un livre que j'avais repéré il y a quelques temps déjà, mais dans lequel je viens seulement de me plonger, alors que le Canada, nationalité de l'auteur, est à l'honneur ce mois-ci dans mon challenge En 2021, je voyage... Une lecture qui m'a faite voyager dans le temps et dans l'espace, à la découverte de ce qu'était le cirque aux États-Unis en pleine crise économique suite au krach de 29 et à l'époque de la prohibition.

J'ai d'abord été sensible au projet de l'auteur. Après avoir dégoté des photos de cirques itinérants datant de cette époque, Sara GRUEN s'est beaucoup documentée pour en savoir un peu plus sur les conditions de vie et de travail des hommes et des bêtes qui prenaient part à cette folle aventure. Ce n'est qu'après avoir amassé une somme conséquente d'informations qu'elle s'est lancée dans l'écriture de ce livre. Celui-ci s'est donc trouvé enrichi par cette démarche qui lui a permise d'intégrer à son récit fictionnel des anecdotes réelles, rendant l'ensemble conforme à ce qu'était la vie des cirques à cette époque. Cela se ressent clairement tout au long du récit. Aidée par les photos présentes à chaque fin de chapitre, je me suis complètement immergée dans les souvenirs de Jacob, j'ai encore les images qui apparaissent devant mes yeux, ces trains bondés, les paillettes des artistes alors que les ouvriers vivaient dans la misère, devant bien souvent renoncer à leur paie pour amortir de mauvaises tractations engagées par la direction, le sourire des spectateurs alors que ce qui se passait en coulisses était bien plus sombre, les grandes tablées, la présence de ces animaux exotiques et la prestance des chapiteaux contrastant avec la pauvreté des hommes qui les montaient à la force de leurs bras. Cette vie décousue, parfois dangereuse mais libre, s'oppose à la vie de Jacob désormais enfermé dans cette maison de retraite aux règles liberticides. Les chapitres alternent, opposant passé et présent, on se demande même si un même homme a pu vivre de tels extrêmes au cours d'une seule vie. La nostalgie de Jacob nous émeut, son envie d'être autonome face aux recommandations des médecins qui l'infantilisent nous révoltent, lui qui a tant fait, et qui a été témoin de tellement de choses. Être confiné dans un lieu si protecteur, après avoir été exposé pendant des années à la dureté de la vie dans un cirque.

Si j'ai apprécié ma lecture, c'est davantage pour son aspect documentaire que pour la relation Jacob/Marlène qui occupe également beaucoup de place dans le récit. J'ai trouvé que cette relation n'était pas assez développée et approfondie. C'est une évidence dès les premiers chapitres que ces deux-là finiront ensemble. L'auteur devait tellement en être convaincue qu'elle n'a pas pris le temps de laisser progresser cette relation, on passe presque d'un rapide coup d’œil à l'amour fou. Le mari de Marlène et accessoirement le patron de Jacob, a un côté assez caricatural, le méchant face auquel il est facile de paraître plus humain, plus doux, plus sensible. Il ne s'agissait pas de le dépasser, il s'agissait juste de se débarrasser de lui. Ainsi il n'a pas été compliqué pour Jacob de passer pour l'amant idéal aux yeux de Marlène face à son rival antipathique. Je suis également restée un peu sur ma faim sur la place des éléphants dans l'intrigue. Ils sont annoncés dans le titre et dans la quatrième de couverture présentant Rosie, l'éléphante, comme le troisième personnage clé, aux côtés de Marlène et Jacob. Finalement, Rosie n'est pas du tout omniprésente dans le récit, elle a juste un rôle clé dans le dénouement. D'autres personnages secondaires sont bien plus développés comme le nain Walter ou encore le vieux Camel, à juste titre car ils apportent vraiment un truc en plus à l'histoire.

En somme, une lecture agréable, que j'ai dévorée, les pages se tournent très vite tant le style d'écriture est simple et fluide. Je retiendrais principalement la découverte de l'univers du cirque aux États-Unis dans les années 30 ainsi que ces personnages qui ont fait le bonheur de milliers de spectateurs, plus que l'histoire d'amour entre Marlène et Jacob. Vraiment je vous le conseille !
 
Dernières infos.

De l'eau pour les éléphants a été publié en 2007 pour la version française et compte 402 pages. Le roman a été adapté à l'écran en 2011 par Francis LAWRENCE. Il met en scène Reese WHITHERSPOON et Robert PATTINSON.

Ma note.
Challenges.
 
* Défi lecture 2021 : Consigne 36 - Un livre contenant un nombre de chapitres inférieur à votre âge - 16/100
En 2021... Je voyage : Canada (+ 25 points)

samedi 30 janvier 2021

Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire - Jonas Jonasson

En résumé.

Allan Karlsson s'apprête à fêter ses 100 ans auprès de Sœur Alice et de ses congénères de la maison de retraite de Malmköping, petite ville de Suède. Seulement, quand on connaît le passé du centenaire, artificier de métier, et qui a côtoyé les plus grands du siècle dernier, on ne peut pas imaginer que ce dernier se laisse juste offrir quelques bougies, une orange et un baiser sur la joue. Pour rester fidèle à sa trajectoire de vie qui ne fut qu'aventures rocambolesques, le plus vieux des pensionnaires de la ville décide de s'enfuir par la fenêtre. Chaussé de ses charentaises, il traverse les petites ruelles, se dirigeant tout droit vers la gare, finit par voler la valise d'un brigand puis prend le bus vers une destination inconnue. Sur sa route, il croisera un autre malfrat, une rouquine qui jure et qui a volé un éléphant, le vendeur de hot-dogs le plus savant au monde et aura à ses trousses une bande de gangsters ainsi que la police. Qui a dit que les aventures étaient terminées passés 100 ans ?

Mon avis.

J'avais lu ce livre pour la première fois peu après sa sortie, au début des années 2010. Si mes souvenirs sont bons, il avait eu beaucoup de succès à l'époque et j'ai l'impression, peut-être erronée, qu'il a lancé cette mode des livres aux titres à rallonge. Je me souviens d'une lecture agréable mais pas très marquante, si bien que 10 ans après, j'ai eu l'impression de découvrir complètement cette histoire dont j'avais tout oublié.

