samedi 24 juillet 2021

Journal d'un jeune naturaliste - Dara McAnulty

En résumé.

Dara McANULTY est un jeune irlandais de quatorze ans passionné de nature. L'observation de la flore et de la faune, tout particulièrement des oiseaux, constitue pour lui un refuge, et c'est ce qui lui a permis, petit à petit, d'apprendre à gérer ses traits autistiques. Lorsqu'il apprend que ses parents comptent déménager à l'autre bout du pays, c'est une immense tristesse qui l'envahit. La tristesse de devoir quitter les coins de nature qu'il affectionne tout particulièrement et toutes ces espèces d'oiseaux auxquelles il doit dire au revoir. Pour se remettre de ce choc, il entame un journal qu'il remplit de souvenirs au fil des saisons. L'écriture lui permet de laisser une trace des émotions ressenties au contact de la nature et l'accompagne progressivement vers son nouveau chez lui. Elle lui permet également de se confier sur les difficultés qu'il peut rencontrer vis-à-vis des autres adolescents ou sur les combats qu'il mène pour sauvegarder la planète.

Mon avis.

J'ai découvert ce livre un peu par hasard, en parcourant le rayon des nouveautés de ma médiathèque. Très sensible aux questions environnementales, j'ai été séduite par le projet de cet adolescent qui semble être très engagé pour la sauvegarde des écosystèmes dans son pays. L'autisme est un autre thème qui m'intéresse et j'étais curieuse de savoir comment il a évolué, comment il est parvenu à faire cohabiter cette particularité et son engagement qui nécessite des représentations publiques, une mise en scène sur les réseaux sociaux, peu compatible avec l'inhibition sociale spécifique à l'autisme. Malgré toutes ces belles promesses et l'envie de me plonger dans le parcours de Dara McANULTY, j'ai vraiment été déçue par ma lecture. Je vous explique pourquoi sans plus tarder.

Cela me gêne de dire que j'ai été déçue par cette lecture, voire même que je ne l'ai pas appréciée. Il est important de préciser que je ne juge pas la parcours du jeune homme en question, dont je suis par ailleurs admirative, mais plutôt le livre en tant que tel. Parvenir à un tel niveau de prose à quatorze ans relève d'un talent indéniable, à tel point qu'on a l'impression d'avoir affaire à la plume d'un écrivain aguerri. C'est plus le contenu qui m'a laissé de marbre. Je me suis vraiment beaucoup ennuyée et j'ai eu le sentiment que cette lecture n'en finirait jamais. Le jeune homme s'attarde beaucoup sur ses observations de la faune et de la flore locales. J'ai eu des difficultés à me projeter dans ces descriptions. Ne connaissant ni les paysages irlandais ni les espèces d'oiseaux qu'il cite à de nombreuses reprises, je me suis sentie perdue, j'ai peiné à construire des images mentales assez efficaces pour me permettre de dépasser le fait qu'il n'y ait pas d'action, ni de fil rouge autre que le déroulé de ses pensées. C'est un livre qui se contemple, qui nécessite que l'on s'y connaisse un peu en zoologie pour en apprécier toute la saveur. Peut-être n'étais-je pas prête pour ce type de lecture contemplative, peut-être avais-je besoin d'une lecture plus dynamique, quoiqu'il en soit j'ai eu envie d'interrompre ma lecture à plusieurs reprises mais je suis tout de même contente d'être parvenue jusqu'au bout, ne serait-ce que pour rendre hommage à la belle personnalité de ce naturaliste en herbe.

Si j'ai été peu sensible aux longues descriptions qui constituent les trois-quart du journal, j'ai davantage apprécié les passages où l'auteur évoque son adolescence, les difficultés qu'il a pu rencontrer en tant que jeune autiste, mais aussi sa lutte pour préserver ces écosystèmes si fragiles. Ces passages sont le plus souvent assez courts, ce qui m'a frustré. J'aurais vraiment aimé en savoir davantage sur son parcours de militant, comment il est parvenu progressivement à se faire connaître de certains défenseurs de l'environnement célèbres dans son pays. J'ai également apprécié les passages où il décrit l’organisation familiale et comment sa mère, autiste également, a réussi à créer un cocon suffisamment protecteur pour que ses enfants puissent s'épanouir, comment elle leur a très vite proposé la nature comme remède à certains traits envahissants. C'est d'ailleurs très intéressant de lire la capacité de la nature à procurer de l'apaisement, à stimuler tout en proposant dans un second temps des havres de paix, calmes et reposants. Dommage que ces aspects ne soient pas davantage développés, peut-être qu'ils feront l'objet d'un prochain livre...

