lundi 30 décembre 2019

Tokyo Vice - Jake Adelstein

En résumé.

Âgé de 24 ans, Jake ADELSTEIN, originaire du Missouri mais étudiant au Japon, est le premier "gaijin" - étranger - à faire ses débuts en tant que journaliste au sein du Yomiuri Shinbun, le premier quotidien du pays. Très vite, il est envoyé dans l'arrière-pays afin de couvrir des affaires de moeurs. Rien de palpitant pour un journaliste mais cela lui permet de se construire progressivement un réseau et surtout de nouer des relations étroites avec les services de police dont les informations sont précieuses pour pouvoir sortir des articles de qualité et espérer avoir la primauté de l'information sur les concurrents. Au fil des mois, des années, le jeune américain fait son trou dans ce milieu très dur où on ne compte pas les heures, pour finalement attérir à Tokyo. Sa carrière prend alors un véritable tournant puisqu'il est de plus en plus amené à se pencher sur le côté très sombre de la société nippone : yakuzas - la mafia japonaise - crimes, esclavagisme sexuel, corruption, extorsion de fonds, et j'en passe et des meilleures. Des enquêtes qui vont le prendre aux tripes, parfois au risque de perdre les siens et sa propre vie.

Mon avis.

J'ai découvert cette autobiographie/fiction/documentaire sur ce blog que je cite très souvent tant il est inspirant : Horizon des mots. Je ne suis pas une fan du Japon, ni de sa culture, mais je suis toujours intéressée par ce genre de récit à la croisée des genres, qui mêle faits réels et enquêtes policières. Ce mélange des styles est visiblement la marque de fabrique des éditions Marchialy, que j'ai découvertes à cette occasion et dont je ne manquerai pas de me procurer dans un futur proche un autre de leurs ouvrages tant le projet me plaît. Pour en revenir au sujet qui nous préoccupe, Tokyo Vice ne fut pas le coup de coeur que j'espérais, mais j'en ressors quand même satisfaite car j'en ai appris un peu plus sur cette société japonaise que je qualifierais d'ambivalente et parce qu'il s'agit d'un témoignage rare.

Tokyo Vice est une lecture dense à plusieurs égards : son nombre de pages (près de 500 pages), son rythme (les enquêtes se multiplient), son contenu (il est souvent question de crimes) et l'ambiance est oppressante, sans moment de répit. En même temps, il a dû être compliqué pour l'auteur de résumer ce travail de longue haleine et qui a duré une dizaine d'années en un récit qui ne dépasse pas les 500 pages. Même si j'ai toujours pu suivre les affaires qu'il narrait, je me suis souvent sentie un peu perdue, comme semée par quelqu'un qui marcherait trop vite, tant les informations à intégrer sont nombreuses. Entre le système législatif, les différentes strates de la police, les noms japonais de toutes les personnes qu'il rencontre et qui sont impliquées dans plusieurs affaires, je dois avouer que j'ai parfois lâché des bribes, surtout lorsque j'ai lu certains passages en pointillés. Je pense que c'est cet aspect-là du récit qui m'a le plus gêné, le fait de me noyer au milieu des faits et des dizaines de personnes qui sont évoquées, de ne pas comprendre tous les tenants et les aboutissants, de ne pas être bien repéré dans le temps et le déroulé de la vie de l'auteur.

De part le thème du livre, le côté "enquête policière" est présent, mais on ne perd jamais de vue qu'il s'agit avant tout d'un documentaire dont l'objectif est de nous donner une vision la plus exhaustive possible des dessous sombres du Japon. D'ailleurs, les éléments autobiographiques sont peu nombreux et surtout axés sur la vie professionnelle de Jake ADELSTEIN. Da sa vie privée, on ne sait presque rien, à part qu'il se met en couple avec une japonaise et qu'ils ont deux enfants. Ce peu d'informations sur lui, en tant qu'homme, et non en tant que journaliste, nous donne une image assez froide de ce personnage qui trempe dans un milieu lui-même très dur, même si ce qui le pousse à flirter avec la pire espèce est son obsession de justice et surtout de rendre justice à certains de ses amis qui ont été floués par les yakuzas. Je pense qu'il faut être un homme courageux et intelligent pour prendre autant de risques, manier la chèvre et le chou, les yakuzas d'un côté, les policiers de l'autre et aussi bien s'intégrer dans cette société aux moeurs particuliers mais la façon dont il se met en scène ne rend pas hommage à ces qualités indéniables, au contraire elle dresse de lui un portrait plutôt négatif. Cela va d'ailleurs avec l'ambiance du récit qui n'a rien de bien réjouissant. Je ne peux pas dire que j'ai été étonnée par ce qu'il raconte, maintenant que les travers de cette société sont de plus en plus évoqués ici et là. Le récit commence à dater (début des années 2000), et ce qui pouvait être original à l'époque ne l'est peut-être plus aujourd'hui. Espérons d'ailleurs que le système qu'il s'emploie à montrer du doigt a changé depuis.

En bref, une lecture que je conseille à toute personne qui aime ce style où fiction et réalité s'entremêlent. Bien que ce soit un récit très dense, parfois un peu compliqué à suivre, il n'en reste pas moins qu'il est riche en informations et qu'il tend vers une description exhaustive du côté peu connu de ce pays au charme souvent vanté. 
Dernières infos.

Tokyo Vice a été publié en 2016 aux éditions Marchialy et compte 475 pages.

Ma note.

mardi 24 décembre 2019

Le plus bel endroit du monde est ici - Francesc Miralles et Care Santos

En résumé.

Employée dans une compagnie d'assurances, la vie d'Iris n'a rien d'enthousiasmant. Pas d'ami, pas de compagnon, et ses parents qui viennent de mourir. Alors la jeune femme décide de mettre fin à ses jours. La voilà positionnée au bord d'une voie ferrée, prête à faire le grand saut, lorsque son œil est attiré par une enseigne de café qu'elle n'avait jamais remarquée jusqu'ici : Le plus bel endroit du monde est ici. Elle pousse la porte de ce lieu prometteur et plonge dans une ambiance magique et réconfortante. Après s'être assise à l'une des tables et avoir commandé une boisson chaude, un beau jeune homme, Lucas, la rejoint. Ensemble, et pendant six semaines, il vont refaire le monde et ce nouvel ami, dont Iris ne connaît que peu de choses, va l'aider à panser ses blessures et à aller de l'avant, avant de disparaître mystérieusement...

Mon avis.

Cela faisait très longtemps que j'avais envie de me plonger dans ce très court roman, dont j'avais entendu beaucoup parlé sur la toile. Toujours emprunté, j'ai fini par me le procurer il y a quelques semaines, alors que les arbres commençaient à perdre leurs feuilles. Une lecture idéale pour l'automne, accompagnée d'un thé aux saveurs réconfortantes ou d'un bon chocolat chaud, mais qui m'a laissée perplexe, tant cette lecture fut en décalage avec mes attentes.

Chose rare, il a fallu que je m'y prenne à trois fois pour commencer ce livre et pour entrer pleinement dans l'histoire. Invoquant d'abord ma fatigue qui m'empêchait de garder le fil de l'histoire, puis ma mémoire défaillante trop accaparée par les choses du quotidien, ou enfin un défaut d'imagination et de compréhension de ma part, j'ai finalement compris que ce qui me gênait dans les premières pages de ce livre était son côté surréaliste. Moi qui m'attendais à un roman feel-good des plus banals et bien ancré dans la réalité, je me suis retrouvé face à ce café et à ses personnages grotesques. Vraiment, j'ai eu beaucoup de difficultés à comprendre (moi et mon éternel besoin de TOUT comprendre) où voulaient en venir les auteurs. Ainsi, certains concepts, comme le psychanalyste de poche ou le fait que chaque table du café est dédiée à une "leçon de vie" (savoir pardonner, savourer l'instant présent...), m'ont paru complètement tirés par les cheveux.

Malgré ces déconvenues de premiers chapitres, j'ai tout de même choisi de poursuivre ma lecture. Heureusement que la deuxième partie du roman est uniquement consacrée à la vie d'Iris, puisque le café et tout ce qui va avec, a disparu. J'ai un plus apprécié cette nouvelle étape dans le récit, même si certains événements sont eux aussi tirés par les cheveux et amenés avec peu de délicatesse. Ainsi, Iris retrouve comme par magie son amour de jeunesse qu'elle avait perdu de vue depuis des dizaines d'années, son agent immobilier devient en quelques jours sa nouvelle meilleure amie, et j'en passe et des meilleures. Cette accumulation de clichés que l'on voit venir à des kilomètres avec leurs gros sabots, ainsi que des personnages plutôt plats m'ont empêchée de savourer pleinement cette histoire qui aurait pu être une bonne idée si elle n'avait pas autant trempée dans la guimauve. Je n'ai pas non plus adhéré à l'aspect développement personnel du livre, contrairement à beaucoup de lecteurs. Là aussi, j'y ai simplement trouvé une accumulation de poncifs que l'on a l'habitude d'entendre ou de lire dans toute émission ou magazine qui vend de la psychologie de comptoir.

En deux mots, j'ai le sentiment d'être passée à côté de ce roman qui a tout de même le mérite de se lire extrêmement vite, et de présenter quelques bonnes idées. Dommage qu'elles ne soient pas plus abouties pour éviter l'écueil de la niaiserie. Un autre point positif, l'immense et fabuleux artiste Léonard COHEN est cité dans les toutes premières pages avec sa chanson I'm your man (pas la meilleure, mais je suis quand même preneuse) !
Dernières infos.

Le plus endroit du monde est ici a été publié en 2010 et compte 197 pages.

Ma note.

samedi 16 novembre 2019

Tous tes enfants dispersés - Beata Umubyeyi Mairesse

En résumé.

Blanche, née d'une mère rwandaise et d'un père belge, fuit Butare, petite ville du Rwanda limitrophe du Burundi, en 1994, alors que le tristement célèbre génocide des Tutsi débute. Elle rejoint Bordeaux et y démarre une nouvelle vie : un nouveau travail, un mari puis un fils, Stokely. Depuis cette date fatidique, et à plusieurs reprises, elle revient sur ces terres qui l'ont vu naître, cotoyer les fleurs majestueuses des jaracandas et renouer avec le passé. Elle se confronte à sa mère, qui a vu le génocide de prés mais qui y a réchappé, par miracle, et à son frère Bosco, guerrier né qui a participé à la lutte contre les Hutu puis aux autres combats qui ont vu le jour par la suite au Zaïre. Reconstruire une histoire à trois, quand tout a volé en éclat, sa confiance en l'autre, son amour de l'autre, son identité, sa légitimité à occuper ces terres détruites jusqu'à la moëlle. Un travail de longue haleine où le petit Stokely, bien que né à des milliers de kilomètres de là, pourrait bien avoir un rôle à jouer...

Mon avis.

Après le fabuleux Avant que j'oublie d'Anne PAULY, voici une deuxième lecture issue de la rentrée littéraire 2019, tout aussi riche et puissante et que j'ai dévorée en quelques jours, saisie par l'émotion.

Du génocide rwandais, je ne connaissais presque rien. Bien sûr, j'en avais entendu parlé, plusieurs fois, comme tout le monde je pense. Mais de là à en connaître les tenants et les aboutissants... J'ai donc tourné les premières pages de ce livre sans aucun a priori, avec toute ma naïveté et prête à me laisser surprendre. On entre dans ce livre au même rythme que Blanche nous dévoile son histoire, c'est-à-dire avec une certaine lenteur portée par toute la pudeur nécessaire dans ces circonstances. Page après page, ce ne sont pas ces trois mois de génocide que nous découvrons, mais une histoire familiale, de la grand-mère de Blanche à son fils, ces années de colonisation belge, et l'impact que la vie à l'européenne a eu sur ceux qui n'avaient toujours connu que les vallées fertiles de ce pays enclavé dans l'Afrique des grands lacs. Pour retracer cette histoire familiale complexe, les voix se succèdent, celle de Blanche, bien sûr, rivée sur le visage assombrie de sa mère, puis celle d'Immaculata, la mère donc, entièrement préoccupée par Bosco, ce fils et ce frère abreuvé par toutes les horreurs de la guerre, et enfin celle de Stokely qui porte en lui l'espoir de la nouvelle génération. Trois générations donc qui portent un regard différent sur les faits, et toujours comme point de repère la plume délicate et poétique de l'auteur. Les mots sont à ce point précis qu'ils me donnent à penser que ce récit contient peut-être une part autobiographique puisque Beata UMUBYEYI MAIRESSE a elle-même fui le génocide rwandais en 1994.

Ces regards multiples portent en eux toute la richesse de cet écrit de haute voltige. Les problématiques soulevées sont nombreuses et tout aussi pertinentes les unes que les autres. Déjà, la question de l'identité, lorsqu'on est le fruit d'un métissage. A celà, s'ajoute le rôle de l'Histoire vécue et partagée. Si l'on n'a pas vécu de près le génocide, peut-on quand même se considérer comme rwandais ? Ce sont à ces questions que Blanche se heurte à chaque fois qu'elle rend visite aux siens, elle qui est partie, elle qui s'est absentée pendant de longues années alors que son frère et sa mère sont restés, eux, à vivre ce moment historique si tragique. A côté de cela, il y a tout le panel de sentiments que l'on éprouve et avec lesquels il faut avancer : la culpabilité de ne pas avoir été là, la légitimité de  se placer dans un pays ou dans l'autre, la peur pour les siens, la tristesse d'être séparé, la détresse devant ce passé si complexe. Par ailleurs, se pose également la question du rôle du père. Blanche et Bosco n'ont pas le même père, un qui a été choisi par Immaculata par opportunisme et par rancoeur, l'autre par amour et passion. Quoiqu'il en soit, deux pères absents et pourtant toujours présents dans le regard que porte la mère sur ses enfants. Et puis bien sûr, comment avancer dans la vie, en portant sur son dos cet héritage complexe, quoi transmettre à Stokely de ses origines, de la langue maternelle. Toutes ses questions sont abordées de façon subtile, sans qu'aucune réponse ne soit donnée, d'ailleurs il n'y en a pas, à part le temps, qui, seul, peut panser les blessures.

Un livre qui n'est absolument pas larmoyant, mais qui est fort, précis et pertinent. Une histoire humaine, de transmission entre diverses générations qui ont chacune leur fardeau à porter. Vraiment, je conseille ce livre à tous !
Dernières infos.

Tous tes enfants dispersés a été publié en 2019 aux éditions Autrement et compte 256 pages. Si vous souhaitez en savoir plus sur le génocide du Rwanda, vous trouverez pléthore d'informations sur la toile. Toutefois, je vous conseille particulièrement ces deux épisodes très bien faits du Dessous des cartes, un consacré au génocide, ici et l'autre à ce qu'est le Rwanda aujourd'hui, ici, ainsi que cet épisode d'Affaires sensibles sur France Inter, consacré lui aussi au génocide, ici.

Ma note.

dimanche 3 novembre 2019

Swap - Embarquement pour les vacances d'été

Bonjour à tous !

Je rédige aujourd'hui un article un peu spécial puisqu'il sera consacré au Swap - Embarquement pour les vacances d'été qui vient de s'achever ! Il était temps, alors que nous sommes bien installés dans les intempéries automnales... Cela faisait très longtemps que je n'avais pas participé à un swap, par manque de temps. Cet été, j'ai donc été tentée par ce thème proposé par Ellalecrivain sur Livraddict. (j'aime beaucoup les swaps sur les saisons). N'ayant pas de binôme, Fannyreads a été tirée au sort pour être ma correspondante. 

Voici quelques photos du déballage :

























Le colis devait contenir :
* Deux livres : Fannyreads et moi avons fait le choix d'envoyer un livre extrait de la WL de son binôme, et un autre livre que nous avions beaucoup aimé et que nous voulions faire découvrir à l'autre. Ainsi, Fannyreads m'a offert Le parfum du bonheur est plus fort sous la pluie de Virginie GRIMALDI, qui figurait sur ma WL, et Jardins secrets de Helen WARNER, qu'elle a beaucoup aimé. J'ai hâte de découvrir ces deux livres que je me réserve pour l'été prochain. De mon côté, je lui ai envoyé Deux petits pas sur le sable mouillé d'Anne-Dauphine JULLIAND, qui venait de sa WL et L'île des oubliés de Victoria HISLOP, qui m'avait vraiment marqué.
* Deux gourmandises : Fannyreads m'a fait parvenir une boîte de thé vert parfumé à l'orange sanguine et au pamplemousse. Je l'ai déjà goûté et il est vraiment très bon ! En plus, la boîte est toute mignonne et je la garderai pour y ranger du thé que j'ai en vrac. Le colis était également parsemé de Chocobons. De mon côté, je lui ai envoyé une plaque de chocolat et une plaque de nougat, tout deux fabriqués non loin de chez moi. 
* Une carte postale représentant notre destination de voyage souhaitée : nous avons un peu contourné la règle et nous nous sommes envoyé une carte postale de l'endroit où nous sommes parties en vacances cet été.
* Deux marque-pages : Fannyreads m'a envoyé deux photos de son lieu de vacances et de sa ville, qu'elle a plastifiées, cela fera office de marque-page. De mon côté, je lui ai offert un marque-page que l'on peut clipser sur le livre avec un petit oiseau trop mignon, et deux autres petits marque-pages  magnétiques qui s'aimantent à travers les pages, ornés de petites fleurs toutes mignonnes elles aussi.
* Deux goodies : J'aurais dû recevoir une trousse mais je ne l'ai point trouvée dans le colis... Je n'ai donc pas eu de goodies. Pour ma part, j'ai envoyé à Fannyreads un savon et un gel douche aux senteurs estivales fabriqués dans une savonnerie artisanale non loin de chez moi. 

Voilà pour ce petit résumé swapesque. Je remercie Fannyreads pour ce colis, en espérant que le mien lui aura plu également. Et surtout, je remercie vivement Ellalecrivain pour l'organisation, je me doute à quel point ce doit être chronophage. 

A bientôt, je l'espère, pour d'autres swaps ! 

samedi 2 novembre 2019

Avant que j'oublie - Anne Pauly

En résumé.

Carrières-sous-Poissy - banlieue parisienne - sous un soleil automnal, le cœur d'Anne PAULY n'est plus à la fête, gelée par le deuil et les souvenirs. Elle vient de perdre son père, cet homme au double visage, homme alcoolique et brutal avec sa femme d'une part, amateur de poésie et collectionneur minutieux de piles usagées d'autre part. Anne PAULY part en pèlerinage émotionnel, sur les traces de ce père dont l'absence lui creuse une boule de chagrin dans sa gorge de femme épanouie. Après avoir affronter l'hôpital, il faut aller sur sa tombe, l'honorer une dernière fois puis rejoindre la vieille baraque, musée d'un quotidien de personne âgée, regorgeant d'objets à la fois insolites et banals, remplis de souvenirs douloureux. Trier les affaires, mettre sa tristesse de côté, faire preuve de courage face à un frère peu concerné par le départ du géniteur. Une tranche de vie, dans son côté sombre.

Mon avis.

Voici le premier roman, prometteur, d'une toute nouvelle écrivaine, Anne PAULY, sorti dans le cadre de la rentrée littéraire 2019. D'habitude, je ne participe pas à ces rentrées littéraires, par manque de temps pour choisir méticuleusement et patiemment les titres qu'il me plairait de découvrir, et puis par manque de budget car on le sait, les livres grand format, bien que revêtant un confort de lecture, coûtent cher. Cette année fait donc figure d'exception, grâce à mon amoureux, qui, dans le cadre de ses études, doit lire des romans de la rentrée littéraire. Je fais donc office de second dans ses lectures qui sont déjà sélectionnées (cela m'évite de faire des choix) et fournis par son école (pas de budget à prévoir donc). 

C'est donc avec beaucoup de joie, de plaisir mais aussi d'émotion que j'ai découvert Avant que j'oublie. Difficile d'écrire un énième roman sur le deuil, quand tant d'autres l'ont fait avant vous. Quoi dire de plus ? Quoi de dire de moins ? Quoi dire de différent ? Comment se démarquer pour frapper le lecteur ? Je pense que l'auteur ne s'est justement pas posée toutes ses questions, elle s'est juste contentée de nous livrer son propre deuil, sa façon à elle de vivre ce moment si particulier qu'est la perte d'un père, et c'est en ça que réside, à mon sens, la force de se livre. Une histoire écrite avec beaucoup d'humilité, de simplicité, qui va droit à l'essentiel et qui ne s'encombre pas de phrases larmoyantes ou déjà vues. Cette narration de scènes que chacun est amenée à vivre un jour, l'hôpital, la confrontation avec les pompes funèbres puis avec la maison, témoin de notre jeunesse perdue et de nos parents perdus, tout cela servi sous la plume d'une personne comme vous et moi, qui rend un dernier hommage, à travers cette écriture si précise et délicate, à ce père qui n'a pas fait l’unanimité de son vivant. Ce sont des mots de la fille au père, qui retracent un deuil mais aussi la vie d'un homme secret, aux multiples facettes, un homme qui n'avait rien d'extraordinaire, un homme fragile comme vous et moi. La mère, qui elle, a fait l'unanimité de son vivant n'est quasiment pas présente et c'est tant mieux, on se concentre sur l'essentiel, on se forge notre propre avis sur le héros de ces quelques pages.

De ces 138 pages, peu nombreuses mais ô combien percutantes, j'ai tout aimé. J'ai aimé le ton employé, oscillant entre mélancolie, tristesse, et humour lors de la narration de certaines scènes. J'ai aimé la simplicité des faits rapportés, me projetant lorsque je serai malheureusement à la place de la narratrice. J'ai aimé le portrait qu'elle dresse de son père, pas de blanc ou noir, juste un portrait plein de nuances et d'affection. J'ai aimé toute l'émotion que j'ai ressentie. Certains passages ont même déclenché quelques envies de larmes, même lorsque je rédige cet article. J'ai particulièrement été émue par la lettre de Juliette, amie amante du père, qui écrit et décrit à Anne la vraie personnalité de son père, une lettre, toujours simple mais gorgée d'une tendresse si pudique qu'elle nous décroche quelques soupirs accompagnés de larmes. Dans ces quelques pages, j'ai vu la fragilité humaine, qui vacille lorsque de tels événements nous frappent et qui se débarrasse enfin du patchwork social pour se laisser aller à des émotions primaires. 

Je crois que je ne peux pas être plus claire dans mes propos, je vous conseille vraiment ce premier roman d'Anne PAULY. Malgré ce thème du deuil, le livre n'est pas triste, mais plutôt émouvant et authentique. Et parfois, ça fait du bien de se plonger dans une certaine mélancolie, qui va de pair avec la saison automnale qui plus est !
Dernières infos.

Avant que j'oublie a été publié en 2019 aux éditions Verdier. Il compte 138 pages.

Ma note.

samedi 26 octobre 2019

Ce qui compte vraiment - Fabrice Nicolino

En résumé.

Fabrice NICOLINO, journaliste reporter, qui s'est spécialisé au fil de sa carrière dans la défense de l'environnement, signe un nouvel essai dans lequel il aborde des questions majeures, qui nous regardent tous et auxquelles il est urgent de répondre. Chaque chapitre est consacré à une grande cause, comme par exemple la place de l'agriculture et de ceux qui la pratiquent dans nos quotidiens, la menace qui pèse sur les mers et les océans, la disparition de quantité d'animaux et le rôle primordial de notre environnement naturel dans la survie de l'espèce humaine. Cependant, ce livre n'est pas une simple énumération de tout ce qui ne va pas, l'auteur propose des solutions à chaque problème mis en évidence.

Mon avis.

Si vous avez déjà pris quelques minutes pour vous balader sur ce blog, vous aurez très certainement noté que je suis une véritable groupie de Fabrice NICOLINO. Je l'ai découvert avec son livre "Un empoisonnement universel - comment les produits chimiques ont envahi la planète" puis j'ai eu l'occasion de lire deux autres de ses bouquins (un sur les pesticides, l'autre sur les biocarburants). Celui-ci est donc mon quatrième livre de sa bibliographie assez conséquente, livre offert par mon amoureux, parfois jaloux de toute l'admiration que je porte à ce grand reporter.

Il y a principalement deux raisons qui expliquent cette admiration :
  1. Fabrice NICOLINO écrit très bien, c'est fluide, on comprend tout alors que les faits sont parfois complexes, on ne s'ennuie pas, c'est bref, c'est concis et c'est percutant. Bref, ça se lit comme un vrai polar, sauf qu'ici on est dans la réalité, pour notre plus grand malheur.
  2. Ses bouquins sont toujours très bien documentés. Non seulement il fait appel à de nombreuses études scientifiques pour justifier ses dires, mais il n'hésite pas non plus à étayer ses propos avec des références à des éléments de la culture populaire. Je suis toujours ébahie devant cette somme de connaissances qu'il nous livre, sans prétention.
Ce qui compte vraiment réunit lui aussi tout ce que j'aime chez cet auteur. Je l'ai dévoré, comme tous les autres, parcouru en quelques heures le soir, dans mon lit, alors que mes journées ne me laissent plus d'énergie cognitive pour me prendre le rond sur comment tourne notre monde. Et pourtant, pas de prise de tête pour moi, au contraire, du réconfort de lire une personne qui pense, qui réfléchit, qui se documente, qui est sincère et qui dit des choses vraies, simples et justes. Du réconfort de me dire que je ne suis pas la seule à ruminer tout ça. Du réconfort de trouver quelqu'un qui est d'accord avec mes idées, sauf que lui est capable de les exprimer de façon percutante. Bref, du réconfort avant de m'endormir, avant de me réveiller pour aller casser ma croûte pour consommer, pour continuer à polluer ce vaste monde et mettre en péril l'espèce humaine.

Oui, du réconfort, et pourtant Fabrice NICOLINO n'amène pas grand chose de neuf dans ce livre, si on en a déjà lu quelques uns de lui auparavant. Les pesticides, comment ils sont partout, combien ils sont dangereux et à quel point il est compliqué de les éradiquer. Les océans, le plastique qui s'infiltre partout, les poissons qui en meurent, et nous avec. Les animaux qui disparaissent, les insectes qui ne sont plus, les abeilles que l'on commence déjà à remplacer par la main de l'homme tellement il n'y en a plus, et le pire, c'est que ça ne choque quasiment personne. Mère Nature, que l'on doit respecter, qui est à l'origine de tout, sans qui rien ne serait possible, cet équilibre miraculeux des éléments qui permet la vie, ça, j'en étais déjà convaincu. Alors la nouveauté de ces quelques pages ne résiderait-elle pas dans les solutions que l'auteur propose ? Oui et non. Les solutions qu'il amène sont bien évidemment fondamentales. Une charte universelle pour garantir l'importance d'une agriculture saine et du rôle des paysans ? Bien sûr, je signe de suite ! Une charte universelle pour le respect de tous les éléments naturels (eau, forêt, montagne, cailloux, bec de flamant rose, trompe d'éléphant, pois de coccinelle) ? Bien sûr, je signe tout de suite ! Mais je pense que ces solutions, même si elles sont à la racine de tout le reste, ne vont pas parler aux gens, à ces gens qui ont besoin de concret, à qui il faut parler de chiffres, d'efficacité, de tableaux Excel et de prix des efforts. Les solutions qu'il aborde sont d'ordre philosophique, primordiales mais à combien de gens pourront-elles parler ?

Un livre qui rappelle des choses essentielles, que l'on sait parfois déjà, mais qu'il est bon de réentendre, rien que pour se rassurer et ne pas se sentir seul dans sa folie de penser que l'avion ne doit pas continuer à prospérer, que la croissance n'est pas la clé de nos problématiques actuelles, ni nos modes de consommation d'ailleurs, que les mangues et les noix de coco ne doivent pas être disponibles toujours et partout et que 58 T-shirts dans sa garde-robe ne servent à rien, sinon à détruire des vies à l'autre bout de la planète. Pas de grande révélation mais la certitude que les choses doivent changer.
Dernières infos.

Ce qui compte vraiment a été publié en 2017 aux éditions Les liens qui libèrent. Il compte 216 pages. Si ce sujet vous intéresse, si l'auteur vous intéresse, si votre santé vous intéresse, si l'avenir de la vie humaine vous intéresse et si la diversité animale et végétale vous intéresse, Fabrice NICOLINO est l'un des fondateurs du mouvement "Nous voulons des coquelicots" dont l'objectif est l'interdiction de tous les pesticides de synthèse. C'est simple, il suffit de signer l'appel à cette adresse : https://nousvoulonsdescoquelicots.org/l-appel/ Il y a plein d'autres informations sur le site et il est notamment possible de se rassembler partout en France pour évoquer cette problématique avec d'autres personnes engagées dans cette lutte de la plus haute importance. Personnellement, je n'ai pas encore participé aux rassemblements mais j'ai signé ! A votre tour ! Et si vous n'êtes pas encore convaincus ou si vous voulez d'autres infos, un petit lien vers un podcast d'une émission consacrée à ce sujet et diffusée sur France Inter : https://www.franceinter.fr/emissions/le-nouveau-rendez-vous/le-nouveau-rendez-vous-08-janvier-2019

Ma note.

samedi 19 octobre 2019

Chagrin d'école - Daniel Pennac

En résumé.

Un énième livre sur l'école ? Non, plutôt un premier livre sur le cancre, cet individu indésirable, souvent placé au fond de la classe, et promu à un avenir indésirable lui aussi. Daniel PENACCHIONI, l'auteur célèbre, notamment connu pour la saga des Malaussène fait part ici de son passé de cancre, mais aussi de son présent de professeur et du chemin qui l'a conduit de l'un à l'autre, de ces professeurs salutaires, qui ont su le tirer de ce mal-être de cancre qui l'a poursuivi pendant des années. Cette autobiographie est entrecoupée de réflexions de l'auteur sur, entre autres, le système scolaire actuel, l'évolution de la place d'élève au cours des dernières décennies et le métier d'enseignant, le vrai, celui qui ose s'intéresser vraiment à ces élèves.

Mon avis.

En ces temps de rentrée - même si un mois est déjà passé, déjà - j'avais envie, en tant que lectrice mais aussi en tant qu'enseignante, de me plonger dans un bouquin sur l'école. Celui-ci avait rejoint ma PAL cet été après une razzia dans une ressourcerie comme on les connaît dans le Nord, c'était donc l'occasion de l'en sortir. De Daniel PENNAC, je connaissais surtout le premier tome des Mallaussène, Au bonheur des ogres, que j'avais aimé, sans plus mais qu'il faudrait que je relise, car j'avais eu le sentiment de passer à côté de ma lecture. Je fus donc ravie de retenter l'expérience Daniel PENNAC avec ce livre, très célèbre, Chagrin d'école.

Lors de ma lecture, je fus un peu déroutée par l'agencement des divers chapitres et des diverses anecdotes. Moi qui pensais avoir affaire à une autobiographie de bout en bout, avec pour commencement, les débuts difficiles de l'auteur à l'école et pour fin sa réussite en tant que professeur de français et auteur renommé, je fus surprise que tout soit mélangé. Les passages personnels côtoient des passages réflexifs sur le système scolaire, l'auteur part parfois dans des digressions qui ont pu me perdre et m'ennuyer à certains moments. Les deux dimensions sont intéressantes et se nourrissent l'une l'autre mais une meilleure organisation de leur narration m'aurait peut-être davantage aidéE à entrer dans cette lecture, que j'ai parfois plus balayé que lu.

Si certains passages m'ont laissée de marbre (je pense notamment à la longue digression sur la signification du "y" dans la langue française), d'autres m'ont captivée et m'ont fait réfléchir à l'élève que j'ai été et à l'enseignante que je suis. J'ai d'abord aimé la définition qu'il donne du cancre : non pas cet élève qui refuse l'école, moqueur, parfois violent avec ses camarades et ses professeurs, mais cet élève qui se donne les moyens de réussir mais qui n'y arrive pas, qui ne comprend pas ce qui lui est expliqué ou ce qui lui est demandé. C'est une définition que je trouve par ailleurs émouvante, car j'imagine bien tous ces élèves (et j'en ai côtoyés durant ma scolarité) qui font des efforts surhumains pour correspondre aux attentes de leurs parents, de l'école mais aussi de la société, et qui peinent toujours à atteindre la moyenne, souvent laissés de côté par ces diverses instances alors que leur confiance en eux s'érode, sans compter l'impact de cette souffrance sur la construction de soi et de son avenir. J'ai aussi aimé le passage où il évoque le métier d'enseignant. Il explique très justement à mon sens que ce qui caractérise le bon professeur, c'est sa capacité à deviner avec précision les difficultés de ses élèves et à y remédier, détricoter ce qui a été tricoté pour fabriquer un nouveau pull, plus solide. La difficulté de ce métier ne réside pas dans la transmission de savoirs, savoir-faire et savoir-être mais plutôt dans la compréhension des difficultés des élèves et des moyens, parfois novateurs, pour les contourner. Ce sont ces quelques (rares) professeurs, exerçant leur métier avec passion et finesse qui ont d'ailleurs sorti l'auteur de sa spirale infernale. Enfin, j'ai aimé toute la réflexion qu'il a sur l'élève client et la place de l'enfant en tant que consommateur, au même titre que l'adulte qui possède les revenus. Dans ces mêmes chapitres, il aborde également le désir d'avoir des enfants - désir dont les mécanismes sous-jacents ont bien évolué au cours de ces dernières décennies.

En conclusion, une lecture un peu mitigée, qui m'a déçue du point de vue narratif, avec cette organisation un peu brouillonne du récit, mais plusieurs passages m'ont vraiment marquée et j'y pense encore alors que j'ai refermé ce livre il y a déjà plusieurs semaines. Je vous le conseillerais donc si vous vous intéressez un minimum à l'école et à son univers, sinon passez votre chemin !
Dernières infos.

Chagrin d'école a été publié en 2007 aux éditions Gallimard et compte 298 pages. Il obtint le prix Renaudot en 2007.

Ma note.

dimanche 15 septembre 2019

On la trouvait plutôt jolie - Michel Bussi

En résumé.

Originaire du Mali, mère célibataire de trois enfants, Bamby (21 ans), Alpha (17 ans) et Tidiane (10 ans), Leyli MAAL est femme de ménage dans un Hôtel Ibis de Port-de-Bouc, près de Marseille. Leyli MAAL est une battante, pour elle, pour ses enfants, pour ses parents, elle à qui la vie n'a pas fait de cadeaux, elle qui cache un si grand secret qu'elle ne livre qu'aux plus proches de son entourage. Alors qu'elle se démène dans son quotidien, à sauver les apparences pour mieux protéger son jardin secret, on apprend qu'un crime est commis dans une chambre d'hôtel du Red Corner Hôtel. Un employé de Vogelzug, association qui vient en aide aux migrants est en effet retrouvé mort après que l'assassin ait prélevé sur lui une importante quantité de sang. Petar VELIKA, policier et son subalterne Julo FLORES sont immédiatement dépêchés sur l'affaire. Ce n'est que le début d'une longue enquête, ponctuée par d'autres meurtres similaires commis aux quatre coins du globe. Une longue enquête qui va aussi resserrer les liens autour de ces divers personnages, jusqu'à la découverte du secret de Leyli MAAL.

Mon avis.

Après avoir lu du même auteur Le temps est assassin au cours de l'été 2017, Un avion sans elle l'été dernier, j'ai enchaîné cet été avec On la trouvait plutôt jolie, titre (peut-être même histoire) inspiré par le titre de Pierre PERRET, Lily. Ce livre fut une jolie trouvaille car il provient d'une boîte à livres où je l'ai trouvé intact, comme s'il venait d'être acheté ! Moi qui comptais bien faire une pause avec mes lectures estivales, quasiment toutes orientées vers le continent africain et l'immigration, je fus un peu frustrée quand j'ai découvert qu'il s'agissait dans ce livre aussi d'Afrique puisque la famille MAAL est originaire du Mali et d'immigration. Il y a des thèmes comme ça qui vous poursuivent pendant une certaine pèriode...

Dès les premières pages, je me suis laissée happer par l'histoire de Leyli MAAL. Il faut dire que l'auteur n'attend pas 15 chapitres pour installer du suspense. Non, celui-ci est présent dès le départ avec cette histoire de crime dans une chambre d'hôtel. Les personnages sont ainsi vite introduits, et le lecteur peut commencer à suspecter les uns, les autres. Aussi, le fameux secret de Leyli est amené sur la table très rapidement, et inévitablement, il suscite notre curiosité. Pour mieux entretenir ce suspense et le laisser traîner, le récit de l'enquête est entrecoupé de passages dédiés au passé de cette femme fascinée par les chouettes (d'où la couverture) mais aussi de quelques épisodes consacrés au fantasque directeur de l'hôtel dans lequel travaille Leyli. Je me suis attachée aux personnages, en particulier j'ai éprouvé beaucoup de peine pour la protagoniste qui a eu une vie extrêmement violente, peut-être la porte-parole de centaines de migrants dont le passé doit être à peu prés équivalent au sien. J'ai également bien aimé le directeur de l'Ibis qui devient peu à peu son confident, ses parents qui sont remplis de tendresse et le petit dernier, Tidiane, tout innocent et pourtant enjeu de vengeance, le flic Julio FLORES, un peu innocent et qui a l'air tout miel mais dont l'humanité et la perspicacité ne font pas débat. En revanche, j'ai moins été séduite par le personnage de Bamby, pas en raison des actes dont elle est responsable mais plutôt par ce qu'elle renvoie.

Le scenario est bien mené jusqu'à moitié livre, puis je trouve que le soufflet retombe. Déjà, l'histoire se répète un peu, on s'enlise dans des faits qui ont déjà été mis en avant, exploités et expliqués à plusieurs reprises. J'ai été, comme plusieurs lecteurs (à ce que j'ai pu voir en farfouillant rapidement la toile), frustrée et déçue par le dénouement. Déjà, l'assassin est tout trouvé dés le départ et le twist final (car il y en a bien un) est vite évacué. Du moins, c'est l'impression que j'en ai eu. Ainsi je me suis dit "tout ça pour ça", l'histoire aurait certainement pu être rabottée à 400 pages et ç'aurait été tout aussi bien. De même, j'ai l'impression d'être passée à côté de la problématique des migrants posé par le livre. Je pense que le problème ne vient pas du livre en lui-même mais de ma lecture qui a été en pointillés vers la fin par manque de temps, ou d'énergie après des journées de boulot fatiguantes. Peut-être donc que je n'ai pas bien suivi le déroulement de l'affaire mais je n'ai pas bien compris toutes les malversations de Vogelzug vis-à-vis des migrants. Un sentiment d'inachevé donc, qui me fait dire que la question des migrants, bien qu'elle occupe une place importante dans le récit, n'en est pourtant pas l'épicentre. J'ai davantage placé au coeur de ma lecture l'histoire autour de Leyli MAAL. J'ai fait de la lecture de On la trouvait plutôt jolie une lecture avant tout fictionnelle et non politique. 

Ce compte-rendu touche à sa fin. Bien que déçue par deux trois petites choses, je vous conseille quand même ce livre car il a le mérite de proposer une histoire intéressante, à suspense dès le départ et c'est le genre de lecture toujours agréable lorsqu'on a besoin de se vider la tête et de se laisser entraîner dans un récit entêtant.
Dernières infos.

On la trouvait plutôt jolie a été publié en 2017 et compte 537 pages pour la version poche. Un petit lien vers la chanson de Pierre PERRET : https://www.youtube.com/watch?v=urVfi9Yswaw

Ma note.

samedi 24 août 2019

L'adieu à la femme rouge - Vénus Khoury-Ghata

En résumé.

La femme rouge nous ses cheveux près d'un cours d'eau en Mauritanie. La femme rouge avance dans la vie avec ses deux enfants, Zeit et Zina et son mari qui n'a rien de plus à lui offrir qu'une humble case à l'ombre d'un figuier. Si la femme rouge est une femme mystérieuse qui ne dévoile rien sur qui elle est, elle rêve néanmoins d'être quelqu'un d'autre. C'est donc tout naturellement qu'elle s'échappe, à l'abri des regards, en compagnie d'un photographe venu d'ailleurs. Passé le stade de l'incompréhension, le père et les enfants se lancent à la poursuite de la femme rouge, de l'épouse, de la mère. Ce périple les conduira jusqu'en Espagne où ils la retrouveront sur des affiches plaquardées sur tous les murs de la ville. La femme rouge est passée à autre chose et eux doivent survivre dans cette jeungle qui laisse peu de place aux clandestins.

Mon avis.

Voici un tout petit livre que je me suis procurée dans une sorte de magasin de seconde main. Toujours dans ma période "lectures d'Afrique", autant vous dire que je me suis laissée avoir par la couverture explicite. A la lecture du nom de l'auteur, je pensais que cette dernière était africaine et qu'elle avait écrit sur son pays, la Mauritanie. Or, après quelques recherches, j'appris que Vénus KHOURY-GHATA est née et a grandi au Liban, puis elle a rejoint la France afin de fuir la guerre dans son pays. J'ai également appris qu'elle a reçu le prix de l'Académie Française en 2009 puis le prix Goncourt en 2011 pour ses poèmes. 

Ici, il n'est pas question de poésie. Cette histoire est plutôt une façon originale de parler d'immigration. La femme rouge, dont on ne sait quasiment rien, incarne le rêve de milliers de personnes venues d'Afrique de devenir quelqu'un d'autre, d'être sous les feux des projecteurs, d'attirer l'attention, de façon positive, sur qui ils sont. Justement parce qu'aucun détail n'est donné sur elle, on peut imaginer n'importe qui à sa place. Dans un premier temps, ses rêves de femme libre et adulée sont exaucés, grâce à ces hommes, photographe, écrivain, qui la mettent en valeur, qui voient en elle une beauté incomparable. Puis le rêve tourne au vinaigre, lorsque le réel reprend ses droits, lorsque la femme rouge comprend que rien n'est acquis et que la société de consommation, si mouvante, si instable, balaye à un rythme effréné les modes, le sens même de la beauté, elle n'écoute pas les désirs d'une femme venu d'un petit village à l'autre bout du globe. J'y ai vu un parallèle avec la lutte que mènent les migrants pour atteindre le sol européen, entre le départ vers un eldorado fantasmé, puis l'euphorie de l'arrivée, l'euphorie d'avoir échappé à la mort, puis le retour, cruel, à la réalité, où les lois européennes laissent de côté ceux qui ne sont pas nés au bon endroit. 

J'ai aimé lire ces quelques pages, bien construites, dont toute l'histoire tourne autour de cette femme qui reste pourtant invisible, puisqu'elle ne s'exprime pas, et semble tellement prise dans cette envie d'autre chose qu'elle demeure complétement fermée à son passé. Elle est tellement présente qu'on n'en oublierait presque les personnages secondaires qui sont pourtant eux aussi très présents. L'amour qu'ils portent à cette femme est inconditionnel, du moins il justifie leur périple, l'abandon de leurs terres natales pour des contrées hostiles, où survivre dans la rue est une lutte de chaque instant. Même si la volonté de l'auteur est peut-être d'attirer l'attention sur la mère, j'ai particulièrement aimé le père, qui m'a fait l'effet d'un homme pur, dépassé par le comportement de son épouse mais qui ne renonce jamais à l'espoir de la ramener chez lui. Les deux enfants m'ont moins marquée, en particulier Zina dont je ne comprends pas bien l'évolution au fil du roman. Toutefois, on ne peut éprouver que de la peine pour ces jumeaux jetés et reniés par cette mère toujours aveuglée, mue par le désir de reconnaissance.

Ce roman fut l'objet d'une lecture agréable, rapide et sans fausse note. Pour autant, je pense que je l'aurai oublié d'ici quelques mois. C'est le genre de roman que l'on est content d'avoir lu mais dont on ne garde pas une trace indélébile. Je pense que ce récit doit poursuivre sa route et je le déposerai dès que possible dans une boîte à livres, afin qu'il rejoigne d'autres mains lectrices.
Dernières infos.

L'adieu à la femme rouge a été publié en 2017 et compte 192 pages. En cherchant quelques informations pour cette chronique, je suis tombée sur cette émission de Frane Inter consacrée à ce livre. Je ne l'ai pas encore écoutée mais j'y vais de ce pas !

Ma note.

vendredi 16 août 2019

Il nous faut de nouveaux noms - NoViolet Bulawayo

En résumé.

Chérie est une petite fille de 10 ans qui habite le Zimbabwe. Avec ses nombreux amis, elle aime inventer des jeux et aller voler des goyaves sur les terres des riches propriétaires aux alentours du bidonville où elle vit. Cela pour oublier l'horreur : une maison rasée, un père parti en Afrique du Sud, une mère qui "vend des choses" à la frontière et qui peut s'absenter plusieurs semaines, une grand-mères adepte de coutumes religieuses douteuses, sa copine enceinte à 10 ans, les multiples tensions dans le pays et la misère, toujours la misère. Arrivée à l'adolescence, Chérie parvient à rejoindre sa tante qui habite Détroit aux Etats-Unis. L'arrivée sur ces nouvelles terres représente de nouveaux obstacles à franchir, Chérie va devoir se construire en tant que femme, loin de ses proches, loin de sa terre natale, et l'on ne peut imaginer à quel point ce ne sera pas facile.

Mon avis. 

Je poursuis sur ma lancée, mon envie de découvrir des histoires venues d'Afrique et écrites par des auteurs africains. J'ai croisé la route de ce livre au détour d'une énième visite sur l'excellentissime blog A l'horizon des mots, qui foisonne de lectures fortes et peu connues. J'ai une fois de plus été séduite par le billet de l'hôte de ses bois, toujours aussi précis dans l'écriture et me voilà qui boucle mes valises pour le Zimbabwe, pays à l'histoire tragique.

Ce livre, peu visible sur la blogosphère, a néanmoins été très apprécié par tous les lecteurs qui ont tourné ses pages. Malgré ces belles promesses et le résumé qui donne envie, je dois avouer que je suis restée sur ma fin, sans trop définir pour autant l'origine du couac. Le style d'écriture est fluide, agréable à parcourir, l'histoire est rythmée, avec cette première partie dédiée à la vie de Chérie au Zimbabwe alors que la seconde partie nous amène aux Etats-Unis et toutes nos cordes sensibles sont branchées sur le mode vibreur. Toutefois, gourmande que je suis, j'aurais aimé plus, plus de détails, plus de précision dans les événements narrés et dans la vie des personnages. Les épisodes de la vie de la jeune fille sont trop vite balayés à mon goût, ils relèvent plus de l'anecdote que de la pierre qui participe à la construction du livre. J'aurais surtout aimé en apprendre davantage sur l'histoire politique du pays. On sent bien les querelles entre Noirs et Blancs, le passé colonial qui est toujours là, latent, qui ne quitte pas ces générations traumatisées, on devine aussi les tensions qui agitent les clans qui se disputent désormais le pays mais tout ça reste flou. J'aurais aimé que l'auteur précise les faits, sans trop en dire non plus car nous ne sommes pas dans un roman historique mais suffisemment pour situer l'histoire dans son temps, en gardant à l'esprit tous les éléments de contexte. Ainsi, j'ai dû aller faire quelques recherches pour en savoir plus sur le Zimbabwe, en ressortant de tout cela un peu frustrée, car n'ayant pas le courage de m'enfiler de longs pavés encyclopédiques. Je ne me suis pas non plus attachée aux personnages, que ce soit les personnages secondaires comme les amis de la jeune fille ou les membres de sa famille ou Chérie elle-même que je ne suis pas parvenue à cerner, entre la petite fille qu'elle était et la jeune femme qu'elle est devenue après son arrivée au Etats-Unis. 

