Suite au décès de sa grand-mère, une jeune femme hérite de la commode de cette dernière. Un meuble massif, qui en impose de part ce qu'il refoule du passé, un meuble aux neuf tiroirs, chacun arborant une couleur différente. La jeune femme prend le soin de dépiauter chaque compartiment, effleure du bout des doigts chaque objet, parcourt chaque morceau de papier pour enfin comprendre le passé de la défunte et jeter la lumière sur les secrets de famille tus depuis tellement longtemps. Une famille d'immigrés ayant fui la guerre civile d'Espagne alors que Franco s'emparait progressivement de chaque centimètre carré de leur territoire. La "abuela", cette femme à la fois si fragile et si forte, livre un à un ses mystères, depuis le départ de sa terre natale à la naissance de sa petite-fille, en passant par les histoires d'amour qui ont jalonné son existence mais aussi les désillusions, les malheurs et les difficultés à se faire une place dans son nouveau pays.
Mon avis.
J'ai toujours eu pour Olivia RUIZ une forme de sympathie. Déjà parce que nous sommes toutes les deux nées le même jour, à douze ans d'intervalle. Ensuite parce qu'elle a longtemps été la compagne de Mathias MALZIEU auquel je voue un vrai culte. Enfin parce que j'ai toujours apprécié son originalité et l'énergie qu'elle a mise dans ses premiers albums. J'étais donc pressée de la découvrir en tant qu'écrivaine. Autant vous le dire tout de suite, je n'ai pas été déçue du voyage et j'espère déjà qu'elle publiera très vite un nouveau roman.
Voilà un premier roman surprenant et presque déroutant. Son genre est difficile à identifier, puisqu'il se situe entre l'autobiographie et la fiction. Si Olivia RUIZ partage avec la narratrice un certain nombre de points communs, comme le fait d'être issue d'une famille qui a fui la guerre civile espagnole, d'autres faits sont purement inventés. Dans les interview qu'elle a donnés lors de la promotion de son livre, elle a pu expliquer que ses grands-parents ont toujours été secrets sur leur passé, et que cette histoire est en quelque sorte ce qu'elle aurait aimé qu'on lui dise, les femmes qu'elle décrit étant des symboles de courage et de liberté. J'ai vécu ma lecture comme une découverte des origines d'Olivia RUIZ alors qu'il faut garder en tête que tout cela est un peu romancé, même si le destin de Rita, la fameuse "abuela" est très certainement similaire au destin de milliers d'autres petites filles qui ont tout quitté pour se construire une nouvelle identité en France. Ce roman se conte à deux voix. La jeune femme s'exprime pour l'épilogue et le prologue, mais l'essentiel du corps du texte est conté par la grand-mère, chaque chapitre s'arrêtant sur un tiroir ouvert et un objet dévoilé. Le récit est assez court puisqu'il fait moins de 200 pages. C'est à la fois frustrant car on se sent tellement bien aux côtés des personnages qu'on a envie que ça dure le plus longtemps possible, mais cela permet d'un autre côté d'avoir un récit dynamique, sans aucune longueur.
C'est le deuxième roman que je lis sur le thème de la guerre civile espagnole, après avoir découvert Une dernière danse de Victoria HISLOP l'été dernier. Décidément, c'est un thème qui me parle et qui me plaît toujours autant. L'histoire de Rita m'a beaucoup émue et j'ai dû retenir mes larmes plusieurs fois au cours de ma lecture. Ce n'est en aucun cas un roman larmoyant ou tire-larme, mais le simple fait de s'attacher à ces personnages si humains et si simples dans leur façon d'être ne peut que nous provoquer une vive émotion. Le parcours de Rita est à son image, digne, courageux, mais aussi précaire et fragile. L'écriture d'Olivia RUIZ sert à la perfection ces personnages à la fois si vifs et si vulnérables. Malgré l'émotion qui m'a tenaillée jusqu'à la dernière page, les images qui me viennent immédiatement en tête lorsque je repense à ma lecture sont très colorées, une sensation de chaleur m'envahit, le soleil de Narbonne, le sourire de ces femmes déracinées, leur accent réprimé mais ayant conservé une forme d'impertinence, une musique joyeuse type guinguette et des décors des années 40/50, l'insouciance, voire la naïveté, le charme suranné de cette époque. Bien sûr, en toile de fond, il y a l'histoire avec un grand H, à l'origine de tous ces maux mais ce livre se concentre avant tout sur la petite histoire, celle des gens ordinaires et celle de ces femmes qui ont parfois dû mettre leur orgueil et leurs sentiments de côté pour continuer à vivre et donner du bonheur à leur descendance.
Je ne savais pas si je pouvais placer ce livre dans la catégorie des coups de cœur, mais une telle émotion à la lecture d'un livre n'arrive pas tous les jours, alors je dois m'avouer vaincue face au talent d'Olivia RUIZ et à la qualité de ce premier roman. J'espère qu'il inaugure une longue suite à venir... D'ici là, courez chez votre libraire ou dans votre médiathèque de quartier et lisez sans plus tarder La commode aux tiroirs de couleurs !
Dernières infos.
La commode aux tiroirs de couleurs a été publié en 2020 et compte 198 pages.
Ma note.
Challenges.
* 100 livres à lire en 2021 : 6/100
* Défi lecture 2021 : Consigne 82 - Un livre d'un auteur qui est né durant le même mois que vous - 6/100
* En 2021... Je voyage : France (+ 10 points)
Je ne savais pas que Olivia Ruiz avait écrit un livre! Il m'intéresse bien
RépondreSupprimerVraiment je te le conseille !
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