Par un souci d'équité vis-à-vis des autres livres que je chronique sur ce blog, je suis dans l'obligation de n'octroyer que deux fleurs à ce livre tellement l'ennui a été présent durant la totalité de la lecture. Il n'en demeure pas moins que je suis très heureuse d'avoir fait la connaissance de ce jeune homme à l'avenir prometteur et je n'oublie pas certains passages forts intéressants qui m'ont fait réfléchir à la prise en charge des jeunes autistes et au pouvoir inestimable de la nature. Si jamais vous aimez ce genre de lectures contemplatives, ou si vous êtes vous-même naturaliste, je vous encourage à vous plonger dans le journal de Dara.
 
Dernières infos.

Journal d'un jeune naturaliste a été publié en 2020 pour la version originale et compte 226 pages.

Ma note.
Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 99 - Un livre dans lequel on a appris un mot, une expression que l'on ne connaissait pas > un traquet (il désigne une espèce d'oiseau) - 27/100
En 2021... Je voyage : Irlande (+ 20 points)

samedi 17 juillet 2021

Apprendre à parler avec les plantes - Marta Orriols

En résumé.

Paula Cid est médecin dans le service néonatalogie d'un hôpital de Barcelone. Passionnée par son métier, son quotidien est surtout rythmé par ses heures de garde et ses petits patients qui demandent déjà beaucoup de soin et d'attention. Elle ne le voit pas venir ce jour fatal de Février, cette décision qui bouleversera sa vie, cette rupture après quinze ans de vie commune. Mauro a pris les devants, il décide de quitter Paula, sans lui avoir laissé de signes annonciateurs pour se préparer. Quelques heures après ce repas au restaurant qui a tourné au vinaigre, Mauro se tue dans un accident. En une journée, Paula passe d'un quotidien calme et routinier à des journées de tourment, de longues minutes à ne plus savoir où elle en est, des mois à ruminer cette double peine que le destin lui inflige. Comment digérer la séparation, la trahison, et le deuil. Sur qui prendre appui, ses collègues, son père veuf depuis de longues années, Lidia, l'amie qui a toujours été là, ou ces hommes de passage qui ne remplaceront jamais Mauro. Une année d'interrogations, de doutes, de peine, une année avant de prendre un nouvel envol.

Mon avis.

L'Espagne est à l'honneur ce mois-ci dans le challenge "En 2021, je voyage...". C'est donc en partie pour cela que je me suis dirigée vers ce livre de Marta ORRIOLS, auteure catalane. Comme bien trop souvent, j'ai aussi été attirée par cette couverture qui cadre plutôt bien avec la saison estivale, même si l'histoire qui nous est racontée ici n'a rien de léger ni de joyeux.

Avouons le franchement, le risque était de tomber dans le larmoyant et dans l'excès de pathos. Les enfants malades, le deuil, l'abandon, la séparation et l'infidélité, tout était réuni pour craquer devant la boîte à mouchoirs. Heureusement, Marta ORRIOLS a su choisir les mots et les situations pour déjouer tous nos pronostics. Certes, on ne se fend pas la pêche, mais on ne pousse pas non plus des cris de désespoir toutes les cinq minutes. On est plutôt sur le registre du mélancolique, de la nostalgie et de la compassion vis-à-vis de Paula, qui a tout perdu en quelques heures. Cette histoire pourrait arriver à n'importe qui malheureusement, et cette question surgit, que ferions-nous à sa place ? L'auteure est attachée aux détails, le quotidien est décrit avec beaucoup de soin, des scènes tout à fait banales sont rapportées ici pour ancrer son personnage principal dans un environnement classique, lambda, qui parle à chacun d'entre nous. C'est d'ailleurs ce qui a remporté mon adhésion, ce sentiment d'écouter une amie me parler de ses chagrins, de ses doutes et de ses peurs. Une amie qui n'oublierait pas chaque instant de vie, comme si chaque geste était empreint de la douleur de l'abandon. On marche vraiment sur un fil, on est dans une histoire très intime sans pour autant basculer du côté trash, où tout serait décrit à grand renfort d'exagérations.