Ainsi, je reste sur une impression de lecture superficielle, dont je garderai certains paysages en tête mais dont j'oublierai tout le reste. Peut-être que j'en attendais trop, que j'aurais dû me laisser davantage porter par le récit de Chérie, sans trop me poser de questions, ou peut-être encore que ce n'était pas le bon moment pour cette lecture. Ou peut-être que c'est comme ça, on adhère à certaines lectures et d'autres nous laissent de marbre, on ne peut pas toujours donner une raison à tout. Malgré cette déception teintée d'amertume, je décide d'octroyer à ce livre un trois fleurs car il est à mon avis important que des auteurs, originaires d'Afrique continuent à s'exprimer sur ces thèmes-là, en ces termes parfois crus et violents mais tellement vrais et d'actualité. Même si je ne me laisse pas toujours emportée par les récits proposés, je suis toujours heureuse de tomber sur ce genre de livres qui nous amènent ailleurs, qui nous ouvrent les yeux sur des préoccupations différentes des nôtres et peut-être plus essentielles et qui nous sortent de nos sentiers battus. Pour toutes ces raisons, je vous encourage à vous plonger dans Il nous faut de nouveaux noms, rien que pour la leçon de vie qu'il nous offre.
Dernières infos.

Il nous faut de nouveaux noms a été publié en 2014 pour la version française et compte 285 pages.

Ma note.

samedi 20 juillet 2019

La cité de la joie - Dominique Lapierre

En résumé.

Inde, dans les années 80. Le paysan Hasari Pal, sa femme et ses trois enfants sont contraints de quitter leur campagne du Bengale occidental (Etat au nord-est de l'Inde) suite à la sécheresse qui les prive d'une denrée rare, le riz. Comme des milliers de paysans affamés, de plus en plus dépendants d'un climat capricieux, la famille rejoint l'immense métropole de Calcutta dont on dit qu'elle est l'Eldorado pour gagner quelques roupies qui feront vivre ceux restés au village. Seulement, c'est bien connu, la réalité est souvent très éloigné de la légende. Il faut d'abord trouver un logement, un bout de trottoir dans ce dédales de rues squattées par des hommes et des femmes décharnés, en quête de la moindre roupie qui prolongera de quelques heures leur survie. Puis il faudra trouver un travail au milieu de tous ces hommes qui sont venus chercher la même chose dans cette ville gargantuesque. 

Dans le même temps, Paul Lambert, un missionnaire originaire du Nord de la France arrive à quelques encablures du domicile de fortune des Pal, dans la Cité de la joie, lieu au titre évocateur mais qui n'est rien d'autre qu'un slum, un bidonville où la misère atteint son paroxysme. Le prêtre, venu à la rencontre des habitants de ce champ de ruine, va progressivement devenir un acteur clé de la vie du slum.

Mon avis.

Après Joseph KESSEL et son Kenya enchanteur, je poursuis ce tour du monde littéraire improvisé avec la découverte des faubourgs de Calcutta. J'ai découvert ce livre dans une petite pépite qui vient tout juste de sortir, Bibliothérapie, une compilation littéraire de 500 titres classés dans différentes catégories et dont l'objectif est de nous faire du bien, à travers la lecture. A la fin de l'ouvrage, figurent quelques entretiens avec des célébrités qui proposent des références qui les ont marquées. Parmi ces grands noms, Hélène Darroze, chef cuisinier très médiatisée présente, pour la catégorie "voyage" La cité de la joie comme un livre magistral qui l'a secouée et qui a participé de sa passion pour ce pays aux mille couleurs, l'Inde. Je ne sais pas pourquoi, peut-être la façon dont elle en parle, le thème, les commentaires très enthousiastes, m'ont donné très envie de découvrir ce livre qui fut un best-seller à sa sortie, en 1985.

Cette histoire fait partie de cette catégorie de livres s'inspirant de faits aussi réels que dramatiques qu'il est compliqué de chroniquer. Comment critiquer un livre aussi vrai, qui nous parle de tous ces gens qui survivent dans la misère la plus noire, sans rien demander à ceux qui possèdent tout ? Comment critiquer un auteur qui a enquêté pendant deux ans, qui a vécu dans la Cité de la joie, qui a partagé le quotidien de ses habitants pour nous offrir une tranche d'humanité d'une rare authenticité ? Je vais donc principalement évoquer ici mon ressenti à la lecture de ce livre.

Comme beaucoup de lecteurs, je pense que ce livre est une pépite, peu connue, mais qu'il faudrait mettre dans les mains du plus grand nombre. De ce que j'ai pu lire à droite à gauche, une grande partie du lectorat semble avoir été séduit par l'aspect que l'on pourrait qualifier de religieux du livre, avec la mise en avant du partage, de l'espoir, de la générosité, de la foi qui ne quittent pas les habitants du bidonville, malgré leurs conditions de vie plus que précaires. Bien que cet aspect soit effectivement développé, j'ai davantage été frappée par les paradoxes que l'auteur met en avant. D'un côté, cette foi inébranlable et cette vénération de mille et un dieux, dont j'ai oublié les noms tellement ils sont nombreux, et d'un autre côté, cette accumulation de coups du sort, de misère qui heurtent sans arrêt et de plein fouet les habitants. D'un côté, l'entraide qui existe entre toutes ces personnes et d'un autre côté, ces réseaux d'escrocs qui n'ont aucun scrupule à exploiter les plus faibles en leur volant ce qu'ils ont de plus précieux, leur vie. 

De multiples émotions ont accompagné ma lecture de la Cité de la joie. Il y a eu l'espoir, vain, que tout cela s'arrange un jour, la tristesse lorsque les malheurs se succèdent et touchent des personnages auxquels on s'attache nécessairement, le dégoût lors de certains passages qui donnent juste envie de vomir (âmes sensibles s'abstenir), la haine contre la vie et l'Homme qui laisse faire ça, la rage contre nos comportements occidentaux qui ont des répercussions à l'autre bout de la planète et l'admiration devant un tel travail d'écrivain. En s'intéressant à la vie de personnes qui n'intéressent personne, Dominique LAPIERRE leur rend un vibrant hommage. Malgré leurs maladies, le sentiment de pitié qu'ils inspirent, leurs visages sales et leurs corps maigres, j'ai trouvé beaux et grands tous les hommes et femmes que j'ai croisés dans ces pages. Je me suis même dit que je n'étais rien à côté, moi qui vis dans mon confort et qui mange à ma faim.

Vous l'aurez compris, si vous avez le cœur et les émotions bien accrochés, je ne peux que vous conseiller cette lecture dont vous ne sortirez pas indemne.
Dernières infos.

La cité de la joie compte 623 pages (pour la version poche) et a été publié en 1985. Un film a été réalisé à partir de ce livre, en 1992. Le médecin américain qui fait son apparition en moitié de livre est incarné par Patrick Swayze (petit point gossip).

Ma note.

dimanche 7 juillet 2019

Le lion - Joseph Kessel

En résumé.

Cette histoire nous amène au Kenya, dans la réserve d'Ambolesi où sont protégées des milliers d'espèces sauvages. De passage dans ce lieu magique, le narrateur, voyageur venu d'Europe, fait la connaissance de l'homme qui est à la tête de ce parc, ainsi que de sa famille, dont fait partie Patricia, la petite fille qui a apprivoisé King, l'un des lions qui se posent en maîtres de la savane. Peu à peu, elle entraîne l'étranger sur des terres inconnues et l'initie à la communication avec les bêtes sauvages. Pourtant et malgré le calme qui règne en apparence sur ce territoire dominé par le Kilimandjaro, ni les hommes ni les bêtes ne sont à l'abri du danger...

Mon avis.

Comme je le répète souvent sur ce blog, je pense que le choix d'un livre doit être dicté par ses envies de lecture du moment. Or il se trouve qu'en ce moment, j'ai envie d'histoires se déroulant sur les terres africaines, peut-être à cause de l'été qui est bien là, peut-être à cause de cette chaleur qui me terrasse... Je suis donc partie l'autre jour à la bibliothèque avec une longue liste de bouquins correspondant à mes envies de lecture, élaborée à partir de chroniques lues à droite à gauche. Je suis revenue un peu bredouille mais mes yeux ont été attirés par un livre qui ne figurait pas sur la liste, ce classique, Le lion de Joseph KESSEL. Ni une ni deux, le voilà dans mon panier de lectrice compulsive !