Pour ma relecture, je reste sur cette impression d'une lecture agréable, mais sans plus. Il faut savoir que c'est une histoire surréaliste, autant pour les faits présents que pour les faits passés. Le récit oscille entre ces deux périodes, le passé d'Allan Karlsson et son présent, sa fuite vers une destination inconnue. Il y a tout de même un déséquilibre dans ce partage des époques, j'ai trouvé que le récit de sa vie passée était trop imposant, ou alors c'est parce que je me suis ennuyée durant ces chapitres. Je n'ai vraiment pas adhéré à ces coups du destin qui l'ont propulsé à la table des plus grands dirigeants politiques, Staline, Churchill, Mao, et qui ont fait de lui un acteur majeur bien qu'anonyme de l'arrivée de la bombe nucléaire, le rendant responsable des rebondissements qui ont jalonné la guerre froide. Même si cela reste cohérent avec la volonté de l'auteur de mettre en avant ces "effets papillons", ces petits rien qui déclenchent finalement des tempêtes, je trouve que ces parties assez historiques quand même sont en décalage avec ce qui est attendu lorsqu'on lit le titre et la quatrième de couverture. J'ai donc eu le sentiment de passages très longs à passer et assez rébarbatifs.

J'ai davantage été séduite par la narration des dernières aventures du papy. On reste sur la même idée, à savoir qu'un petit acte peut déclencher une série d'événements tous plus absurdes les uns que les autres. Allan Karlsson est présenté comme un personnage plein de candeur et de joie de vivre, un peu benêt parfois, qui ne voit le mal nulle part, qui ne s'alarme jamais et pour qui il y a toujours une solution à tout. Malgré tout ce qu'il peut provoquer sur son passage, je trouve que c'est quand même un personnage un peu plat, on est finalement plus amené à s'intéresser aux conséquences de ses actes qu'au bonhomme qui en est à l'origine. Sa fuite reste complètement loufoque, et nous fait découvrir toute une galerie de personnages tout aussi surréalistes. J'ai bien aimé l'histoire de Benny, ce vendeur de hot-dogs qui a suivi plein de cursus d'études sans acquérir un seul diplôme, pour conserver un héritage justement conditionné par l'obtention d'un diplôme. La conclusion de toutes ces histoires est à l'image de tout ce qui précède, un peu barrée, mais pourquoi pas après tout...

Une lecture qu'il faut prendre au troisième degré, un petit moment de pause dans des lectures plus sérieuses. J'en ressors avec un avis assez mitigé, vraiment ennuyée par les passages sur la vie passée d'Allan Karlsson, mais amusée par sa fuite de la maison de retraite et par les événements qui en découlent. En tout cas, c'est certain que je ne le relierai pas une troisième fois !
Dernières infos.

Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire a été publié en 2011 pour la version française et compte 453 pages. Il a été porté à l'écran en 2014 par Felix Herngren (Suède).

Ma note.
Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 90 - Un livre qui mentionne un personnage politique - 2/100
En 2021... Je voyage : Suède (+ 25 points)

samedi 23 janvier 2021

Americanah - Chimamanda Ngozie Adichie

En résumé.

Ça y est, après des années passées sur le sol américain, Ifemelu décide de rentrer au pays, à Lagos, cette ville du Nigéria qui l'a vue grandir. Alors qu'elle rentre dans un salon de coiffure africain pour se faire faire des tresses, les souvenirs la submergent, à quelques heures du départ. D'abord, son enfance, toujours tournée vers le futur et le projet de partir un jour, immigrer dans le monde anglo-saxon pour ses études. L'adolescence, la vie étudiante au Nigéria et la rencontre avec Obinze, l'amour de sa vie. Puis la cassure, le départ pour rejoindre les Etats-Unis. La pauvreté, le système D, la dépression et les jours meilleurs, les études à Philadelphie, les amours qui se succèdent, loin du cœur d'Obinze resté au pays. Ifemelu, bien que femme accomplie et engagée avec la tenue de son blog sur les Africains immigrés aux Etats-Unis, décide de tout quitter, peut-être qu'une nouvelle vie l'attend à Lagos, peut-être auprès d'Obinze bien que le jeune homme soit devenue époux et père.

Mon avis.

Americanah aura été mon premier roman de l'année 2021. Un livre que j'ai longtemps croisé un peu partout, sur les étals des librairies, dans les mains de voyageurs dans le train pour finalement l'emprunter dans ma médiathèque. Un roman que j'étais pressée de découvrir, d'une part parce que son auteur est nigériane, ce qui me change de mes habitudes, d'autre part parce que j'étais curieuse de me faire mon propre avis, suite à son succès. Finalement, un bilan en demi-teinte.

Je vais commencer par le négatif, pour finir par le positif. Americanah est un pavé, un gros pavé. Plus de 500 pages pour la version grand format, écrites en tout petit. Et ce qui sûr, c'est qu'on les sent bien passer ces 500 pages. J'ai vraiment été freinée dans ma lecture par la longueur de certains passages. L'auteur ne laisse rien au hasard, elle détaille tout, et s'étend sur la vie de chaque personnage qu'a croisé Ifemelu dans sa vie. C'est à double tranchant. D'un côté, c'est très riche, d'au autre côté, certaines anecdotes ou personnages n'apportent pas grand chose au récit et finissent par l'alourdir. J'aurais aimé que l'ensemble soit un peu plus concis. Bien des fois, j'ai eu cette impression désagréable de ne pas avancer dans ma lecture et de n'en voir jamais la fin.

Du côté du positif, je dirais que malgré ces longueurs, l'ensemble reste tout de même dynamique. Chimamanda Ngozie ADICHIE a incontestablement des choses à dire, sur ses personnages, sur la vie au Nigéria, sur la vie aux Etats-Unis vue par une Nigériane, sur le racisme, sur l'immigration. Ce roman n'est pas juste un roman, il a aussi un côté essai sociologique. La galerie de personnages est assez impressionnante, d'Ifemelu à ses parents, de ses petits-amis américains à Obinze, de Tante Uju à Dike, son cousin. Chaque personnage amène une dimension supplémentaire à la vaste fresque dressée par l'auteur, que ce soit du côté nigérian ou du côté américain. Ainsi, les chapitres ne sont jamais vides, ils dépeignent toujours à la fois le caractère d'un personnage mais ont aussi l'objectif de présenter une analyse de la société nigériane ou américaine. Il y a aussi la question de l'identité et de comment elle peut se transformer en fonction de notre environnement. On voit tous les personnages évoluer, en particulier Obinze et Ifemelu, avec cette peur qui ne les quitte pas, celle d'avoir changé justement et de s'être tellement adapté à un milieu qu'il ne pourront plus s'adapter à l'autre milieu, celui qui les a pourtant façonnés. Enfin, nous suivons l'histoire d'amour d'Ifemelu et d'Obinze. C'est très certainement ce que j'ai le plus apprécié dans ce roman. J'ai particulièrement aimé le personnage d'Obinze, bien plus qu'Ifemelu d'ailleurs. Et je dois dire que je n'ai pas pu me déscotcher de la fin du livre, tournant les pages avec avidité, pour connaître l'issue finale de leur relation. Je qualifierais celle-ci de très sensible, avec un petit côté magique, deux âmes qui se sont trouvées et c'est beau à lire.

En somme, bien que déçue par des passages trop longs et des anecdotes trop ennuyantes, j'ai été séduite par certains personnages, en particulier Obinze, et par la relation qui le lie à Ifemelu. J'ai d'ailleurs été plus conquise par le côté humain et le développement des personnages que par le côté analyse sociologique. C'est un récit sérieux et ambitieux. A vous de voir si vous êtes prêts à passer du temps sur cette lecture, à son image, il demande temps et concentration.
Dernières infos.

Americanah a été publié en 2015 pour la version française et compte 528 pages.

Ma note.
Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 74 - Un livre d'un auteur du Commonwealth - 1/100
* En 2021... Je voyage : Nigéria (+ 20 points)

samedi 19 décembre 2020

De pierre et d'os - Bérengère Cournut

En résumé.

Plongée dans le froid glacial et la nuit polaire des contrées arctiques, Uqsuralik est brusquement séparée de sa famille lorsque la banquise se fracture. De son ancien foyer, elle ne gardera qu'une amulette, une couverture en peau d'ours et un harpon brisé lancé par son père dans l'urgence. La jeune femme est désormais face à elle-même, elle doit aller à la rencontre d'autres hommes pour survivre. Heureusement, elle est douée pour la chasse, un atout de taille pour qui veut se faire intégrer à une nouvelle tribu mais cela peut aussi attirer la jalousie des hommes. Uqsuralik devra donc se frayer un chemin au milieu de ces paysages aussi splendides qu'hostiles, se faire une place auprès de ses congénères, repousser le froid et la faim pour élever correctement ses enfants et se faire bien voir des esprits pour qu'ils restent toujours de son côté, malgré les épreuves imposées par un tel environnement.

Mon avis. 

De pierre et d'os me faisait de l’œil depuis un an déjà, lors de sa sortie à l'occasion de la rentrée littéraire 2019. En lisse pour de nombreux prix, finalement lauréat du Prix roman Fnac 2019, j'avais été séduite par son sujet pour le moins original, la vie d'une jeune femme Inuit dans ces contrées polaires aussi fascinantes que redoutables. Je me suis finalement décidée à le lire, en ce début Décembre frileux, un livre idéal pour les mois d'hiver qui s'annoncent, bien au chaud sous un plaid.

Malgré l'originalité du thème, j'avais peur de m'ennuyer, peur de passages purement contemplatifs, peur que le moindre flocon soit détaillé en long, en large et en travers. Pourtant, s'il est vrai que le rythme est assez lent, s'adaptant forcément au rythme de vie des Inuits et au calme qui règne dans ces paysages immaculés, Bérengère COURNUT a réussi à me tenir éveillée, voire même à me tenir en haleine. Le découpage en chapitres assez courts et qui alternent avec des chants aux allures de poèmes donnent du rythme et du caractère à l'ensemble. Ce fut une lecture idéale pour mes voyages en transports en commun, reposante et me permettant d'arrêter ma lecture à la fin d'un chapitre, sans perdre le fil de l'histoire. La présence d'ellipses narratives participe aussi au dynamisme de l'ensemble. C'est un livre à la longueur idéale, suffisamment long pour avoir le temps de pénétrer dans cet univers hors du monde, et suffisamment court pour ne pas s'ennuyer, avoir le temps d'explorer la vie de cette jeune femme sans s’appesantir sur ses moindres faits et gestes. Le fait que le récit soit raconté à la première personne nous aide aussi à entrer dans le personnage d'Uqsuralik. Même si nos vies n'ont absolument rien de commun, je me suis attachée à elle et j'ai pris plaisir à ressentir les émotions qu'elle aurait pu ressentir face aux aléas d'une vie passée dans un environnement aussi dur.

Lorsqu'on commence la lecture de ce livre, il me semble important de savoir (du moins, ce fut une de mes interrogations) que l'auteur n'a jamais exploré ces contrées arctiques. L'écriture de ce livre s'est faite lors d'une résidence de dix mois à la Bibliothèque centrale du Muséum national d'histoire naturelle (à Paris) pendant laquelle Bérengère COURNUT a pu fouiller dans le fonds documentaire et dans les archives à la recherche d'écrits et de photographies laissés par des explorateurs qui sont eux-mêmes allés sur le terrain à la rencontre de ces peuples. D'ailleurs, certaines photos sont présentes en fin de livre. Ces recherches ont été fructueuses puisqu'elle laisse derrière elle un roman très réaliste. Pour moi qui ai toujours été attirée par l'ethnologie et la découverte de peuples traditionnels, je peux vous dire que j'ai été gâtée durant ces quelques pages. L'impression de faire un bond dans le temps, de revenir à une ère préhistorique, avec ces hommes qui chassent avec des moyens rudimentaires, qui exploitent tout de l'animal chassé, de sa viande à sa peau en passant par sa graisse pour se chauffer, qui invoquent l'esprit de l'animal mort pour le remercier, qui sont en symbiose avec leur environnement alors qu'il peut être très dangereux voire fatal. L'envie d'imaginer par la lecture ce mode de vie si éloigné du nôtre, désencombré d'artifices, de consommation à outrance, dénué de stress (mais pas d'angoisse), le retour à l'essentiel même s'il peut être cruel, une communion avec la nature et les esprits, une exploration mystique, comme si l'ensemble des petits et grands problèmes pouvaient trouver leurs causes et leurs solutions dans les secrets de l'univers. Peut-être.

Alors que l'hiver se profile, je ne peux que vous conseiller cette lecture, véritable pause dans une période anxiogène, qui recentre le lecteur sur l'essentiel et qui nous permet de découvrir le peuple Inuit, son mode de vie ainsi que ses mythes et ses croyances. 
Dernières infos.

De pierre et d'os a été publié en 2019 et compte 220 pages. Il a obtenu le Prix du roman Fnac la même année.

Ma note.

Challenges.

Défi lecture 2020 : Consigne 95 - Lire un nature-writing - 47/100

samedi 21 novembre 2020

Kinshasa jusqu'au cou - Anjan Sundaram

En résumé.

