En résumé.
Alors qu'Hector, fils du roi Priam, rentre dans sa ville de Troie après une guerre harassante, un autre conflit est en train de voir le jour. Son frère Pâris a subtilisé Hélène à la beauté légendaire aux Grecs et refuse de leur rendre. Les Grecs, menés par le rusé Ulysse sont sur le point d'arriver avec leurs navires flamboyants. Les troyens doivent donc trouver une solution sans plus tarder : se lancer, ou pas, dans une énième guerre qui promet d'être sanguinaire. Deux camps s'affrontent : d'un côté, les bellicistes avec à leur tête Pâris, Priam, Demokos et certains autres membres de la cité et de l'autre côté, les pacifistes dont le leader n'est autre qu'Hector, avec à ses côtés sa mère Hécube et sa femme Andromaque. Après de multiples joutes verbales entre les deux camps auxquelles participe Cassandre, qui a le don de prophétie mais qui n'est jamais crue, la guerre pourrait finalement être déclarée, mais pour des raisons autres que l'enlèvement de la mystérieuse Hélène...
Mon avis.
Il y a quelques mois, je me lançais dans la lecture de l'Iliade, avec le souhait d'explorer en parallèle d'autres œuvres qui ont repris le récit original en le simplifiant, ou en le réinterprétant, comme c'est le cas ici avec La guerre de Troie n'aura pas lieu. L'occasion aussi pour moi de me plonger dans la lecture d'une pièce de théâtre, genre que j'ai tendance à délaisser.
L'intrigue de cette pièce de théâtre se situe aux origines de la guerre de la Troie, thématique qui n'est pas traitée dans l'Iliade. Même si des textes anciens laissent à supposer que c'est l'enlèvement d'Hélène par Pâris qui est à la source de ce conflit qui dura dix ans, le champ de l'imagination est large, et Jean GIRAUDOUX en livre sa version personnelle. C'est une réinterprétation qui se veut moderne. De nombreuses références mythologiques côtoient des préoccupations plus actuelles voire universelles. Le thème principalement traité est évidemment celui de la guerre et des conflits armés. Il ne faut pas oublier que la première représentation de cette pièce a été donnée en 1935, pile dans l'entre deux guerres. Hector incarne la menace qui pèse sur les populations de l'époque : une guerre vient de s'achever laissant derrière elle des morts, des blessés, des familles en souffrance, du désarroi, des ruines à rebâtir, mais il faut déjà se préparer à une deuxième salve de combats, du moins là est l'analyse de GIRAUDOUX. Finalement, à quoi bon faire la guerre ? Est-ce une question d'orgueil ? Pourquoi se bat-on ? Est-ce que le jeu en vaut la chandelle, question qui fait écho à celles que se posent Achille dans l'Iliade lorsqu'il voit mourir par centaines ses coéquipiers. Hélène incarne ces questions : sa beauté vaut-elle une guerre, surtout que la passion qui l'unit à Pâris semble s'éroder. Une autre thématique qui souligne la modernité de la pièce est la place qui est réservée aux femmes. Si l'Iliade est avant tout une histoire d'hommes, de gros muscles et de virilité masculine, les femmes sont dans La guerre de Troie n'aura pas lieu mises en avant pour leur sagesse et osent exprimer leur avis. Ainsi, Andromaque et Hécube apparaissent comme des pacifistes acharnées, incarnant la souffrance de toutes ces mères, épouses, filles d'hommes morts pour défendre un territoire, une idéologie. Hélène, la grande absente de l'Iliade, est elle aussi un personnage principal. Elle apparaît un peu naïve, séductrice dans l'âme et on voit rapidement que ce serait déraisonnable de déclencher une guerre pour ce personnage si banal dans ses travers humains.
Ces pistes de réflexion devaient être novatrices pour l'époque, surtout que la Seconde Guerre Mondiale n'est pas encore déclarée, GIRAUDOUX a donc été visionnaire et talentueux de dénoncer un acte de cet ampleur par la reprise d'un événement ô combien célèbre de l'histoire occidentale (même si on ne peut toujours pas affirmer avec certitude que cette guerre a bien eu lieu). Toutefois, la lire des décennies après, sortie de son contexte, m'a un peu laissée de marbre. Je l'ai lue dans une version augmentée, avec des éléments d'explications à destination de collégiens ou de lycéens. Cela m'a justement permis d'en saisir tous les enjeux. Sinon, je crois qu'il aurait été compliqué pour moi de déceler tous les effets de style de l'auteur. D'ailleurs, malgré les notes de bas de page, un bon nombre de références m'a échappé. Cela n'empêche pas d'avoir accès au gros de l'intrigue mais c'est toujours un peu frustrant de ne pas saisir l'ensemble des références qui sont faites à des figures de style ou éléments d'histoire. La structure est un peu poussive, j'ai fini par m'emmêler les pinceaux entre tous les personnages secondaires, difficile au bout d'un moment de savoir qui est partisan de la paix, qui ne l'est pas... Certains passages m'ont paru un peu longuet, mais peut-être parce que je n'ai pas su saisir le cœur de tous les messages. Je ressors de ma lecture un peu mitigée, mais toujours heureuse de découvrir un classique de la littérature (et ici du théâtre plus précisément) française.
Voilà une lecture qui change de l'ordinaire, qui peut être lue en deuxième intention, après avoir découvert les textes originaux de la guerre de Troie. Une réinterprétation des origines de la guerre, mais aussi l'occasion d'éclairer le contexte diplomatique des années 30. Très loin du coup de cœur mais pas inintéressant à lire, c'est très rapide qui plus est.
Dernières infos.
La guerre de Troie n'aura pas lieu a pour la première fois été jouée en 1935 dans une mise en scène de Louis JOUVET. La pièce en elle-même compte environ 140 pages.
Ma note.
Challenges.
* 100 livres à lire en 2021 : 31/100
* Défi lecture 2021 : Consigne 14 - Une pièce de théâtre - 31/100
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire