dimanche 23 septembre 2018

Une histoire des abeilles - Maja Lunde

En résumé.

Angleterre, 1851. William a toujours rêvé de faire partie de ces scientifiques qui bouleversent le quotidien des gens grâce à leurs inventions. Après avoir eu de nombreux enfants, l'obligeant à prendre un job alimentaire, il a vu tous ses espoirs s'envoler en fumée. Il est aujourd'hui enlisé dans la dépression et ne parvient plus à sortir de son lit pour se confronter au monde extérieur. C'est Edmund, son fils, qui va lui donner la force de se relever, grâce à un livre sur les abeilles négligemment posé sur son bureau. William a alors l'idée de construire une ruche révolutionnaire pour épater son fils.

Ohio, 2007. George est à la tête d'une exploitation apicole en pleine cambrousse américaine. Passionné par son métier, il espère bien que son fils reprendra les rênes de l'entreprise. Seulement, Tom a d'autres projets, dont celui de devenir écrivain. Comme un malheur n'arrive jamais seul, les abeilles de George commencent à disparaître mystérieusement annonçant le début de l'Effondrement.

Chine, 2098. Les abeilles ayant disparu, hommes et femmes sont obligés de polliniser la nature à la main. Tao fait partie de ses ouvriers d'un nouveau genre. La disparition tragique de son fils, Wei-Wen, va la conduire jusqu'à Beijing, ville désormais déserte, pour obtenir enfin des réponses.

Mon avis.

Cela fait un moment que ce livre me faisait de l’œil, depuis sa publication lors de la rentrée littéraire 2017. Si vous avez eu l'occasion de vous balader sur ce blog, vous aurez très certainement deviné que l'environnement est un thème qui m'est cher. Ce livre, à la frontière entre fiction et réalité, avait donc tout pour me plaire, surtout que je n'avais jusqu'à présent rien lu sur la disparition des abeilles. Malheureusement, ce fut une déception et je vous explique pourquoi sans plus tarder.

Une histoire des abeilles est un livre riche, développé, détaillé et documenté. On sent bien que Maja Lunde, norvégienne de son état, a fait de multiples recherches pour informer le lecteur du rôle primordial des abeilles dans la pollinisation et par voie de conséquence, dans l'agriculture. Elle est même remontée aux origines des ruches, à travers le personnage de William Savage. J'ai même pensé qu'il faisait véritablement partie de l'histoire apicole mais après vérification, il n'est que fiction. Les trois personnages apportent de la robustesse au message écologique que souhaite faire passer l'auteur. La disparition des abeilles et ses multiples conséquences (économique, agricole, sociale) s'ancrent dans le réel, au niveau micro (George croule sous les dettes depuis qu'il ne peut plus faire travailler ses abeilles) mais aussi macro (en 2098, c'est la société entière qui est pénalisée par la disparition des insectes). En cela, le récit est efficace et touche n'importe quel lecteur, lui faisant prendre conscience de l'imminence et de l'ampleur de la catastrophe. Un autre thème abordé, outre les abeilles, est la relation filiale. Chaque personnage se débat avec sa descendance, avec plus ou moins de virulence. Dans tous les cas, il y a une volonté de transmettre le patrimoine des abeilles - peut-être que se cache ici la volonté de l'auteur de nous faire réaliser que chaque génération a un impact sur les conditions de vie des générations qui suivront. Ainsi, le destin des abeilles ne s'est pas décidé en une dizaine d'années. Il a été préparé pendant des siècles, au gré des multiples évolutions technologiques (ruches, pesticides, méthodes apicoles) qui ont eu un impact sur les abeilles. Ainsi, ce livre peut être appréhendé sous de multiples facettes et ne contient pas qu'un seul message, simpliste, mais plusieurs, qui doivent nous amener à nous interroger sur notre place en tant qu'habitant de ce monde ayant un rôle sur notre environnement mais aussi en tant qu'individu qui prépare l'avenir pour les générations futures.

Malgré la richesse du texte, je n'ai pas été entièrement convaincue par cette lecture. Si j'adhère au fond, c'est-à-dire au message développé par Maja Lunde, je n'ai pas été séduite par la forme. Le récit est pourtant dynamique, construit sur une alternance des points de vue des trois personnages. Par son ambiance un peu glauque et inquiétante, c'est l'histoire de Tao qui l'emporte sur les autres, colorant le livre d'une impression étrange, parfois oppressante, voire même angoissante (à raison, on parle quand même de la disparition des abeilles). Je ne me suis pas attachée aux personnages : William m'a paru très distant et froid, je n'ai pas compris les idées de George que je n'ai pas trouvé très intéressant et le personnage de Tao est noyée dans cette ambiance sordide. On reste confiné dans leurs quotidiens, alors que j'aurais imaginé que l'auteur nous parlerait davantage des conditions qui ont provoqué la disparition des abeilles et les luttes qui auraient pu voir le jour entre citoyens et entreprises pro produits phytosanitaires. J'aurais également aimé en savoir davantage sur l'Effondrement, ce point de bascule qui a changé complètement le visage d'une ville comme Beijing. Pour la faire courte, je trouve qu'il manque de la matière, ne serait-ce que pour approfondir les arguments et donner un contexte encore plus général à ce qui est déjà proposé.

Néanmoins, cela reste un livre à mettre entre toutes les mains, afin de sensibiliser le plus grand nombre à ce danger qui nous concerne tous. J'enjoins donc tout lecteur à ne pas passer à côté de cette lecture riche en réflexions !

D'un coup d’œil, les plus, les moins.

+ La richesse des thèmes abordés (disparition des abeilles et ses conséquences, poids de l'héritage, relations filiales)
+ L'organisation du récit qui se veut dynamique.
+ La part visionnaire : comment vivrions nous sans les abeilles ?

- L'ambiance parfois sordide.
- Des personnages pas particulièrement attachants.
- Certains volets auraient pu être plus approfondis.

Dernières infos.

Une histoire des abeilles a été publié en 2017 et compte 396 pages.

Ma note.

2 commentaires:

  1. Je l'ai aussi lu cette année et je suis d'accord avec toi : il est oppressant. À tel point que je repoussais parfois ma lecture.
    Toutefois, j'avais peur de tomber sur une lecture moralisatrice, ce n'est pas le cas. C'est peut-être pire.
    L'histoire de Tao est celle qui m'a le plus touchée également, même si c'était très "Walking Dead" comme ambiance...

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    1. Oui, oppressant parce que le sujet est lui-même oppressant. Même si j'ai eu quelques petites déceptions avec ce livre, je continue de penser que chaque habitant de cette Terre devrait le lire...

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