L'auteur, Anjan SUNDARAM, est promis à un bel avenir, du moins ce que notre société occidentale considère comme un bel avenir, des études de mathématiques réussies qui lui ouvrent les portes de Goldman Sachs. Pourtant, ce n'est pas la trajectoire qu'il choisit. Sur un coup de tête, grâce à une rencontre, ou encore par envie d'authenticité, notre homme prend un aller simple pour Kinshasa, la capitale de la République Démocratique du Congo. Accueilli chez l'habitant, des gens très modestes résidant dans un des quartiers sensibles de la métropole qui ne cesse de s'étendre, il décide de troquer ses livres d'algèbre contre du papier et un stylo puisqu'il sera désormais reporter. Les sujets ne manquent pas, la pauvreté, le délabrement général d'une ville empreinte de son passé colonial, le système D, le pillage des ressources, la dictature, l'insécurité quotidienne, la corruption, et pourtant rien de tout ça n'intéresse les journaux occidentaux. Anjan SUNDARAM, sidéré par ce qu'il voit du Congo, souvent étouffé par le mode de vie, va lutter pour faire entendre sa voix et faire reconnaître ses talents de journaliste, jusqu'à écrire aujourd'hui pour des journaux renommés tels que The Guardian, The New York Times ou encore The Washington Post.

Mon avis.

Après Tokyo Vice, Kinshasa jusqu'au cou est le deuxième bouquin des éditions Marchialy dans lequel je me plonge. Cette jeune maison d'éditions réunit tout ce que j'aime en littérature, des histoires vraies tellement originales de part leurs thèmes qu'elles nous amènent fréquemment sur le terrain de la fiction. Pourtant, si sur le papier le projet a tout pour me plaire, c'est une seconde déception que je viens de vivre avec ce livre qui nous emporte jusqu'au cœur de l'Afrique.

Je dois bien le dire, les premières pages m'ont carrément séduites, à tel point que je pensais que ce serait un coup de cœur. Chouette, un livre qui change de l'ordinaire, une parole rapportée d'un pays dont on parle peu, pourtant porteur d'enjeux avec ses ressources naturelles incroyables. Enfin une parole pour raconter les ravages de la colonisation, puis de la décolonisation. Enfin quelqu'un pour me faire voyager à l'autre bout du monde, me faire vivre un quotidien si différent du mien, me rapporter des paysages que je n'aurai très certainement jamais l'occasion de voir de mes propres yeux. Que d'espoir placé dans ces quelques pages ! Et puis la douche froide, la lente descente aux enfers, ce moment où on compte les pages tellement on a hâte d'en voir le bout. Je ne pourrais pas vraiment situer le point de bascule. Je ne sais d'ailleurs pas si la faute est du côté de l'auteur, ou du mien, avec mes lectures fractionnées dans les transports en commun, qui m'empêchent de vivre l'histoire dans sa totalité. En tout cas, j'étais été gênée par une chronologie quasiment absente. On comprend que l'auteur nous livre une partie de sa nouvelle vie de journaliste, qui culmine avec les premières élections démocratiques du pays qui portent au pouvoir Joseph KABILA. Mais je n'ai pas bien compris quel est le point de départ de ce récit, s'il intervient après des années déjà passées au Congo ou si nous n'en sommes encore qu'au début. Qui plus est, très vite, Anjan SUNDARAM oriente son récit vers une suite de détails sur sa nouvelle vie, perdant de ce fait de la consistance. Je crois que ma déception principale vient de là, j'aurais aimé en connaître davantage sur le Congo, plutôt que d'avoir affaire à des détails sordides. Je me suis tellement détachée du personnage principal que j'ai fini par m'ennuyer, attendant inexorablement quelque chose qui ne venait pas, quelque chose de plus consistant, qui nous amène véritablement à la rencontre d'un pays et de sa population. D'ailleurs, ma déception est du même ordre que celle que j'ai connue après la lecture de Tokyo Vice. Les auteurs se perdent tellement en détails qui sont pour moi inutiles, que l'on perd tout ce qu'il y a d'extraordinaire dans leurs parcours et dans ce qu'ils ont pu voir des ces pays.

Néanmoins, le tableau n'est pas complètement noir, quelques touches de lumières nous redonnent de l'espoir. Cela ne va pas vous surprendre, j'ai principalement aimé les passages où l'auteur s'attarde à décrire la société congolaise, ainsi que le présent politique du pays. Quelques morceaux de chapitres sont consacrés aux ravages causés par la colonisation, ainsi qu'à la lente et difficile reconstruction de ce pays gangrené par la corruption, et la violence imposée par les différentes milices. La richesse des sols congolais attire la convoitise des pays occidentaux mais aussi de plus en plus de la Chine, mais par un jeu de passe-passe, aucun bénéfice ne revient dans les mains de la population qui vit dans l'insalubrité la plus totale. L'auteur nous fait ressentir un environnement fait de débrouille, étouffant de chaleur, encore très guidé par le chamanisme, où l'insécurité domine et où le danger peut être partout, sous des formes diverses dont le vol est une des menaces les plus courantes semble t-il puisque c'est même devenu un mode de vie. En milieu de livre, l'auteur s'éloigne de Kinshasa, pour aider un ami mais aussi pour s'extraire de l'ambiance pesante de la capitale, et part à la découverte des contrées reculées de ce vaste pays. Les peuples autochtones, bien que très en marge de la mondialisation ont tout de même été infiltrés par le mode de vie à l'occidentale. C'est d'ailleurs l'étude de ces populations qui lui vaudra son premier succès journalistique.

Bien que ces sujets soient très intéressants, ils n'ont pas suffisamment été développés à mon goût. Je reste sur une déception face à ce récit qui était pourtant plein de promesses. L'impression d'être passée à côté de quelque chose, peut-être l'aurais-je mieux apprécié si je l'avais lu d'une traite... Si vous êtes un passionné de l'histoire africaine ou simplement curieux de modes de vie bien éloignés des nôtres, je vous conseille ce livre, sinon passez votre tour !
Dernières infos.

Kinshasa jusqu'au cou à été publié en 2017 et compte 344 pages.

Ma note.
Challenges.

100 livres à lire en 2020 : 44/100
Défi lecture 2020 : Consigne 29 - Livre dont la couverture représente un paysage urbain - 44/100

dimanche 1 novembre 2020

Les impatientes - Djaïli Amadou Amal

En résumé.

Ramla, Hindou et Safira sont trois jeunes femmes peules - ethnie que l'on retrouve dans la zone du Sahel et qui court sur plusieurs pays. Nous sommes ici dans le Nord du Cameroun. Ces trois femmes sont réunies par un événement commun, l'événement le plus important d'une vie dans la tradition peul et musulmane, le mariage. Ramla et Hindou s'apprêtent à être unies à deux hommes qu'elles n'ont pas choisis, deux hommes violents et uniquement préoccupés par leur prospérité, autant filiale que financière. Safira, quant à elle, est déjà mariée au mari de Ramla et s'apprête à accueillir sa co-épouse au sein de la concession, ensemble de bâtiments qui accueillent les différentes femmes de l'homme et sa progéniture. Safira non plus n'a pas choisi de partager son mari, la polygamie est un fait courant chez les peul. Ramla, en plus de dire adieu à ses rêves d'émancipation et de subir les assauts d'un mari violent, devra également faire face à l'hostilité de Safira, bien décidée à défendre son territoire. Trois femmes qui devront apprendre la patience, le munyal, principe cher des peul, afin d'accepter l'inacceptable.

Mon avis.

La médiathèque dans laquelle travaille mon choupi a la chance d'être bien fournie en romans de la rentrée littéraire. Après avoir parcourue l'étagère qui les accueille, mon choix s'est arrêté sur ce livre écrit par une auteur camerounaise, peule, musulmane et acquise à la cause des femmes. J'avais envie d'une lecture provenant d'autres horizons, et le côté témoignage (puisque l'auteur a elle-même été mariée à 17 ans) m'a attirée.

Je ne vous cache pas que ce livre fut un quasi-coup de cœur. Sur le plan de la forme déjà, trois voix se succèdent, racontant à la première personne cet événement si particulier qu'est le mariage. Peut-être parce que j'ai eu directement accès aux pensées et aux émotions de ces jeunes femmes, je me suis sentie complètement happée par ces vies douloureuses. Les chapitres sont brefs et le style d'écriture est limpide, allant droit à l'essentiel. Dès les premières lignes, on est projeté aux côtés de ces femmes qui ne sont encore que des filles, on les voit toutes chétives et toutes tremblantes, on les sent complètement angoissées et désorientées face à leur père et au restant de leur famille, on entend les prières, les chants qui les exhortent à faire preuve de munyal, de patience, d'abnégation en fait, sans nommer explicitement ce devant quoi elles devront faire preuve de patience, la volonté inébranlable de leurs hommes. Si ce livre ne fait qu'à peine 240 pages, il aura su m'emporter et je suis certaine que je m'en souviendrai encore dans quelques mois tellement je l'ai lu avec indignation, tournant les pages sans m'arrêter, chaque fois un peu plus atterrée par la barbarie.

Je n'avais encore jamais eu l'occasion de lire sur les peuls, encore moins sur la condition des femmes dans cette ethnie. L'originalité du thème m'a donc séduite, j'apprécie toujours d'être immergée dans un univers complètement différent du mien, qui plus est lorsque le récit s'inspire de faits réels, comme c'est le cas ici. Si le thème principal est la condition féminine, plusieurs sous-thèmes sont abordés : la polygamie, le poids de la religion, la place de l'homme dans la société, tout puissant, la répression des émotions des femmes qui sont uniquement reléguées aux tâches du quotidien et à l'éducation des enfants, l'absence d'école pour les jeunes filles qui peuvent se marier dès l'âge de 11 ans, la question de l'argent et de la richesse en toile de fond, l’apparat, l'absence de révolte, l'acceptation tacite de ce système alors même que beaucoup de femmes semblent en souffrir. Ces femmes sont réduites au silence, traitées en objet, violées, battues, rabaissées et dénigrées. Le pire est qu'elles ne peuvent trouver de réconfort auprès de personne puisque même leurs mères, leurs tantes entretiennent ce système, elles-mêmes terrorisées par leurs propres époux et bien trop occupées à survire au sein de la concession, à faire leur place face à des co-épouses enragées. Le personnage de Hindou va même jusqu'à devenir folle, tellement affaiblie par les coups de son mari et désemparée devant son entourage qui l'exhorte à faire preuve de munyal. Un roman qui présente des faits atroces, mais bien réels malheureusement.

Je pense que ce livre passera inaperçu, face aux best-seller livresques. Pour autant, je vous encourage à ne pas passer à côté. Il se lit vite, il est percutant, il permet aussi de se documenter sur d'autres injustices dont on parle peu, mais qui sont malheureusement toujours d'actualité. A mettre décidément sous le pied du sapin dans quelques mois !
Dernières infos.

Les impatientes a été publié en 2020 et compte 240 pages.

Ma note.

Challenges.

100 livres à lire en 2020 : 41/100
Défi lecture 2020 : Consigne 62 - Lire le dernier livre d'un auteur - 41/100

dimanche 6 septembre 2020

J'ai dû rêver trop fort - Michel Bussi

En résumé.

Nathalie, Nathy pour les intimes, 53 ans, hôtesse de l'air, mère de deux grandes filles et grand-mère de deux jumeaux intrépides, mariée à Olivier, son homme de bois et vivant dans une charmante maison-cabane en banlieue parisienne. A priori, une existence banale et joyeuse, faite de grandes réussites et petits chagrins. C'était sans compter le passé, le passé qui fait son grand retour et la tourmente, celui dont on cherche à se débarasser, que l'on enfouit sous des tonnes d'artifices, celui qui fait mal et qui fait voler en éclats une vie bien rodée. Il aura suffit d'une succession de coïncidences troublantes, des destinations qui s'enchaînent dans un ordre déjà vu, des bribes de chanson fredonnées par des inconnus, une pierre de temps qui apparaît et disparaît, pour plonger Nathalie 20 ans plus tôt, en 1999, date à laquelle elle a rencontré cet amour fusionnel mais dont elle a perdu la trace, pour ne faire souffrir personne. Pendant vingt ans, elle a fermé les yeux, s'est accrochée à l'amour qu'elle porte à ses filles et son mari, un amour sage et prévenant, celui d'une mère prête à tout pour rendre heureux ses proches. Pourtant, elle n'a jamais cessé de penser à son amant, rencontré à la fois trop tôt et trop tard, aimé d'un amour de femme, puissant et dévastateur. L'heure du bilan est arrivé, imposé par un autre qu'elle, un inconnu qui s'amuse à tirer les ficelles, en coulisses, de cette machinerie infernale.

Mon avis.

Tout comme la lecture d'un Victoria HISLOP, la lecture d'un Michel BUSSI est désormais un incontournable de l'été. Après Un avion sans elle, Le temps est assassin et On la trouvait plutôt jolie, j'ai choisi pour cet été l'une de ses dernières parutions, J'ai dû rêver trop fort, un livre parfait pour l'été, qui nous fait voyager aux quatre coins de la planète sans perdre le moindre centime ni prendre le moindre risque, du suspense, de l'amour, un moment de lecture agréable, sans toutefois casser des briques. Je vous explique.

