La narratrice, dépourvue d'identité, si ce n'est qu'on apprend plus tard qu'elle se prénomme Defred, occupe le poste de servante au sein d'une maisonnée contrôlée par le Commandant et sa femme. La jeune ou peut-être vieille femme, puisqu'on ne sait rien de son âge, est tout de rouge vêtue, portant une longue robe et un masque sur le visage pour ne pas susciter le désir des hommes qu'elle croise. Pourtant, les occasions de croiser l'autre sexe se font rares : Defred, systématiquement accompagnée par une homologue d'une autre maison, ne sort que pour aller faire les courses. Sinon, elle attend toute la journée, enfermée dans sa chambre sans livre, sans objet car tous ont été supprimés pour ne pas leur offrir un moyen de mettre fin à leurs jours. Elle attend le soir pour remplir la fonction qui l'a amenée ici, celle de reproductrice. Les produits chimiques, les déchets radioactifs des bombes atomiques et autres cochonneries ont privé la plupart des femmes de leur fertilité. Seules quelques unes, qui se situent pourtant au bas de l'échelle sociale sont aptes à se reproduire avec le Commandant pour que l'épouse stérile s'occupe ensuite du bébé - seul espoir de vie dans ce monde déshumanisé. Oui, c'est horrible. Bienvenue dans le monde de la servante écarlate...
Mon avis.
La servante écarlate, publié en 1985, est le livre à la mode. Une série, que je n'ai pas vue, vient de reprendre cette dystopie, ressortant ainsi le livre des vieux tiroirs. Les critiques sont ici et là dithyrambiques, insistant sur le caractère prophétique de l'oeuvre. Face à cette vague d'enthousiasme mêlée d'angoisse, j'ai eu envie de me faire mon propre avis. Ça tombait bien, j'avais besoin d'un auteur en A pour poursuivre le challenge ABC dans lequel je me suis lancée en début d'année.
Tout comme certains autres lecteurs et lectrices, j'ai été déçue. A l'image du résumé que je vous sers plus haut, j'ai trouvé que l'histoire était beaucoup trop énigmatique. Les indices nous permettant de deviner les contours du régime dictatorial et liberticide sous lequel vit la narratrice sont distillés au compte-goutte. Au tout début, je me suis prise au jeu, j'avais envie de connaître la suite, alors je tournais les pages avec empressement. Arrivée à mi-lecture, j'ai commencé à me décourager. Bien sûr, les informations qu'elle nous donne au fur et à mesure font sens petit à petit mais il faut attendre la toute fin pour rassembler toutes les pièces du puzzle. Ce manque de précisions sur le contexte empêche de donner à cette dystopie toute la force qu'elle aurait mérité. Si j'avais eu plus d'analyse sur la dictature mise en place, sur le processus qui l'avait installée et sur le rôle des Yeux, j'aurais très certainement davantage accroché. J'ai donc trouvé que le tout est émaillé de quelques longueurs et répétitions. Heureusement, l'atmosphère dans laquelle on plonge dès les premières pages est efficace. On s'imagine sans mal un monde sombre, dont les seules touches de couleurs viennent des vêtements rouges des servantes, verts des Marthas et bleus des épouses. On se sent oppressé, parfois angoissé par la tournure des événements.
L'édition du livre que j'ai acheté a incorporé une postface de l'auteur particulièrement intéressante. Elle y explique pourquoi elle a choisi ce thème pour son roman, quelles ont été ses sources d'inspirations et quel sens elle a voulu donner à ce monde noir. Car évidemment, la force de ce livre, comme dans toute dystopie, est le message qui se cache derrière l'histoire de Defred. L'hypothèse de ce futur un peu effrayant est plus que jamais d'actualité. On parle de plus en plus de la responsabilité des perturbateurs endocriniens mais aussi des produits phytosanitaires dans les difficultés rencontrées par les couples pour avoir des enfants. Tout comme dans le cas de pénuries alimentaires, est-ce que nous irons nous battre pour le contrôle des ressources vitales ? Par ailleurs, et comme le dit très justement Margaret Atwood, tous les éléments de contrôle des libertés énoncés dans le livre ont déjà été employés à un moment donné de l'Histoire. Il ne faut pas oublier non plus, et j'ai failli le faire dans cette chronique, que le régime nouvellement installé, qui correspond au territoire américain, est contrôlé par des fanatiques. C'est le fondamentalisme religieux qui est à l'origine du coup d'Etat qui a mis fin à la démocratie occidentale telle qu'on la conçoit actuellement pour mettre en place cette dictature qui ne résume la femme qu'à sa fonction de reproductrice. Même si la dystopie appartient à la science-fiction, des pans voire l'histoire entière de Defred pourrait devenir réels. Au-delà de l'adaptation à l'écran, c'est très certainement parce que le risque est présent que le livre est victime de l'engouement actuel.
Si vous êtes intéressés par ces livres qui imaginent l'incarnation des dérives de nos régimes occidentaux actuels, alors je vous conseille celui-ci. Cependant, attendez-vous quand même à ne pas y trouver la force et la puissance espérées.
D'un coup d’œil, les plus, les moins.
+ Le caractère prophétique de l'oeuvre.
+ L'analyse de notre régime effectuée par Margaret Atwood pour proposer cette lecture des dérives possibles.
- Le manque de détails qui nous empêche de nous projeter complètement dans l'histoire jusqu'à sa fin.
- Manque de rythme, quelques longueurs et répétitions.
- La cruauté de ce futur ne se retrouve pas à la lecture. Le tout manque de force et de puissance.
Dernières infos.
La servante écarlate a été publié en 1985 et compte 483 pages. Elle a fait l'objet d'un film en 1990 et d'une adaptation en série en 2017.
Ma note.
Challenges.
* 100 romans à lire en 2017 - 44/100
* Défi lecture 2017 - Consigne 28: une dystopie. (38/80)
* ABC 2017 - Lettre A (22/26)
Ohlala, ton billet vient de faire diminuer mon envie de lire ce livre de moitié! Tes critiques ont l'air très pertinentes et me connaissant, ça risque du coup de pêcher pour moi aussi!
RépondreSupprimerEnfin, faudra bien que je me fasse un avis... La série est pour le coup, vraiment, mais VRAIMENT géniale (et complète parfaitement ce qui a pu te manquer dans le bouquin...)!
A plush!
C'est vrai que j'ai été un peu déçue (mais c'est aussi parce que j'en attendais beaucoup) mais je te conseille vraiment de le lire pour te faire ton avis, peut-être qu'il sera différent du mien et j'espère que tu seras agréablement surprise :) J'ai entendu beaucoup parler de la série, peut-être que je m'y mettrai dans le courant de l'année prochaine. En tout cas, merci du conseil!
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