J'ai principalement apprécié de voir Paula se reconstruire. Les thèmes du deuil, mais aussi de l'infidélité et du sentiment d'abandon qui en résulte sont explorés avec beaucoup de profondeur et de finesse. C'est vrai qu'il ne se passe pas grand chose, les rebondissements ne caractérisent pas ce roman, mais je ne me suis pourtant pas ennuyée. J'ai aimé suivre le cheminement de la pensée de Paula, j'ai aimé être spectatrice des micro événements qui lui ont permis de progressivement tourner la page. J'ai interprété ce livre comme un témoignage sur ces grandes peines de la vie, comment chacun peut essayer de s'en tirer. Alors que certains iraient piocher chez les autres l'énergie pour se reconstruire, Paula suit un chemin plus intérieur et solitaire. Elle nous montre que c'est en elle que les ressources sont à chercher et que cela passe par toute une palettes de réactions et de décisions incongrues mais qui poursuivent un même objectif, celui de se retrouver en tant que femme. Dans l'ombre de Paula, il y a aussi Mauro qui est un personnage omniprésent. Plus que Mauro, il y a cette histoire d'amour que j'ai trouvé très belle et très juste. Elle met en avant toutes les peines que peuvent rencontrer un couple : l'incompréhension, le manque de communication, l'éloignement qui peut s'installer sans qu'on lui donne un nom ni une date. La fin du roman est particulièrement belle et apporte encore un nouvel éclairage sur l'ensemble du cheminement de Paula.

Voilà une lecture qui nous offre un moment de pause, une immersion dans le parcours de vie d'une femme qui pourrait être n'importe qui. L'authenticité et la justesse de ce roman ne peuvent laisser indifférents et nous empêchent de tomber dans un sentimentalisme exagéré. Je vous conseille ce livre pour les derniers jours de l'été, quand la mélancolie nous gagne. Ce livre, bien que morose, peut apporter une forme de réconfort.
Dernières infos.

Apprendre à parler avec les plantes a été publié en 2020. Il compte 252 pages.

Ma note.
Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 93 - Un livre d'un auteur ayant écrit moins de cinq livres - 26/100
En 2021... Je voyage : Espagne (+ 25 points)

mercredi 14 juillet 2021

Toutes les histoires d'amour du monde - Baptiste Beaulieu

En résumé.

A la mort de Moïse, son fils et son petit-fils, Jean, mettent la main sur trois carnets contenant des lettres que le vieil homme a écrites tous les ans et qu'il a destinées à une mystérieuse Anne-Lise Schmidt. Cet homme bourru, discret et revêche révèle dans ces écrits une toute autre personnalité, plus sensible et altruiste, ainsi qu'un lourd passé dont il n'a rien dévoilé à ses descendants de son vivant. La découverte de ces lettres est un véritable choc pour Jean et son père, à tel point que ce dernier en tombe malade, malade de s'apercevoir que son père n'est pas celui qu'il pensait être. Au fil de la lecture des lettres, les deux hommes lèvent le voile sur la véritable vie de Moïse et retrace ses combats, ses joies et ses déceptions, marquées par les grands événements du XXème siècle. Afin de guérir le chagrin de son père, Jean lui fait la promesse qu'il retrouvera Anne-Lise et qu'ensemble, ils formeront cette nouvelle famille élargie, fruit du passé tumultueux de Moïse.

Mon avis.

Si j'avais déjà beaucoup entendu parler de Baptiste BEAULIEU, médecin généraliste connu notamment pour son blog Alors voilà dans lequel il raconte des anecdotes sur sa profession, je n'avais encore jamais eu l'occasion de me plonger dans ses romans. Celui-ci a été repêché par mon amoureux dans une boîte à livres, peut-être qu'il y retournera car de part son histoire il a vocation à voyager jusque dans les mains de cette mystérieuse Anne-Lise.

Car je ne le savais pas en entamant ma lecture, mais Toutes les histoires d'amour du monde est en réalité un livre autobiographique, ou biographique, je ne sais pas quel terme est le plus adapté. Si Baptiste devient Jean dans le livre, il n'en demeure pas moins que l'auteur est réellement tombé sur ces lettres à la mort de son grand-mère et qu'il est réellement à la recherche d'Anne-Lise. Ce côté véridique du récit confère quelque chose d'encore plus touchant à une histoire qui l'est déjà. Je suis une adepte de ces petites histoires qui s'inscrivent dans la grande, ces parties de vie qui ont d'héroïque le fait que leurs protagonistes se considèrent comme de simples mortels, des monsieur tout le monde, des gens de peu qui ont pourtant galéré, connu dans une seule vie deux guerres mondiales, qui ont eu peur, froid, faim, et soif de tisser des liens durables dans un contexte où les séparations étaient inévitables. C'est précisément la vie de Moïse, qui a en fait connu mille vies en une. La dernière consistait plutôt à taire toutes les autres, à faire comme si de rien n'était. Ces lettres sont un témoignage émouvant de la vie d'un homme qui n'a exercé que de basses besognes, un homme simple, qui pourrait être tous les hommes, mais dont le parcours et la façon de le narrer sont d'une sensibilité et d'une intelligence incroyables. Apparaissent dans ses lettres toutes les histoires d'amour du monde, celles qu'on tisse dans le cercle familial, celles qu'on entretient avec ses amis et celles évidemment qui concernent le plus intime. Un condensé d'universel au travers d'une blessure difficile à panser, celle d'avoir perdu son enfant.