Je ne peux pas dire que ce livre n'a pas rempli sa mission : je voulais être dépaysée, je voulais du suspense sans pour autant me prendre la tête, et surtout je voulais que les pages s'enchaînent sans faire le moindre effort, sans me dire "Mon dieu que c'est long !" Tout ça, Michel BUSSI me l'a apporté sur un plateau ! Le cadre de l'intrigue est plutôt plaisant puisqu'on voyage au frais de la princesse, passant de Montréal à San Diego puis de Barcelone à Jakarta. Grâce aux descriptions des lieux par Nathalie, on n'a pas de mal à s'y croire, à se figurer une ambiance et cela nous projette dans cette course effrénée, à ses côtés. Quant à son histoire, elle est plutôt bien construite et rythmée entre les alternances passé/présent qui contribuent au fil du récit à casser le suspense de certaines scènes pour mieux y revenir par la suite et donc à maintenir le lecteur en haleine. Dès les premières pages, on ne peut s'empêcher de nous demander ce que signifient toutes ces coïncidences et surtout d'où elles viennent, quelle est la personne derrière tout ça et pourquoi. Ces questions nous amènent à tirer des conclusions hâtives, à partir sur de multiples pistes, à découvrir petit à petit de nouveaux indices qui finissent toujours par nous induire en erreur. J'ai trouvé que le dénouement était plutôt réussi dans le sens où je ne m'y attendais pas, mais tout comme l'ensemble du livre, il aurait mérité d'être un peu plus travaillé pour ne pas paraître aussi grossier.

Durant toute ma lecture, je n'ai pas pu me départir de cette impression que Michel BUSSI a écrit cette histoire à la hâte, alignant tous les ingrédients pour une recette à succès : de l'amour, quelques scènes osées, des personnages assez banals mais qui ont ce petit truc en plus et du suspense pour maintenir le lecteur éveillé. Cette histoire fabriquée de bric et de broc, cochant les cases d'un formulaire pré-établi manque, pour moi, de profondeur. J'ai le sentiment d'avoir effleuré plein de choses, me balladant de personnage en personnage, de rebondissement en rebondissement, sans pour autant trouver de point d'ancrage. Je ne me suis malheureusement attachée à aucun des personnages, que j'ai trouvés surfaits, les ayant déjà croisés dans d'autres romans du même type, certains de leurs agissements étant même un peu niais et grotesques. Quelques passages tirent un peu en longueur, avec une tendance de Nathalie à radoter sur ses regrets, ses doutes et ses craintes, sans que cela n'apporte pas grand chose à l'ensemble. L'impression là encore qu'il fallait noircir les pages... Ainsi, une impression générale de superficiel, avec même l'idée au tiers du livre que je ne pourrais pas le terminer. Heureusement, j'étais au creux de la vague, les rebondissement ultérieurs m'ont encouragée à poursuivre ma lecture.

Une lecture mitigée en somme, parfaite si l'on souhaite se plonger dans une histoire à suspense sans toutefois se prendre la tête pour retenir mille et un personnages, mais le genre d'histoire qui va, s'imprègne le temps de la lecture, puis s'en va une fois le livre refermé.
Dernières infos.

J'ai dû rêver trop fort a été publié en 2019 et compte 541 pages.

Ma note.
Challenges.

100 livres à lire en 2020 : 33/100
Défi lecture 2020 : Consigne 47 - Livre dont le titre comporte un verbe à l'infinitif - 33/100

samedi 22 août 2020

Une dernière danse - Victoria Hislop

En résumé.

Jeune londonienne passionnée par la danse, Sonia se rend avec son amie à Grenade afin de perfectionner leurs techniques de salsa, mais aussi de se familiariser avec l'un des emblèmes de l'Espagne, le flamenco. La jeune femme prend rapidement ses aises dans cette ville chaleureuse et énigmatique. Lors d'une promenade dans les ruelles de Grenade, elle s'arrête dans un café, El Barril et fait connaissance avec le patron, Miguel, qui lui laisse entrevoir le passé trouble de la ville, ravagée quelques années plus tôt par l'armée de Franco. Si Sonia souhaite en savoir davantage, elle est contrainte de rentrer chez elle. Là, elle retrouve un mari froid et distant, ayant progressivement plongé dans l'alcool alors que son cœur ne pense plus qu'à Grenade. Une visite chez son père est déterminante puisqu'elle retrouve des photos de sa mère en danseuse et apprend que cette dernière, aujourd'hui décédée, avait des liens avec Grenade. Cet ensemble de coïncidences conduisent la jeune femme à effectuer un second séjour là-bas, bien décidée à écouter le vieux Miguel lui narrer l'histoire de la famille qui a tenu ce café pendant de longues années, la famille Ramiréz. Cette plongée dans le passé, assombri par les années de guerre civile sera un choc pour Sonia et marquera un tournant décisif dans sa vie.

Mon avis.

C'est désormais un incontournable de l'été, la lecture d'un Victoria HISLOP. Après L'île des oubliés qui nous amène sur l'île de Spinalonga au large de la Crète, puis Le fil des souvenirs qui nous plonge dans le passé de Thessalonique, Une dernière danse change de destination et nous fait voyager jusqu'en Espagne, à Grenade plus précisément mais d'autres villes sont également évoquées au fil du récit. En ces temps où les voyages sont peu recommandés, ce livre offre au lecteur un dépaysement bienvenu, tant dans l'espace que dans le temps.

Au niveau de la forme, ce livre n'est pas bien différent des autres. C'est une spécialité de l'auteur, débuter le récit par la présentation de personnages actuels, qui en sont souvent à un tournant de leur vie (un mariage, un divorce, une naissance) et qui ont besoin de se référer aux origines pour pouvoir à leur tour tracer leur voie. Cette quête des origines est ensuite l'occasion d'évoquer le passé d'une ville, d'une île la plupart du temps situés sur le pourtour méditerranéen. Ici, j'ai trouvé cet aller-retour entre présent et passé un peu maladroit, voire caricatural. Si le personnage de Sonia est vraiment développé pendant les cent premières pages, on finit par ne plus la côtoyer et ce n'est que dans les toutes dernières pages qu'on la retrouve pour d'ultimes révélations. C'est un personnage qui n'apporte finalement pas grand chose à l'ensemble et qui plombe même l'histoire puisqu'il paraît artificiel et caricatural, en décalage avec l'authenticité de la famille Ramiréz. Le dénouement paraît aussi un peu tiré par les cheveux et vient gâcher les trois quarts du livre qui sont pour leur part émouvants et qui auraient été suffisants pour satisfaire le lecteur. C'est un livre dense, qui traîne en longueur, ce qui n'est pas forcément négatif dans la mesure où on prend le temps de découvrir les personnages et de s'imprégner de leurs âmes et de leurs vécus.