Avant d'être écrivain de renom, membre de l'Académie française à partir de 1962, Joseph KESSEL est reporter. C'est ainsi qu'il prend la route dans les années cinquante pour le Kenya qui est alors secoué par la révolte Mau-Mau, mouvement insurrectionnel qui demande à libérer le pays du joug britannique. C'est de son passage sur ces terres kényanes que l'auteur tire son inspiration pour écrire Le lion, même si ce n'est qu'une infime partie de ce qu'il a pu voir là-bas. Ainsi, le narrateur se confond avec l'auteur lui-même, voyageur ébahi devant la faune et la flore du Parc Royal. C'est très certainement pour cette raison que nous nous sentons particulièrement dépaysés à la lecture de ce petit roman. Moi qui voulais voyager en Afrique à moindres frais, j'ai été plus que servie ! Les paysages sont longuement décrits, l'ambiance de la savane est fidèlement retranscrite et on est complètement immergé dans ces décors peu coutumiers. Un voyage dans l'espace mais aussi dans le temps puisque le Kenya est encore à cette époque une colonie britannique, ce qui se voit nettement au niveau des rapports entre Blancs et Noirs, où ces derniers occupent toujours la place des domestiques. On le voit aussi à la présence encore intacte des espaces sauvages, il n'est pas question de réchauffement climatique ni d'espèces en voie de disparition à cette époque-là ! Au contraire, on a l'impression de territoires luxuriants, que rien ne semble ébranler. Et puis enfin, les tribus (Kikuyu, Masaï) n'ont pas encore été décimées et vivent en harmonie avec leurs voisins les animaux. 

Même si le décor de l'histoire est basé sur des paysages réels, l'histoire en elle-même n'est que pure fiction. Et c'est là où j'ai été un peu moins emballée par ma lecture. Il faut dire qu'il ne se passe pas grand chose dans Le lion... Toute une première partie est juste dédiée à la narration d'une seule journée ! Alors on attend, on attend que les personnages s'animent et prennent vie dans ce décor qui devient un peu pesant. Les événements s'accélèrent quand même dans la deuxième partie, heureusement, et je dois avouer que la fin est très émouvante. Contrairement à de nombreux lecteurs, je ne l'ai pas vu venir et ce fut donc un réel moment d'émotion. Quant aux personnages, ils ne sont pas particulièrement attachants. J'ai vu à plusieurs reprises des lecteurs critiquer le comportement de la petite fille, Patricia, à juste titre je pense. Elle joue le rôle de l'enfant gâtée, un peu pédante mais elle peut également avoir de bons côtés, comme son désir de protéger à tout prix les animaux. Ses parents non plus ne manquent pas de relief dans leurs caractères. Ce sont pas leurs yeux que l'on se rend compte du danger qui rôde dans la savane, ils nous poussent à être inquiets pour les hommes et à se méfier des animaux. Enfin, il y a le peuple Masaï dont certaines coutumes sont décrites longuement, ce qui m'a bien plu d'ailleurs, ayant toujours été attirée par les coutumes d'ailleurs. Cette galerie de personnages est davantage développée que le lion lui-même, dont on parle beaucoup, qui est au centre du livre mais que l'on côtoie peu finalement. 

Ainsi, à mes yeux, Le lion est avant tout un récit de voyage, dans le temps et dans l'espace, une exploration ethnographique de ce territoire d'Afrique orientale. Prenez donc le temps de contempler cette faune sauvage désormais réduite en poussière et de faire connaissance avec ces personnages venus d'une autre époque ! Malgré un nombre de pages réduit, Le lion est une lecture de longue haleine.
Dernières infos.

Le lion compte 230 pages et a été publié en 1958. Je vous conseille une édition augmentée, qui propose un petit dossier permettant de resituer l’œuvre dans son temps, c'est toujours très intéressant ! Aussi, je vous mets un lien vers un petit reportage d'Arte, très sympathique car il explore les lieux dont Joseph KESSEL parle dans son livre. Conseil toutefois, à ne regardez qu'après la lecture du livre ! Je me suis bien spoilée à moitié livre, déjà qu'il ne se passe pas grand chose...

Ma note.

samedi 22 juin 2019

Les contes du chat perché - Marcel Aymé

En résumé.

Delphine et Marinette sont deux petites filles espiègles qui habitent une ferme extraordinaire - une ferme dans laquelle les animaux sont doués de parole. Bien loin des préoccupations scolaires ou des travaux des champs imposés par leurs parents, des fermiers rustres et peu enclins à la tendresse, nos deux héroïnes préfèrent s'amuser et converser avec leurs amis les animaux de la ferme. Dans chacun des dix-sept contes proposés par Marcel Aymé, elles s'allient à eux pour jouer de mauvais tours aux parents.

Mon avis.

Je vous propose une plongée dans le monde de l'enfance avec ce livre déniché dans une boîte à livres située dans un village voisin du mien. Dès que je l'ai aperçu, je me suis jetée dessus, guidée par mes souvenirs d'enfance, lorsque Les contes du chat perché étaient diffusés chaque matin ou chaque après-midi sur France 3. A l'époque, j'étais une véritable fan des aventures de Delphine et Marinette, ainsi que de leurs fidèles animaux. Une vingtaine d'années s'est écoulée depuis (ça y est, je parle comme une vieille personne) mais le plaisir de les retrouver est intact.

Ces contes s'adressent en premier lieu à un public jeunesse mais les adultes peuvent également y trouver leur bonheur. Personnellement, ils m'ont offert une pause dans mes lectures habituelles, un peu plus terre à terre. En grandissant, je me suis peu à peu éloignée de l'univers des contes et j'ai fini par oublier à quel point son format - de petites histoires (une vingtaine de pages) avec une morale à la fin - était appréciable. De ce que j'ai pu lire à droite à gauche, le dessin premier de l'auteur n'était pas de s'attarder sur la morale de chaque histoire. Pour autant, il y en a bien une. Elle est plus ou moins développée en fonction des contes. Parfois, elle m'est apparue clairement, comme dans le tout premier conte, La patte du chat, parfois je n'ai pas su la déceler. Toutefois, ce qui est certain, c'est que les enfants et les animaux, habituellement personnages naïfs et à éduquer, sont ici les éducateurs et les plus raisonnables, comparés au parents qui obéissent à leurs vils instincts et qui ont une vision purement capitaliste de leurs animaux, et même de leurs filles qui doivent absolument réussir à l'école et être utiles dans les travaux des champs. Ainsi, les deux univers s'affrontent, celui des affects, de la tendresse et celui de la logique économique.

Chaque conte peut être lu indépendamment des autres, il n'y a pas vraiment de fil rouge entre les dix-sept contes. Bien évidemment, on retrouve toujours Delphine et Marinette ainsi que les parents, qui ne sont d'ailleurs pas nommés, mais les animaux changent, ainsi que leur personnalité. En fait, chaque conte met en valeur un ou plusieurs animaux (par exemple : Le paon, Les bœufs, ...). Ceux-ci varient d'un conte à un autre. Au début de ma lecture, je les ai lus les uns après les autres puis arrivée en milieu de livre, j'ai éprouvé le besoin d'en lire un de temps et en temps et à côté, j'avais commencé un autre livre avec cette fois-ci, une véritable histoire. Ainsi, même si j'ai beaucoup aimé le format et le contenu de chaque conte, j'ai fini par m'en lasser mais cela ne m'a pas empêchée d'aller jusqu'au bout de ma lecture.

Un petit livre que je vous conseille si vous êtes plutôt d'humeur nostalgique, avec l'envie de retrouver vos souvenirs d'enfance. Ou bien si vous avez envie de lire de petits contes tout innocents et qui vous envelopperont de tendresse.
Dernières infos.

Les contes du chat perché ont été publiés en 1939 et comptent 378 pages. Après avoir cherché pendant de longues minutes sur la toile, peu d'adaptations en dessin animé sont encore disponibles, à mon plus grand regret.

Ma note.