Même si les femmes sont omniprésentes dans ce livre, je dirais que c'est quand même une histoire d'hommes, au fil de trois générations. Les questions de la transmission, du secret et de la relation père-fils sont partout. D'abord dans le relation de Moïse à son propre père puis à son fils. Puis dans le relation de Jean à propre père. On sent à chaque fois une certaine maladresse héritée des temps passés, une pudeur qui peine à être dépassée, une forme de gêne, l'envie de se faire confiance et d'avouer ses secrets sans pour autant oser le faire. Le récit est construit sur une alternance entre les lettres de Moïse et les réflexions du narrateur qui raconte comment il fait croire à son père qu'il s'est lancé à la recherche d'Anne-Lise alors qu'en réalité son projet consiste essentiellement à publier ce livre avec l'espoir qu'il parviendra un jour dans les mains de la recherchée, ou de gens qui l'ont connue. La découverte de ces lettres et du passé du grand-père permet en fait de réconcilier Jean et son père, de les faire cheminer vers l'acception de l'homosexualité de Jean, pourtant refusée par son père. Il s'agit donc d'un livre où le poids des générations et des non-dits est très fort, un roman à dimensions multiples, comme une poupée russe, où le lecteur dépiaute page à page les secrets des uns, le présent des autres pour arriver à ce qui les lie tous, l'amour filial.

Un énième roman sur les deux guerres mondiales me direz-vous. Certes, mais celui-ci contient un petit supplément d'âme du fait qu'il a été rédigé avec l'espoir de retrouver Anne-Lise, avec l'espoir aussi de réconcilier une famille et de retisser les liens père-fils mis à mal de génération en génération. Je vous encourage à découvrir l'histoire de Moïse, juste pour rendre hommage aux hommes du quotidien. De mon côté, peut-être vais-je remettre cette histoire dans le circuit des boîtes à livre afin qu'il touche encore un autre lecteur, peut-être celui qui connaîtra Anne-Lise Schmidt.
Dernières infos.

Toutes les histoires d'amour du monde a été publié en 2018 et compte 437 pages. Quelques photos figurent sur le blog de Baptiste BEAULIEU, Alors voilà., dans l'onglet #LOOKINGFORANNELISE. Bon à savoir, Baptiste BEAULIEU est également chroniqueur sur France Inter dans l'émission Grand bien vous fasse me semble t-il.

Ma note.
Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 33 - Un livre écrit par un homme à lire durant le mois de la fête des pères - 25/100

jeudi 1 juillet 2021

Jimfish - Christopher Hope

En résumé.
 
Par un beau jour de 1984, au large de l'Afrique du Sud, un jeune homme, complètement égaré, est repéré par un pêcheur. Ramené à port Pallid, il est présenté au chef de la police locale. A l'époque de l’apartheid, où la couleur de peau détermine la place de l'individu dans la société, le jeune homme fait figure d'exception car il n'est ni blanc ni noir. Le policier décide donc qu'il sera du côté des moins privilégiés, qu'il sera nommé Jimfish et qu'il travaillera pour lui en tant que jardinier. Jeune homme extrêmement naïf, Jimfish accepte toutes ces décisions sans broncher et se retrouve à entretenir la propriété de son "bienfaiteur", aux côtés de Malala le Soviet, un jardinier noir se revendiquant philosophe et communiste. Au fil des échanges, le maître jardinier tente de rallier son poulain apolitique à sa cause, notamment en l'amenant à ce poser cette question qui reviendra sans cesse : quel est le bon côté de l'histoire ? Loin de toutes ces préoccupations, l'ingénu Jimfish préfère plutôt tomber amoureux de la fille de son employeur. Lorsque ce dernier les surprend en train de se bécoter, Jimfish est contraint de fuir s'il veut échapper à la folie meurtrière du chef de la police. Commence alors un périple incroyable au travers de l'Europe et de l'Afrique entre 1984 et 1994, Jimsfish étant amené, toujours par le plus grand des hasards, à côtoyé les plus grands du monde d'alors avec cette interrogation qui ne le quitte pas : quelle est le bon côté de l’histoire ?