Si la présence de Sonia m'est apparue un peu bancale, j'ai été complètement séduite par la partie plus historique de l'intrigue, qui occupe une large part du récit. Le style d'écriture de Victoria HISLOP est tout en simplicité et permet d'aborder des faits historiques dramatiques avec beaucoup d'humanité tant les personnages qu'elle développe sont fidèles à une certaine réalité et incarnent d'autres anonymes qui ont vraiment existé. Ainsi, j'en ai appris beaucoup sur la venue au pouvoir de Franco et surtout, sur la guerre civile espagnole sans avoir l'impression de faire un quelconque effort pour m'y intéresser. Point de dates, de noms de personnes que l'on ne retiendra pas, juste la narration de la petite histoire pour évoquer, en fond, la grande Histoire. Moi qui ne connaissais pas grand chose à cette guerre, je suis ravie d'en savoir désormais un peu plus et cela m'a même donné envie de m'y intéresser davantage. Je me suis sentie complétement immergée dans les lieux décrits, comme si je montais dans une machine à remonter le temps à chaque fois que j'ouvrais le livre. J'ai également beaucoup apprécié le fait que la famille Ramiréz soit si authentique : elle aussi a eu son lot de malheurs et en cela, elle est représentative de milliers de familles espagnoles qui n'avaient rien demandé et qui se sont retrouvés endeuillées de façon totalement injuste. Souvent, dans ce type de roman, les morts pleuvent autour des protagonistes mais ceux-ci finissent toujours par bien s'en sortir et ne sont finalement que peu touchés par les atrocités de la guerre. Ici, il n'en est rien, au contraire, la famille Ramiréz a été très touchée et cela rend hommage à une certaine vérité historique.

En conclusion, je n'ai pas été convaincue par tous les choix narratifs de l'auteur mais dans l'ensemble, j'ai beaucoup apprécié ma lecture d'Une dernière danse. Cela confirme ce que je disais plus haut, les Victoria HISLOP sont une valeur sûre pour qui souhaite voyager sans quitter le transat !
 Dernières infos.

Une dernière danse a été publié en 2008 pour la version originale et compte 453 pages. Si vous souhaitez en savoir un peu plus sur la guerre civile espagnole, je vous conseille cette vidéo de Nota Bene qui nous donne un bon aperçu de la situation sans être assommante. Voici un autre lien vers une vidéo un peu plus concise et ici sur l'histoire du flamenco.

Ma note.
Challenges.

Défi lecture 2020 : Consigne 7 - Livre que vous n'avez pas acheté - 31/100 (je l'ai emprunté à la médiathèque)

samedi 8 août 2020

Beignets de tomates vertes - Fannie Flagg

En résumé.

Evelyn Couch traverse une crise existentielle. A l'approche des cinquante ans, elle dresse le bilan de sa vie, de sa relation platonique avec son mari et noie ses regrets dans des sucreries qui entretiennent un embonpoint qu'elle n'assume plus. Les visites dominicales à la belle-mère, placée à la maison de retraite de Rose Terrace ne font qu'aggraver les choses puisqu'elles ne cessent de rappeler à Evelyn ce qui l'angoisse le plus : vieillir. S'echappant régulièrement de la chambre de la vieille dame pour dévorer ses sucreries dans le hall commun, elle fait la rencontre de Mrs Threadgoode, une dame de 86 ans, très bavarde sur le quotidien de la maison de retraite, mais aussi sur son passé. L'évocation de ses souvenirs de vie à Whistle Stop, petit village reculé d'Alabama, entre les années 30 et 70, permettent progressivement à Evelyn de s'évader de ses préoccupations et de se réconcilier avec son passé pour aller de l'avant.

Mon avis. 

Déçue il y a quelques années par ma lecture de Miss Alabama et ses petits secrets, je ne pensais pas un jour retenter l'expérience Fannie FLAGG. J'ai finalement revu ma copie lorsque j'ai appris qu'un film, Beignets de tomates vertes, existait et souhaitant le visionner, je préférais lire le roman au préalable. Ce fut une bonne surprise, à tel point que j'ai eu l'impression que ce n'était pas la même personne qui avait rédigé les deux romans.

L'entrée dans le roman est un peu déroutante puisqu'on suit réellement deux histoires : d'une part celle d'Evelyn Couch et Mrs Threadgoode, en 1986 ; d'autre part celle de la famille Threadgoode et plus globalement du village de Whistle Stop entre les années 30 et 70. Afin de rendre cela possible, les chapitres sont écrits selon trois points de vue : celui de Mrs Threadgood qui raconte, sous forme de monologue le plus souvent, ses souvenirs à Evelyn, celui de Dot Weems, habitante de Whistle Stop qui rédigeait à cette époque-là une gazette reprenant les actualités du village et enfin, celui du narrateur externe. Si on a du mal à s'y retrouver au début, les choses finissent par s'agencer plutôt bien et c'est finalement une richesse que d'avoir ces trois points de vue. Le narrateur externe complète les souvenirs de Mrs Threadgoode qui restent, bien évidemment, subjectifs et qui manquent parfois d'information. De même, la page de la gazette nous plonge encore plus dans le passé et renforce l'authenticité des événements narrés. Si je me suis faite à ces changements de point de vue au fil des chapitres, en m'aidant des dates mentionnées par l'auteur, j'ai eu plus de difficultés à me repérer dans les personnages. Ils sont vraiment nombreux, entre la famille Threadgoode qui compte neuf enfants si mes souvenirs sont bons, le personnel qui travaille au sein du café ouvert par une des filles de la famille, Idgie Threadgoode, puis leurs enfants, les gens de passage, le shérif du village, etc. Face à ce flot d'informations, je me suis surtout focalisée sur les histoires des personnages qui m'intéressaient le plus, à savoir Idgie et Ruth, sa compagne, Frank Bennett, Railroad Bill et Evelyn Couch.

Les destins de tous ces personnages finissent par se croiser et par se retrouver, pour former cette ambiance si particulière de ce petit village de l'Alabama à une époque marquée par les chamboulements sociaux. Si l'on a vraiment affaire à un roman retraçant la destinée de ses personnages, on sent, en toile de fond, le contexte qui oriente ces mêmes destinées. D'abord, la crise de 1929 qui accroît la pauvreté et qui voit le nombre de vagabonds augmenter, tous venant trouver refuge au café tenu par Idgie et Ruth qui n'hésitent pas à offrir le couvert et un peu de travail aux plus démunis. Ensuite, la question raciale avec la menace du Ku Klux Klan, et l'expulsion des personnes noires, qui trouvent également auprès de la famille Threadgoode une protection sans faille. Enfin, il y a la désertion progressive de ces territoires, nés des chemins de fers, ayant connu l'apogée et puis qui déclinent lorsque les réseaux ferroviaires ferment et lorsque les grandes villes, comme Birmingham pour l'Alabama, se déploient de plus en plus et attirent une population auparavant rurale. Malgré ces sujets assez durs, le roman donne une impression de douceur, comme si Whistle Stop était une sorte de bulle, une parenthèse dans un contexte marqué par la violence et la pauvreté, ses membres incarnant une humanité sincère et authentique, face à un mouvement souhaitant justement diviser les hommes et aller vers plus d'invidualisme. Seul regret, j'aurais aimé que la question de l'homosexualité, simplement évoquée au travers des personnages d'Idgie et Ruth, soit davantage traitée, on devine, notamment chez Ruth, le poids des conventions sociales mais c'est dommage de ne pas avoir plus approfondi le sujet. J'ai apprécié de croiser la route de ce roman sans prétention, qui offre au lecteur une immersion dans une partie de l'histoire américaine au travers de personnages travaillés, aux personnalités fortes et engagées. Si certains passages peuvent sembler rébarbatifs, d'autres nous tiennent en haleine, et l'auteur aboutit ainsi à une forme d'équilibre qui, je pense, peut plaire au plus grand nombre.

En conclusion, un roman agréable, qui peut peut-être dérouter sur sa forme dans un premier temps mais dont le fond est travaillé et qui offre un aperçu de la vie dans un coin reculé de l'Alabama à une époque particulière de l'histoire des Etats-Unis. Je vous le conseille, vous ne perdrez pas votre temps !
Dernières infos.

Beignets de tomates vertes a été publié en 1987 et compte 466 pages. Il a été adapté au cinéma en 1991 par Jon AVNET.

Ma note.
Challenges.
Défi lecture 2020 : Consigne 44 - Livre dont le titre comporte le nom d'un végétal - 29/100

samedi 25 juillet 2020

L'extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea - Romain Puértolas

En résumé.

Après avoir arnaqué ses amis et admirateurs dans son petit village de l'Inde, le fakir Ajatashatru Lavash Patel (à prononcer "J'attache ta charrue, la vache" selon le narrateur) embarque pour Paris, destination Ikea afin de se procurer un nouveau lit à clou. Bien décidé à faire des économies, Aja n'a pas réservé d'hôtel et choisit de passer la nuit dans le célèbre magasin. Pourquoi se priver quand on a, à sa disposition, des dizaines de lits et de canapés, des cuisines et des salles de bain ? Alors qu'il est sur le point de s'endormir, il se fait surprendre par deux employés de la marque et se réfugie dans une armoire. Manque de bol, celle-ci est embarquée pour l'Angleterre. Dans le camion transportant les marchandises, le fakir rencontre un clandestin soudanais, en quête d'une terre pacifique. A leur arrivée, les deux hommes sont arrêtés par la police britannique et renvoyés en Espagne. A partir de là, les péripéties se poursuivent pour l'Indien, visitant tout à tour l'Italie, la Lybie et la France, rencontrant sur son passage des personnes qui changeront à jamais sa vie.

Mon avis.

Un livre trouvé en parfait état dans une boîte à livres. Cela a fait mon affaire puisque je pense que je ne l'aurais jamais acheté si je n'avais pas croisé sa route de cette façon. A l'approche des vacances, j'avais envie d'une histoire fraîche, tout simple et rapide à lire. Celle-ci était toute indiquée, en plus on y parle de voyages...

Bien que plutôt léger, ce livre, que l'on pourrait classer dans la catégorie des "feel-good books", propose trois histoires en une. La première, la principale, celle de ce fakir qui va vivre, malgré lui, des aventures rocambolesques. Parti pour un aller-retour à Paris avec le désir bien précis de se procurer un lit à clou, il va finalement faire le tour de l'Europe, souvent placé au centre de plusieurs quiproquo et échappant aux diverses menaces grâce à des moyens de transports peu conventionnels (une armoire, un sac de voyage, une mongolfière). Ces nombreuses péripéties servent de fil rouge à l'intrigue. Ensuite, il y a une deuxième histoire, celle de ce clandestin soudanais et plus largement celle de tous les clandestons. C'est un thème récurrent et Aja s'interroge à de nombreuses reprises sur la souffrance que ressentent ces hommes et ces femmes qui ont tout quitté pour un espoir de vie meilleure. D'ailleurs, sa propre aventure contraste vivement avec leurs aventures à eux. Alors que la sienne est racontée sur le ton de l'humour, et semble se faire de façon si simple (il suffit de se cacher dans une valise pour atterrir à Rome), celle des migrants apparaît, à juste titre, comme douloureuse, semée d'embûches et incarnant quelque part le mythe de Sisyphe. Enfin, la troisième histoire est le changement qui s'opère chez l'Indien, comme si nous avions affaire à un voyage initiatique. Le fakir, habitué à mentir sur ses pouvoirs pour escroquer son entourage, rencontre au fil de ses étapes européennes des personnages qui lui permettent de gagner en maturité. A l'issue du roman, c'est un homme transformé, qui a désormais l'ambition de rendre les gens heureux, à commencer par sa compagne. 

Un roman qui laisse donc entrevoir plusieurs messages, sans pour autant entrer dans une histoire tire-larmes. Au contraire, le récit des aventures d'Aja se veut plutôt comique, même si pour ma part je ne suis pas partie dans de grands éclats de rire, juste quelques sourires de temps en temps. C'est le type de livre que l'on lit pour se changer les idées, sans en attendre grand chose. J'ai d'ailleurs trouvé que la longueur et le rythme étaient bien. Les aventures s'enchaînent, les chapitres sont courts et rythmés, on n'a donc pas le temps de s'ennuyer, et l'histoire s'arrête à temps, un pays de plus aurait été de trop. En revanche, j'ai moins apprécié le côté un peu surréaliste des aventures de ce fakir farfelu. Bien sûr, l'auteur avait besoin de rebondissements et de coups d'éclats pour servir ses ambitions mais j'ai trouvé qu'il allait parfois un peu trop loin. Par exemple, l'histoire d'amour avec Marie est vite introduite puis balayée, la carrière d'écrivain d'Aja sonne faux (comme si un éditeur filait 100 000 € pour un manuscrit à peine entamé) et le passage en Lybie est carrément tiré par les cheveux. Mais bon, il faut accepter ce genre de couacs dans ce type de livre.

En somme, un livre sans prétention, dont l'objectif est uniquement de faire passer au lecteur un bon moment, et c'est d'ailleurs réussi. A lire au bord de la piscine, entre deux plongeons rafraîchissants. 
Dernières infos.

L'extraordianire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea a été publié en 2013 et compte 307 pages. Il est suivi des Nouvelles aventures du fakir au pays d'Ikea. Le premier tome a été adapté au cinéma en 2018 par Ken SCOTT.

Ma note.
Challenges.

Défi lecture 2020 : Consigne 19 - Livre dont le titre contient le nom d'un objet de la maison (armoire) - 27/100