Mon avis. 

J'ai découvert ce roman à la faveur du challenge "En 2021.... Je voyage", le mois de Juin étant consacré à des lectures sud-africaines. Il m'a fallu un mois pour oser me lancer dans la rédaction de cette chronique, les impressions étant là, parfois un peu floues, mais je ne parvenais pas à les restituer à l'écrit. C'est un peu à l'image de ma lecture : des bonnes idées mais qui peinent à prendre de la consistance, une sensation de flou artistique, en partie due à la rapidité des chapitres mais aussi du fait du contenu très historique et politique, qui demande un minimum de connaissances pour saisir l'essentiel du message.

Jimfish n'est pas un roman comme les autres. En tout cas, ne comptez pas sur lui pour vous offrir une pause détente au bord de la piscine ou dans un hamac, à l'ombre des arbres. Véritable réinterprétation moderne du Candide de Voltaire, ce livre pourrait être classé au rayon des lectures donnant matière à réflexion. Christopher HOPE a choisi une période très dense du point de vue historique et politique. Les événements qui prennent place en cette fin de guerre froide nourrissent particulièrement bien les réflexions autour de cette problématique : quel est le bon côté de l'histoire ? A chaque fois qu'on découvre un nouvel événement avec les yeux de notre ingénu Jimfish, on ne cesse de le regarder avec ce nouvel éclairage : est-ce que c'est ça être du bon côté de l'histoire ? Tout y passe, Chernobyl, la chute du mur de Berlin, la fin des sociétés coloniales et l'avènement des nouveaux gouvernements africains. Jimsfish se retrouve toujours au plus près des dirigeants de l'époque ou au cœur des événements les plus tragiques, points de bascule qui ont participé à la formation de notre société contemporaine. Avec son regard naïf sur les situations, il pose les questions tabou, celles qui trahissent les véritables intentions des dirigeants de l'époque. J'ai vraiment apprécié ce fil conducteur, cette tentative de trouver le bon côté de l'histoire alors qu'en réalité il n'y en a pas. La décolonisation l'illustre à la perfection. D'un côté, les colons ne sont pas du bon côté de l'histoire pour toutes les raison qu'on connaît, mais d'un autre côté, se positionner du côté des nouveaux régimes africains mis en place n'est pas non plus le bon côté de l'histoire dans la mesure où ces régimes furent extrêmement violents et pas vraiment préoccupés par l'intérêt public.

Si j'ai donc été séduite par cette trame de fond, j'ai moins apprécié le reste de l'histoire. C'est vrai que je me suis quand même ennuyée pendant une bonne partie du livre. Je n'avais malheureusement pas toutes les connaissances historiques nécessaires à une compréhension pleine et entière de l'histoire. Je n'ai pas non plus tout compris dans le débat sur le communisme, il y a tellement de nuances à cette époque-là, car les pays et les dirigeants en adopte parfois des pistes différentes. Je ne me suis pas attachée au personnage de Jimfish, ni aux autres. Même si le procédé sert l'objectif de l'auteur de nous amener au plus près des événements pivot, j'ai été lassée par ces hasards successifs qui placent toujours Jimfish en première ligne. C'est un peu grossier au fur et à mesure qu'on avance dans le récit. Les transitions sont aussi un peu bancales, on passe très vite d'un pays à un autre sans forcément comprendre tous les tenants et aboutissants. Même si l'argumentation est intelligente et rigoureuse, j'ai quand même eu la sensation d'une lecture décousue, peut-être aussi parce que j'ai lu quelques pages par ci, quelques pages par là. Pour bien saisir tous les enjeux des aventures de Jimfish, je pense qu'il est nécessaire de vraiment se poser pour les lire et les laisser décanter.

Une déception partielle pour ce livre complexe sur le fond mais simple sur la forme. Voilà un récit intelligent, argumenté, documenté qui demande du temps pour se l'approprier et en comprendre tous les enjeux. Pas une lecture divertissante donc, plutôt une réflexion sur la façon dont s'est construit notre monde contemporain, avec ce désir sous-jacent de toujours trouver sa place et de se situer du bon côté de l'histoire. Malgré toute la frustration que je ressens, je ne suis pas sûre de si vite y revenir.

Dernières infos.

Jimfish a été publié en 2017 et compte 208 pages.

Ma note.

Challenges.

* Défi lecture 2021 : Consigne 77 - Un livre qui s'inspire d'un autre livre, réécriture, réinterprétation, remake - 24/100
En 2021... Je voyage : Afrique du Sud (+ 15 points)